Pour vieillir en bonne santé, prenez soin de vos muscles

Pour vieillir en bonne santé, prenez soin de vos muscles

Par Matthew Lees, McMaster University

Crédit photo: iStock

Nous aimerions tous vivre longtemps; c’est du moins mon cas. Mais qu’en est-il de la possibilité de profiter du temps qui nous est imparti et de vivre en bonne santé?

Au cours du siècle dernier, l’espérance de vie humaine a augmenté de façon spectaculaire pour diverses raisons. Parmi celles-ci, on trouve les progrès réalisés dans les domaines de l’assainissement, de la santé publique, de la nutrition et de la médecine, qui ont permis de réduire la mortalité, en particulier chez les jeunes. En conséquence, beaucoup plus de personnes atteignent un âge avancé.

Selon Statistique Canada, les Canadiens avaient une espérance de vie de 81,6 ans en 2021, une impressionnante augmentation de 24,5 ans par rapport à 1921. D’ici 2050, on prévoit que le nombre de personnes âgées de 85 ans et plus aura triplé.

L’allongement de l’espérance de vie au cours du XXe siècle et après est une des plus grandes réalisations de l’humanité. Il est toutefois essentiel de faire une distinction entre la durée de vie — le temps écoulé entre la naissance et la mort — et la durée de vie en bonne santé, qui est la partie de la vie où un être humain vit sans incapacité. Les personnes âgées passent de plus en plus de temps en mauvaise santé, ce qui représente un fardeau important sur le plan individuel et de la santé publique.

À un âge avancé, la capacité à maintenir un mode de vie indépendant définit en grande partie la qualité de vie d’une personne. Il ne suffit pas de prolonger l’espérance de vie sans tenir compte de la santé. Notre objectif devrait être de réduire au maximum la différence entre l’espérance de vie et l’espérance de vie en bonne santé.

En tentant d’accroître la durée de vie en bonne santé, on remet en question l’idée que les maladies liées à l’âge sont inévitables et ne peuvent être atténuées ou éliminées.

L’importance des muscles

Le déclin de la masse, de la force et de la fonction musculaires (connu sous le nom de sarcopénie) constitue un défi majeur pour la santé de la population vieillissante. Cela peut entraîner une déficience fonctionnelle, une perte d’autonomie, des maladies métaboliques et accroître les risques de chute et de fracture.

Outre leur rôle dans la posture et la locomotion, les muscles contribuent largement au métabolisme de repos, en tant que réservoir de glucose (sucre) et de lipides (graisses). Ils représentent également un réservoir important d’acides aminés pendant les périodes de stress catabolique, lors d’une maladie grave par exemple. Les marqueurs de la santé musculaire à l’admission aux soins intensifs servent à prédire des résultats en matière de santé tels que le nombre de jours sans ventilateur et la mortalité, et l’âge aggrave les risques.

À partir de la cinquième décennie de vie, la masse musculaire décroît d’environ 1 % par an, et la force d’environ 3% par an. Ces pertes de masse et de force sont généralement entrecoupées de périodes d’inactivité musculaire (hospitalisation, maladie, etc.) qui accélèrent l’affaiblissement.

Il suffit d’une diminution relative de la marche (diminution du nombre de pas quotidiens) pendant seulement deux ou trois semaines pour entraîner des changements négatifs dans la composition corporelle, la force et la qualité musculaires, la résistance anabolique (capacité à utiliser les protéines alimentaires pour la construction de muscles) et une perturbation du contrôle de la glycémie chez les personnes âgées.

Étant donné le rôle fondamental du tissu musculaire dans la santé métabolique et générale, le maintien d’une masse et d’une qualité musculaires adéquates revêt une importance particulière pour l’allongement de l’espérance de vie en bonne santé.

Préserver la santé musculaire en vieillissant

Le tissu musculaire squelettique possède une grande plasticité : il se remodèle en fonction des contraintes physiques qui lui sont imposées. Il se développe (hypertrophie) en réponse à l’application de charges externes et disparaît rapidement (atrophie) lorsque ces charges sont retirées — si vous avez déjà eu un bras ou une jambe dans le plâtre, vous savez ce que je veux dire. La bonne nouvelle, c’est que nous pouvons utiliser la plasticité du tissu musculaire à notre avantage.

Dans le groupe de recherche de Stuart Phillips, professeur de kinésiologie à l’Université McMaster, nous étudions les effets de l’exercice et de la nutrition sur la santé des muscles squelettiques humains, avec un intérêt particulier pour le vieillissement.

Nos travaux ont montré que les exercices de résistance (musculation), même pratiqués de manière sporadique et avec des charges légères, peuvent constituer une stratégie efficace pour compenser les pertes musculaires pendant les périodes de faible activité ou d’inactivité chez les personnes âgées. De plus, ce type d’entraînement peut améliorer la sensibilité du tissu musculaire aux protéines alimentaires et aider à contrer la résistance anabolique. Il peut également rendre les muscles plus aptes à absorber le glucose et réduire ainsi les risques de développer des maladies telles que le diabète de type 2.

Les études démontrent que les personnes âgées ont besoin de plus de protéines alimentaires (les «briques de base» des muscles) que ne le suggèrent les lignes directrices établies. Des travaux récents menés dans notre laboratoire ont révélé que la consommation de protéines de bonne qualité peut améliorer le développement musculaire chez les personnes âgées.

La stratégie optimale semble reposer sur une consommation quotidienne de 1,2 à 1,6 gramme de protéines par kilogramme de poids corporel (soit 50 à 100% de plus que ce qui est actuellement recommandé), provenant d’un mélange de sources animales (viande, poisson, produits laitiers) et végétales (légumineuses, par exemple).

Quel que soit votre âge aujourd’hui, vous pouvez constituer l’équivalent métabolique d’un régime d’épargne retraite en pratiquant régulièrement des exercices physiques et en mangeant suffisamment de protéines de qualité. Vous pourrez ainsi réduire l’écart entre votre espérance de vie et votre espérance de vie en santé, conserver votre indépendance et maximiser votre qualité de vie lorsque vous atteindrez un âge avancé.The Conversation

 

Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. 

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