Commandes téléphoniques, achats en ligne, voitures d’occasion… certaines factures nous réservent des surprises. Comment détecter les frais cachés et s’y opposer.
Le scénario est commun: on commande un repas par téléphone. Le paiement se fait en quelques secondes. À l’arrivée du livreur, on remarque que des frais de livraison de 3,99 $ ont été ajoutés à la facture. Pourtant, on n’a pas été prévenu de la chose au moment de payer. Voilà un cas typique de frais cachés. Ce terme s’applique à différentes pratiques telles facturer des services non demandés ou exiger un prix supérieur à celui annoncé. Dans ce genre de situation, l’article 224c de la Loi sur la protection du consommateur est le plus souvent invoqué. Il stipule qu’«aucun commerçant, fabricant ou publicitaire ne peut, par quelque moyen que ce soit… exiger pour un bien ou un service un prix supérieur à celui qui est annoncé».
Au fédéral, la Loi sur la concurrence va dans le même sens. Selon le Bureau de la concurrence du Canada, elle interdit «à quiconque de donner des indications qui sont fausses ou trompeuses sur un point important. Une indication concerne un point important si l’impression générale qu’elle donne pousse une personne à agir d’une manière précise, comme acheter ou utiliser un produit ou un service.»
Pratiques frauduleuses
Selon Jimmy Lambert, avocat spécialisé en recours collectifs, les frais cachés sont, autrement dit, des frais non optionnels. «Avec l’article 224c, le législateur interdit ce type de pratique, car elle engendre une concurrence déloyale», explique l’avocat, qui a notamment entrepris des recours collectifs contre Nintendo, Cogeco, UberEats, Doordash et Ironman. En agissant ainsi, les compagnies facturant des frais cachés semblent présenter des frais plus bas que la concurrence, ce qui berne le consommateur.
Un exemple a récemment défrayé les manchettes: l’exploitant de FlightHub.com et JustFly.com a été condamné à une sanction de 5 millions de dollars par le Bureau de la concurrence du Canada. Celui-ci a examiné des milliers de plaintes de consommateurs contre l’agence de voyages virtuelle montréalaise qui leur avait dissimulé des frais facturés au moment de la sélection des sièges d’avion. Puis, il avait haussé les prix, tout en donnant l’impression que les réservations pouvaient être annulées sans frais, alors qu’en vérité des pénalités s’imposaient. Bien que FlightHub soit aujourd’hui en situation d’insolvabilité et sous protection contre ses créanciers, le site de l’entreprise demeure actif.
Recours individuels
Devant une situation de ce genre, c’est à nous, consommateurs, qu’il revient d’entreprendre des démarches. On peut contacter le service à la clientèle de l’entreprise, négocier une entente, envoyer une mise en demeure. Si on n’obtient pas satisfaction, on a alors le choix de recourir aux tribunaux, comme à la Cour des petites créances (si le montant est de 15 000 $ et moins). Parallèlement, on peut déposer une plainte à l’Office de la protection du consommateur (OPC). Cette plainte alertera les inspecteurs de l’organisme, qui vérifieront si les pratiques de l’entreprise sont illégales. «Le cas échéant, la compagnie risque de faire l’objet de poursuites judiciaires», explique Charles Tanguay, porte-parole de l’OPC.
L’OPC n’a pas juridiction sur tout; dans certains cas, elle possède une juridiction partagée. Par exemple, pour les services d’internet et de télécommunication, il faudra aussi contacter la Commission des plaintes relatives aux services de télécom-télévision (CPRST). Le Bureau de la concurrence se penche également sur des plaintes relatives aux frais cachés et traite les plaintes des consommateurs. L’Autorité des marchés financiers, elle, peut servir en cas de problème lié à des services financiers reçus.
Actions collectives
Pris individuellement, les frais cachés représentent généralement une somme marginale, comme des frais de livraison de quelques dollars. Or, en fin de compte, les compagnies qui appliquent ces frais encaissent beaucoup d’argent auprès des consommateurs. D’où l’intérêt de lancer un recours collectif. «Cette action vise non seulement à obtenir une indemnisation pour soi-même, mais aussi pour toutes les personnes ayant vécu le même problème, explique Jimmy Lambert. C’est la meilleure façon de changer les pratiques illégales d’une entreprise.»
En somme, tous les frais cachés devraient nous faire réagir. «Si personne n’intervient, les entreprises continuent leurs pratiques frauduleuses pendant des mois, voire des années», alerte l’avocat. Des cabinets comme celui de Lambert Avocat prennent des mandats à pourcentage pour les recours collectifs. Donc, les personnes qui entreprennent un recours collectif n’ont pas à assumer de frais juridiques, même en cas de revers en cours.
6 exemples de frais cachés
1 Résiliation de bail
La détérioration de l’état de santé de notre conjoint nous oblige à quitter notre logement dans une résidence pour personnes âgées autonomes. Pour résilier le bail, le gestionnaire du complexe exige une pénalité équivalente à quatre mois de loyer. Cette demande est illégale. Selon le site internet du Tribunal administratif du logement (nouvelle appellation de la Régie du logement), un «locataire peut résilier le bail en cours s’il ne peut plus occuper son logement en raison d’un handicap. La résiliation prend effet deux mois après l’envoi d’un avis au locateur lorsque le bail est de 12 mois et plus ou un mois après cet avis lorsque le bail est à durée indéterminée». L’avis de résiliation doit être accompagné d’une attestation de l’autorité concernée, comme une attestation médicale. En cas de conflit, on consulte le Tribunal administratif du logement.
2 Coût de services
Si on a signé un bail en résidence qui comprend des services comme les repas, le ménage et la lessive, les frais de ces services ne peuvent être augmentés unilatéralement. À noter que, si les services sont payés à la carte, comme la restauration, et non prévus dans le bail, la résidence peut toutefois en augmenter le coût comme bon lui semble; ils ne sont alors pas soumis à la juridiction du Tribunal du logement.
3 Achat d’une voiture
On a trouvé le véhicule qui répond à nos besoins. L’étiquette dans la vitre arrière affiche 4 999,99 $ Or, au moment de la signature du contrat de vente, le concessionnaire ajoute un montant de 500 $ pour le transport du véhicule et un autre 500 $ pour la préparation. Cette pratique courante dans le secteur de l’automobile usagée est illégale. Le concessionnaire a l’obligation légale d’afficher un prix de vente «tout inclus». Autrement dit: le prix sur l’étiquette doit être le prix à débourser, à l’exception des taxes ou des droits sur les pneus neufs. Par contre, le concessionnaire a le droit de proposer des options, comme une garantie prolongée ou une protection antirouille.
4 Actes médicaux en pharmacie
Depuis la pandémie, le gouvernement québécois a élargi la gamme de soins fournis par les pharmaciens. Les frais imposés aux patients, sous forme de franchise ou de coassurance, ont cependant freiné l’adoption en masse de ces services. Heureusement, la réglementation a changé avec l’adoption du projet de loi 31. Depuis le 25 janvier 2021, les frais de plusieurs soins de santé sont couverts par Québec. La prescription de certains médicaments, le prolongement ou la modification d’une ordonnance d’un médecin et la substitution d’un médicament en cas de rupture d’approvisionnement, en font partie.
5 Assurance, planification et courtage hypothécaire
Dans ces domaines, les représentants ont le devoir d’être transparents. «Lorsqu’un représentant exige des émoluments, il doit les divulguer au client par écrit avant sa prestation de service et indiquer les émoluments demandés ainsi que le fait qu’il reçoit toute autre forme de rémunération, notamment une commission», indique l’Autorité des marchés financiers.
6 Services en télécommunication
Elles ne sont pas toujours faciles à comprendre! Ce charabia de chiffres sert-il à camoufler des frais? En cas de mésentente, on peut d’adresser à la Commission des plaintes relatives aux services de télécom-télévision (CPRST). Le service est gratuit et près de 9 plaintes sur 10 sont réglées, souvent dans les 30 jours.
Pour trouver de l’aide:
• Autorité des marchés financiers: 514 395-0337 (Montréal), 418 525-0337 (Québec), 1 877 525-0337 (autres régions) ou lautorite.qc.ca.
• Commission des plaintes relatives aux services de télécom-télévision (CPRST): 1 888 221-1687 ou ccts-cprst.ca.
• Office de la protection du consommateur: 1 888 672-2556 ou consulter le site web pour connaître les numéros locaux à opc.gouv.qc.ca.
• Tribunal administratif du logement: 514 873-2245 (Montréal, Laval et Longueuil), 1 800 683-2245 (autres régions) ou tal.gouv.qc.ca.
les informatons sont tres bien expliquees et tres utiles merci
C’est très pertinent cet article car ça nous informe de certaines situations que nous ne connaissons pas. C’est intéressant de savoir que nous avons des recours.
Je vous remercie beaucoup pour tout ces très bons renseignements, ils nous sont très précieux
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