À l’approche des élections et de la Journée nationale des aînés, il est plus opportun que jamais de faire entendre sa voix auprès des élus. Mais comment s’assurer que nos revendications ou celles de notre association trouvent une écoute attentive et, surtout… satisfaction?
Le vieillissement de la population est un phénomène observé aujourd’hui mondialement. D’après un rapport de l’Organisation des Nations unies (ONU), les 60 ans et plus représentent 13 % de la population mondiale, un taux en croissance annuelle de 3 %. Chez nous, le nombre d’aînés de 65 ans et plus était évalué à 1 503 921 en 2016. En 2031, il s’agira de plus du quart de la population québécoise, et ce nombre n’arrêtera pas de croître jusqu’en 2061! Un poids démographique majeur, qui a incité certains à se regrouper au printemps dernier sous l’égide de cinq associations en vue des élections générales provinciales du 1er octobre, pour représenter plus de 700 000 de leurs pairs et faire peser leurs demandes auprès des partis politiques dans le document Pour un Québec digne de ses aînés.
Si ce regroupement compte se faire entendre du prochain gouvernement, d’autres options permettent aussi de voir ses demandes se réaliser. Ancien attaché politique de 1999 à 2002 au cabinet du premier ministre Landry, du leader parlementaire du gouvernement et du ministre du Revenu, et ancien président de l’Association québécoise des retraité(e)s des secteurs public et parapublic (AQRP) et de l’Association québécoise des lobbyistes (AQL), Mathieu Santerre est aujourd’hui associé chez L’Orange Bleue affaires publiques et collaborateur au Huffington Post. Il nous livre ses conseils avisés pour nous aider à atteindre nos objectifs auprès des élus municipaux, régionaux et fédéraux.
1 Contacter le cabinet
Même si c’est la bonne démarche, l’idéal n’est pas toujours de commencer par contacter le cabinet d’un ministre pour faire avancer ses droits. Mieux vaut s’adresser d’abord aux hauts fonctionnaires de l’intérieur, souvent oubliés: les sous-ministres, leurs adjoints et les directeurs régionaux… Ils détiennent une expertise fine des dossiers, sur lesquels ils ont d’ailleurs la main haute. On se renseigne auprès d’eux sur le fonctionnement administratif gouvernemental, car, s’ils possèdent les ressources nécessaires, ces hauts fonctionnaires peuvent déjà résoudre de multiples problèmes.
Avant même le premier contact formel, si on se présente auprès de l’autorité concernée avec un document de faits non reconnus sur la place publique et mal documenté, on réussira difficilement à la convaincre ou à lui expliquer l’étendue d’une problématique. D’où la force réelle d’une vaste coalition, qui permet de mieux se faire entendre. Une nuance, toutefois: agir seul ou en petit nombre s’avère parfois plus efficace que se rassembler à plusieurs. En effet, dans ce dernier cas, si une mésentente survient au sein du groupe, elle peut devenir un véritable frein à l’aboutissement du dossier.
Même pour une problématique individuelle, on ne néglige pas les députés régionaux et municipaux. Comme ils font le plus gros travail d’arrimage avec le gouvernement, ils sont notre lobbyiste le plus efficace! Quelle que soit notre opinion politique et la leur, on les contacte! On prend rendez-vous auprès du bureau choisi et, toujours armé d’un dossier fourni et sérieux, on expose nos diverses demandes.
2 Participer à une table de concertation régionale
La table permet au gouvernement de garder un contact régulier et continu avec la population. Les informations récoltées sur le terrain lui font ainsi découvrir ou mieux connaître ses préoccupations. En parallèle aux tables mêmes, des alliances de concertation peuvent également se créer.
3 Alerter les médias
Il n’y a pas de meilleure interface dans l’équation pour faire avancer les dossiers efficacement! Si nos informations sont bien fondées, on a avantage à les faire connaître et circuler sur la place publique par leur entremise. Les médias ont la capacité de dévoiler au grand jour des situations inacceptables. C’est grâce à eux, par exemple, que la population a été sensibilisée au taux de suicide après 65 ans, avec l’appui des intervenants en prévention suicide. Sans eux, nous ne serions pas toujours en mesure non plus d’agir sur certaines orientations gouvernementales ou de provoquer des changements sociaux. Les réflexes des médias sont d’évaluer les données fournies, par les associations notamment, avant de discuter avec ces dernières de la qualité des dossiers et des possibilités d’action. Ils font généralement «décoller» la plupart des dossiers qu’ils décident de mettre en lumière.
4 Utiliser les réseaux sociaux
Ce canal de communication relativement récent entraîne des effets certains. Sur Twitter, Facebook, Instagram et autres réseaux sociaux, on rencontre plusieurs types d’intervenants. Des citoyens s’y expriment spontanément; quand leurs commentaires se multiplient naturellement autour d’un enjeu, cela donne l’occasion de repérer une problématique en devenir. On trouve aussi des abonnés de tous âges qui commentent systématiquement et des gens affiliés ou estampillés avec l’étiquette d’un parti politique, syndicat ou autre organisme. Leurs activités à tous permettent de sentir poindre certaines tendances sociétales actuelles ou futures. Que ce soit pour les gouvernements ou les gens désireux de faire valoir leurs droits, l’important sera de faire la distinction entre les différents interlocuteurs, de reconnaître ceux qui sont porteurs d’intérêt et à qui les relais d’information conduits par des organismes officiels doivent prêter le plus d’attention. Si on possède une capacité d’intervention sur les réseaux, individuellement ou à travers notre activité associative, il est donc judicieux de l’utiliser.
5 Téléphoner
Les élus sont plus accessibles qu’on ne le croit! Et souvent ouverts à écouter une personne ou un organisme. Cette démarche peut s’avérer gagnante auprès d’un député, d’un ministre régional ou d’une association. L’appel téléphonique devra alors être précédé ou suivi par l’envoi d’un courrier écrit et d’un dossier sérieux, suivis de relance téléphonique, et ce, même si on ne nous rappelle pas. Ça bouge très vite dans un cabinet ministériel: sans suivi régulier, le dossier risque d’être mis de côté temporairement, puis oublié!
6 Présider ou appartenir à un OSBL
Quand on est coalisés au sein, par exemple, d’un organisme sans but lucratif, ou qu’on travaille main dans la main avec une association, les gouvernements et élus concernés comprennent souvent mieux notre message, car il devient alors celui d’une collectivité et non plus d’un seul individu, avec un impact différent, impliquant généralement une réaction différente. Opérer des changements sociétaux en solo est très difficile. Mieux vaut faire d’abord le tour des organismes susceptibles de devenir nos alliés, les contacter et les rejoindre le cas échéant, s’il est possible de faire intérêt commun.
7 Organiser un événement bénéfice
Disposer de ressources financières s’avère toujours intéressant pour avancer et se faire entendre. De là à organiser un événement bénéfice? Cela dépend vraiment du message qu’on souhaite faire passer. Il faut être conscient que la tenue de ce type d’événement est souvent une corvée très exigeante, tant en énergie qu’en temps. L’idéal, dans tous les cas, c’est de trouver des gens prêts à nous aider à le mettre sur pied et le mener à bien.
Face à l’élu
Ça y est, on a décroché un appel ou un rendez-vous? Durant la discussion, il importe de s’exprimer clairement, poliment et sans agressivité. Dans la lettre signée adressée à l’autorité concernée, trois points sont par ailleurs essentiels: expliquer la nature du problème soumis, celle de la solution proposée, puis en quoi cette solution répondrait aux priorités du gouvernement et apporterait des avantages à la collectivité. Ce dernier point, le lien entre nos solutions et les priorités des autorités, est généralement le plus difficile à établir, par écrit ou verbalement, lors de la discussion avec l’élu. Bon à savoir quand on se prépare!
La meilleure démarche
Une fois qu’on a trouvé le bon interlocuteur, la démarche est similaire dans tous les cas, avec trois étapes à observer:
-> faire connaître au préalable la teneur du dossier aux acteurs concernés;
-> envoyer un dossier aux données solides et bien documentées, écrit et signé, par courrier et non par courriel;
-> effectuer un suivi téléphonique en demandant la tenue d’une rencontre et des retours par courriel, pour garder une trace écrite des conversations.
Durant tout ce processus, une seule règle: ne jamais lâcher! Un simple «On va vous revenir» n’est pas une réponse. Lorsqu’on raccroche, il faut avoir réussi à préciser avec son interlocuteur quelle sera l’étape suivante. Si on n’y parvient pas, on répond qu’on les rappellera dans trois semaines. En leur imposant un agenda, on s’assure qu’ils ne nous oublieront pas.
Pour en savoir plus
- • L’Orange Bleue Affaires publiques: (418) 998-6540 ou à lorangebleue.biz.
- • Paradigme Affaires publiques: 1 855 523-7772 ou à paradigme-ap.com.
- • Association québécoise des retraité(e)s des secteurs public et parapublic (AQRP): 1 800 653-2747 ou à aqrp.qc.ca.
- • Fédération de l’âge d’or du Québec (FADOQ): 1 800 544-9058 ou à fadoq.ca.
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