Dès notre départ, nous avions privilégié la formule suivante: se rendre rapidement jusqu’au canal de Panama et visiter en revenant, ce qui nous permettrait de mieux gérer notre temps, pensions-nous. Le fait d’entrer dans un pays, signifie quitter l’autre en règle, mais avant de s’attaquer à l’administration guatémaltèque, il faut passer à travers Cuauthemoc qui tient son marché hebdomadaire. La rue principale menant à la frontière est complètement bloquée. Qu’à cela ne tienne, un policier nous indique une rue secondaire qui nous apparaît plus étroite. Visiblement le camion est trop gros, mais avons-nous le choix? Nous voici donc dans une rue en terre, en très mauvais état qui, elle aussi, compte son lot d’étals. Cahin-caha, avancées et reculs, nous finissons par tourner un coin de rue, quand soudain un cri… Le toit de la caravane vient d’arracher la toile qui servait d’abri à un comptoir. Après de plates excuses et un petit exercice de reculons, nous avançons lentement et chaque boutiquier lève à l’aide d’une perche ce qui lui sert de couverture. Bon, nous laissons derrière nous les chiffons. Nous sortons sans autre problème du Mexique. En ce qui concerne le passage des personnes, le Mexique et le Guatemala ne sont pas tatillons, mais lorsqu’il s’agit de traverser le camion, le nombre de feuilles à remplir et de tampons exigés augmente.
Nous attaquons donc la frontière du Guatemala par La Mesilla. Une horde de tramitadores, agents qui facilitent le passage aux douanes moyennant une rémunération volontaire, et de changeurs de monnaie nous assaille. Ils s’accrochent même au camion et on a beau multiplier les muchas gracias, ils en remettent. Nous promenant d’un édifice à l’autre, nous réussissons à obtenir les papiers voulus, et ce, en moins de trente minutes, mais des plus intenses ce qui est tout de même mieux que lors de notre dernier passage il y a deux ans. Négocier la monnaie du pays avec un requin qui vous brandit une liasse de billets sous le nez n’est pas des plus faciles. Avec une bonne calculatrice, la connaissance du taux de change et une voix ferme, on arrive à des miracles, ou presque.
Le Guatemala est un pays dont la population est à 80% indienne. Dire qu’ils sont pauvres est une pâle vérité. Les gens vivent dans des cabanes accrochées dans les montagnes, en fait un assemblage de planches et de tôle d’où émane un feu de bois, et des enfants crottés qui se tiraillent. Les femmes portent toujours le costume du pays et s’échinent devant une montagne d’épis de maïs à éplucher qu’elles mettront ensuite sur le toit de tôle pour les faire sécher. Les cultures de subsistance se pratiquent à même les flancs des montagnes.
Un petit accident
Chose curieuse, les routes sont généralement belles, bien que nous ayons eu à circuler durant une centaine de kilomètres sur une autoroute en construction; du monde et de la machinerie lourde en quantité devraient permettre de la terminer rapidement. Et parlant de circulation, que doit-on retenir du Guatemala si ce n’est les chicken bus et la pollution? Des autobus colorés avec toutes sortes d’inscriptions ayant un rapport avec Dieu, la Vierge et les saints du style Fe en Dios y adelante (Foi en Dieu et en avant!), car les conducteurs sont de vrais kamikazes. Roulant à toute vitesse, dépassant dans les courbes à plus de 2000 m d’altitude, il faut les laisser passer et être prudent au cas où les bagages sur le toit seraient mal arrimés.
Nous avons rendez-vous avec des Québécois qui pratiquent un bénévolat social dans la grande banlieue de Ciudad Guatemala. Ces derniers participent à divers projets qui ont pour but d’aider les Guatémaltèques. Une grande maison, une cinquantaine de têtes grises et de l’enthousiasme à revendre. Nous soupons avec eux et comme il est trop tard, nous décidons de coucher dans la rue, ce que nous ne faisons jamais par sécurité. Nous ramassons tout ce qui pourrait être volé et nous nous glissons sous les couvertures. Bang! À 2h45, une auto nous rentre dedans. Réveillés? Et comment! En jaquette, me voici en compagnie de Raymond à constater les dégâts et à apprécier notre chance de ne rien avoir. Nous apercevons une aile d’auto déchirée, des débris de vitre et une moulure qui traîne sous le camion. Le chauffard, disparu. De notre côté, deux pattes de soutien abîmées et inutilisables, la structure de bois des coins arrière et avant gauche brisée, rien de plus. Le camion est intact. Que faire? Se recoucher et attendre que le jour se lève afin de mieux réévaluer les dégâts et les réparations qui s’imposent.
Au petit matin, avant de dire au revoir à nos nouveaux amis, nous vérifions l’étendue des dommages et constatons que rien ne nous empêche de continuer notre odyssée.
Lina et Raymond
Pour en savoir davantage sur Lina et Raymond et lire leurs autres chroniques, consultez notre article Portrait des caravaniers et premières aventures?
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