Prélèvements automatiques: les contester, les stopper

Prélèvements automatiques: les contester, les stopper

Par Sophie Stival

Crédit photo: iStockphoto.com

Vous surveillez toujours de près vos relevés bancaires? Bonne idée, car il arrive que des erreurs surviennent. «Dans le cas d’une carte de crédit, la population est beaucoup mieux protégée. En cas de litige ou de fraude, on appelle simplement le fournisseur de sa carte, et la transaction est rapidement annulée. C’est au commerçant de prouver que le service a été rendu et de se justifier. Avec les prélèvements automatiques, c’est plus compliqué», constate le porte-parole de l’Union des consommateurs, Philippe Viel. 

Les DPA permettent de payer des factures ou de transférer des fonds de façon régulière. Avec eux, on autorise notre institution financière à prélever à certains moments des sommes qu’elle pourra ensuite verser à un fournisseur particulier, comme Bell ou Vidéotron. 

Mais avant de s’engager à régler nos comptes de cette manière, il faut s’entendre avec l’émetteur des factures en signant un formulaire d’autorisation qu’on appelle aussi «Accord de DPA du payeur». Certains demanderont un spécimen de chèque afin de vérifier nos informations bancaires. On y inscrira alors la mention «NUL» à l’encre sans le signer. 

Ce que doit préciser l’accord de débit préautorisé (DPA)

  • Le montant du débit préautorisé, s’il s’agit d’un montant fixe. Si ce montant est variable (factures de services publics, par exemple), l’accord doit le préciser. Dans ce dernier cas, l’émetteur de factures a l’obligation de communiquer au consommateur le montant au moins 10 jours civils avant de retirer les fonds, à moins que ce dernier n’ait renoncé explicitement à ce délai ou n’ait accepté de l’abréger. 
  • La fréquence du débit préautorisé. Par exemple: hebdomadaire, mensuelle, semestrielle ou annuelle. Il s’agit parfois aussi de dates précises. La fréquence peut également changer. C’est le cas si l’on nous facture un produit ou un service seulement à l’achat. L’accord doit alors préciser que les débits seront sporadiques. Le fournisseur doit obtenir l’autorisation du consommateur pour chaque retrait, par exemple en lui donnant un mot de passe ou un code secret. 
  • Les modalités de remboursement en cas de débits préautorisés non conformes à l’accord. 
  • Les modalités d’annulation en cas de résiliation de l’accord. 

Source: l’Agence de la consommation en matière financière du Canada et l’Association canadienne des paiements. 

Pour plus de renseignements 

On communique avec notre institution financière ou avec la Division des communications et de l’éducation de l’Association canadienne des paiements.

Tél.: 1 613 238-4173. Courriel: info@cdnpay.ca

Prélèvement incorrect ou non autorisé

C’est l’Association canadienne des paiements (ACP) qui, avec ses institutions financières membres, s’occupe du traitement des DPA. En 2002, elle a instauré la règle H1. Celle-ci établit notamment les formalités que doivent respecter le fournisseur et le payeur. Il y est également question des procédures de contestation et de remboursement pour le consommateur. 

Par exemple, il est interdit au fournisseur de changer la date du prélèvement préautorisé sans en avertir le client. Une telle situation vous arrive? Vous vous faciliterez les choses si vous avez pris soin de conserver une copie du formulaire d’autorisation et de la confirmation écrite que le fournisseur doit vous remettre si vous avez conclu une entente par Internet ou au téléphone. 

L’Agence de la consommation en matière financière du Canada rappelle au consommateur qu’il dispose de 90 jours civils suivant la date du retrait pour signaler à sa banque un prélèvement incorrect ou non autorisé dans son compte et demander un remboursement. «Mais le délai de prescription pour un consommateur qui souhaite récupérer des sommes d’argent est de trois ans», ajoute Philippe Viel. 

Ce dernier poursuit : «En fait, la règle H1 encadre ce qui se passe entre les institutions bancaires, mais elle ne protège pas réellement le consommateur. Selon nos enquêtes, la plupart des consommateurs, des commerçants et même des employés des succursales bancaires ne connaissent pas le contenu de cette règle.» On mise sur la bonne foi des entreprises, mais ça ne suffit pas toujours, semble-t-il. 

Arrêter un paiement

Si l’entente signée avec l’entreprise prévoit le prélèvement d’une somme fixe et que survient un changement inhabituel dans nos DPA, il est possible de faire un arrêt de paiement en appelant notre institution financière. «Puisqu’on confie nos épargnes à notre banquier, ce dernier est responsable du prêt qu’on lui accorde. En cas de pépin, il devrait aussi avoir une part de responsabilité, même s’il joue le rôle d’intermédiaire dans ces transactions», affirme M. Viel. 

De notre côté, on ne peut cesser comme bon nous semble un paiement préautorisé. Une entente a été conclue, il faut tenter de la respecter. Si on est insatisfait du service offert par le fournisseur, il vaut mieux d’abord formuler nos récriminations pour essayer de régler le différend. 

Notre insatisfaction concerne un fournisseur de services de télécommunications? On peut aussi porter plainte auprès du Commissaire aux plaintes relatives aux services de télécommunications (CPRST). «Ceux qui font appel à cet organisme canadien s’en disent assez heureux», constate Philippe Viel. L’Office de la protection du consommateur peut également intervenir auprès des commerçants pour qu’ils respectent leurs obligations envers les consommateurs. 

Si on souhaite arrêter des DPA avec un fournisseur, il faut aviser ce dernier ainsi que notre institution financière. «Au cours des mois suivant cette interruption, il sera sage de surveiller ses relevés bancaires afin de s’assurer que les prélèvements ont cessé», conseille M. Viel. 

Des frais variables abusifs

Peut-être avec-vous signé des contrats avec des services publics ou de télécommunications qui prévoient des forfaits avec un montant de base mensuel, plus des frais de dépassement. Peut-être aussi que, après avoir excédé le nombre de minutes (ou de mégaoctets) qui vous étaient allouées, vous avez trouvé abusive la somme additionnelle qu’on vous réclamait. 

Beaucoup de confusion entoure ce genre d’entente. Si on a signé un accord de DPA pour des montants variables, l’entente doit indiquer cette précision, et l’entreprise devra donner un préavis d’au moins 10 jours pour nous faire connaître la somme qui sera débitée. À moins qu’on ait accepté de renoncer à ce délai, ou encore de le raccourcir, on peut contester le paiement et exiger un changement de tarification. 

«Un petit nombre de fournisseurs respectent cette exigence. Il y a un laxisme qui pénalise les consommateurs, croit Philippe Viel. Peu d’entre eux connaissent leurs droits et les recours qu’ils ont pour contester leurs factures. Même les employés des banques et des fournisseurs ne sont pas parfaitement au fait de la réglementation en question», ajoute-t-il. 

Il arrive aussi qu’un retrait est effectué quelques jours plus tôt que prévu. Une telle manoeuvre peut mettre certains consommateurs à découvert dans leur compte et, par conséquent, engendrer pour eux des frais élevés. Encore là, c’est une situation qu’ils n’ont pas à tolérer. 

Autre cas: vous avez sans doute remarqué que, à l’échéance de certains contrats, un accord de débit préautorisé est renouvelé automatiquement s’il y a absence de nouveaux éléments majeurs (prix, type de service offert). Cette façon de faire est parfois utilisée dans les contrats d’assurance auto ou résidentiel ou certains contrats de télécommunications. Vous devez bien sûr être avisé par écrit de ce renouvellement et des changements afférents. «Mais s’il y a de nouveaux éléments essentiels au contrat, le consommateur doit donner son consentement explicite ou refuser sans aucuns frais la nouvelle entente lorsqu’elle ne lui convient pas», rappelle M. Viel. 

Annuler un accord de prélèvement automatique

Un accord de débit préautorisé n’est pas un contrat signé pour la vie. Vous pouvez toujours l’annuler. Pour cela, vous devez en aviser l’émetteur des factures avec lequel vous avez conclu l’accord. Cet accord doit justement spécifier la procédure à suivre pour annuler l’autorisation que vous avez accordée au fournisseur. Ce n’est pas le cas? Faites connaître votre décision par écrit au fournisseur concerné, et conservez une copie de votre lettre, conseille l’Association canadienne des paiements.

Remarquez que cette procédure ne change en rien les obligations qui existent entre vous et le fournisseur. Supposons que vous aviez accepté de payer par DPA la location de votre logement et que vous ne voulez plus procéder ainsi. Vous devrez bien sûr continuer de verser les mensualités prévues à votre bail! Mais il s’agira alors de vous entendre avec le propriétaire sur une autre modalité de paiement – ce pourrait être par chèque, par exemple. 

Une dernière petite chose intéressante à retenir: en cas de fraude ou de prélèvements non autorisés successifs, vous pouvez toujours fermer votre compte de banque et en ouvrir un autre, remarque l’Union des consommateurs. 

Plus de transactions, plus d’erreurs?

Il y a 25 ans, on traitait annuellement 75 millions de débits préautorisés au pays (selon l’Association canadienne des paiements). En 2009, on en était rendu à 630 millions! «Il s’agit d’un volume de transactions fort important. Imaginons un petit pourcentage d’erreur, par exemple 0,1%», note Philippe Viel. On aurait alors 630 000 transactions potentiellement problématiques pour les consommateurs! 

Le nombre grandissant de modes de paiement combiné aux nouvelles technologies, comme le paiement mobile ou même PayPal, nécessite un système de paiement des plus efficaces. Il y a trois ans, un groupe de travail a examiné le système de paiement canadien et a conclu que ce dernier était désuet (Le Canada à l’ère numérique, décembre 2011). 

«Notre structure d’encadrement des paiements serait dirigée par des banques et des institutions dont les intérêts sont mieux servis lorsqu’elles empêchent l’intégration dans le système de nouveaux venus qui pourraient mettre en place les innovations dont les Canadiens ont besoin», affirment les auteurs de l’étude. 

Par ailleurs, l’Union des consommateurs prétend depuis plusieurs années qu’il y a un «manque flagrant de suivi et de contrôle par les institutions financières suite à l’annulation d’une autorisation de prélèvement. Des frais sont imposés au consommateur et les technologies ne semblent pas permettre une protection systématique contre les prélèvements non autorisés récurrents». 

Hélas, la Loi sur la protection du consommateur ne prévoit pas de réelle protection dans le cas des paiements préautorisés. C’est au consommateur que revient la responsabilité de réclamer tout montant non autorisé ou tous les frais découlant d’une insuffisance de fonds.

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