Imagerie médicale: comment s’y retrouver?

Imagerie médicale: comment s’y retrouver?

Par Anne-Christine Schnyder

Crédit photo: LinkedIn Sales Navigator via Unsplash

Radiographie, scanner, résonance magnétique, doppler, scintigraphie: les méthodes de prises d’images pour établir un diagnostic sont si nombreuses qu’on peut s’y perdre! Deux spécialistes nous guident en cette matière. 

Aide précieuse pour poser des diagnostics de plus en plus précis et rapides, voire des gestes thérapeutiques, l’imagerie médicale regroupe tous les examens d’imagerie qu’on pratique en médecine (incluant la radiologie et la médecine nucléaire). «La différence principale entre la médecine nucléaire et la radiologie, c’est la provenance des rayonnements, précise le DAnthony Ciarallo, directeur de la division de médecine nucléaire du Centre universitaire de santé McGill et professeur adjoint de radiologie diagnostique à l’Université McGill. En radiologie, les rayons X proviennent de la machine et traversent le patient. En médecine nucléaire, on injecte un produit radioactif au patient, qui émet alors des rayonnements. Alors que la médecine nucléaire évalue le fonctionnement des organes et des tissus ciblés, la radiologie examine surtout l’anatomie, la structure.» À partir de là, l’imagerie se décline en toute une série d’examens, chacun avec ses spécificités et son utilité.

  

La radiologie de base ou radiographie

Cette technique, très utile mais relativement limitée, utilise les rayons X et une plaque sur laquelle on s’appuie pour la prise de la radiographie. Indolore, l’examen dure quelques secondes et la dose de radiation est très faible. «Ça permet essentiellement de voir les os, les fractures; c’est très utilisé en traumatologie, mentionne le Dr Gilles Soulez, radiologue au CHUM et directeur du département de radiologie, radio-oncologie et médecine nucléaire de l’Université de Montréal. En utilisant diverses pénétrations de rayons X, on peut aussi voir le poumon, une pneumonie par exemple, ainsi que l’air, donc une occlusion intestinale, et des choses très denses au niveau de l’abdomen, comme des calculs au rein.»

Le scanner

Cet examen est beaucoup plus précis que la radiographie. Sans douleur, il dure quelques minutes. Le patient s’allonge sur une table qui se déplace dans l’appareil en forme de tunnel pendant l’émission des rayons X. Selon la nature de l’examen, un contraste iodé est administré (contrindiqué en cas d’insuffisance rénale sévère ou d’allergie à l’iode), le plus souvent par intraveineuse. 

«On peut reconstruire n’importe quel plan pour aller chercher une tumeur [c’est un des meilleurs examens pour détecter les cancers du poumon], un organe précis, une pathologie [pulmonaire, urinaire, inflammatoire de l’intestin, etc.], voire un blocage artériel, un anévrisme ou un AVC, énumère le spécialiste. Ça peut même remplacer la coronarographie [examen avec cathéter], sans permettre toutefois de faire l’intervention, de poser une endoprothèse [ou stent]. On l’utilise aussi pour toutes les applications musculo-squelettiques: hernies discales, rétrécissement de la moelle épinière, fractures subtiles, arthrose.»

L’échographie et son dérivé, le doppler

Cette technique emploie des ultrasons, émis et reçus par une sonde qu’on déplace sur la peau ou qu’on insère par voie vaginale ou rectale, selon l’examen requis. Son innocuité est totale; il n’y a pas d’irradiation. «C’est très bien pour voir les structures dans l’abdomen, tout le système gynécologique, la prostate, le foie [dont les métastases hépatiques], le pancréas, la rate et les reins. C’est aussi beaucoup utilisé dans les atteintes musculosquelettiques, pour voir les blessures tendineuses», explique le Dr Soulez.

Le doppler recourt également à la réflexion des ultrasons pour explorer le flux sanguin, étudier les vaisseaux, les artères et les veines. «C’est un examen pour détecter les obstructions artérielles au niveau des jambes, des carotides. On s’en sert aussi au niveau du foie, pour voir les tumeurs et leur vascularisation, les caillots dans les veines [phlébites]. Il peut remplacer beaucoup d’examens angiographiques.»

L’imagerie par résonance magnétique

«La résonance magnétique, c’est le nec plus ultra!» s’exclame le Dr Soulez. Non invasive et non irradiante, l’imagerie par résonance magnétique (IRM) permet d’explorer de nombreuses pathologies et problèmes cliniques. Son principe de fonctionnement est d’exploiter les propriétés magnétiques des atomes – il faut donc éviter tout objet métallique, dont le stimulateur cardiaque. Un produit de contraste, le gadolinium, est parfois administré pour une meilleure qualité d’image. 

L’examen, qui se passe comme dans un tunnel, dure environ 30 minutes. «L’IRM est probablement le meilleur examen pour le cerveau, mais on ne le fera pas en première intention, car il coûte cher. On commencera souvent par un scanner, indique le médecin. On procède 

à une IRM pour faire un bilan de tumeur cérébrale – c’est beaucoup utilisé pour les cancers en général –, chercher les AVC subtils, repérer la sclérose en plaques, l’arthrose ou évaluer la perfusion cardiaque. C’est un très bon examen pour voir les os, la colonne [nerfs et moelle épinière], les atteintes tendineuses, les ligaments, le cartilage, ou pour faire un bilan des articulations et de traumas sportifs.»

La médecine nucléaire

En médecine nucléaire, tout examen requiert une source radioactive injectée au patient. Le délai entre l’injection et la prise d’images varie entre zéro minute et plusieurs heures, en fonction de l’organe visé et donc du produit injecté, mentionne le Dr Ciarallo. Parfois, il faut revenir le lendemain ou le surlendemain. L’examen lui-même, indolore et sans danger, dure de 15 à 30 minutes. Les effets secondaires sont rares.

En médecine nucléaire, il existe une multitude d’examens à des fins diagnostiques [pour détecter des anomalies à un stade précoce] ou thérapeutiques. La théranostique, qui combine les deux, est d’ailleurs l’avenir de la médecine nucléaire.

La scintigraphie, ou médecine nucléaire standard

Cette technique consiste en une injection par intraveineuse d’un radiotraceur – inoffensif, car faiblement radioactif – qui, une fois dans les organes à examiner, émet des rayonnements gamma. Ceux-ci seront alors captés par une caméra gamma couplée à un ordinateur afin de reconstruire une image. L’appareil reste fixe ou tourne autour du patient en position allongée. Les applications en scintigraphie sont nombreuses: bilan et surveillance du cancer, du cerveau, du cœur, de la thyroïde et des infections, fractures, embolies pulmonaires, pathologies des reins et de la vésicule biliaire.

La tomographie par émission de positons 

Cette technique permet de mesurer en trois dimensions l’activité métabolique d’un organe grâce aux émissions produites par les positons issus de la désintégration du produit radioactif injecté.

Dans environ 90 % des cas, la tomographie par émission de positons (TEP) est utilisée en oncologie. «C’est très utile pour identifier les lésions cancéreuses, rechercher les métastases, suivre la réponse au traitement et évaluer les risques de récidive, révèle le Dr Ciarallo. En médecine nucléaire, on peut voir si la tache ou l’anomalie persistante a de l’activité ou non, et déterminer si c’est un cancer résiduel, une récidive et s’il y a une progression.» La TEP permet aussi d’évaluer les troubles cognitifs, la démence et la fonction cardiaque, la perfusion du cœur.

Quant à la TEP-CT, elle combine la médecine nucléaire et le scanner: les images par TEP puis par scanner sont fusionnées pour obtenir à la fois des images anatomiques et de l’information sur l’activité métabolique des cellules, en plus d’établir le lieu exact de la captation.

La radiologie d’intervention

En pleine expansion, la radiologie d’intervention consiste à faire un examen en imagerie médicale à des fins diagnostiques et de pratiquer sur-le-champ une intervention. Selon les deux spécialistes consultés pour cet article, elle évite bien des chirurgies. Par exemple, 95 % des biopsies sont maintenant réalisées à l’aiguille, donc guidées par échographie ou scanner, pour prélever un morceau de la tumeur.

La radiologie interventionnelle permet aussi d’arrêter une hémorragie aiguë après avoir vu au scanner où se situe le saignement, de  drainer un abcès, de débloquer une obstruction au niveau des reins, des voies urinaires ou biliaires en combinant l’échographie et la fluoroscopie, ou de traiter des tumeurs par embolisation. «Une des grandes révolutions récentes dans la radiologie d’intervention, c’est pour les AVC, révèle le Dr Soulez. Maintenant, si le radiologue intervient en dedans de 10 heures, il peut aller aspirer le caillot à l’intérieur de l’artère du cerveau. Il y a donc moins de séquelles et de décès.»

Irradiation: quels sont les risques?

Ils varient en fonction de l’âge. «On fait très attention chez les enfants et les jeunes femmes au niveau du pelvis. Notre principe, c’est de faire le moins de radiations possible», déclare le Dr Gilles Soulez. «Il s’agit de petites doses de radiations, tant en radiologie qu’en médecine nucléaire, précise le DAnthony Ciarallo, mais c’est sûr que ça varie selon l’examen. Le simple fait d’être sur Terre nous expose à une radiation. À titre de comparaison, un test en médecine nucléaire équivaut à environ deux ans de vie. Comme bien des gens vivent désormais jusqu’à 90 ans, ce n’est pas très inquiétant. Mais quand on fait un examen, il faut vraiment le faire pour une bonne raison! On évalue toujours le bénéfice par rapport au risque.»

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