Tête-à-tête avec M. Cholestérol

Tête-à-tête avec M. Cholestérol

Par Chantal Tellier

Crédit photo: iStock

On vient de passer un bilan lipidique et on se demande ce que ces chiffres signifient pour notre santé? Afin de remettre nos pendules à l’heure, de maximiser nos connaissances à ce sujet et de profiter des dernières avancées de la science, on cède le micro à M. Cholestérol lui-même!

1. Comment vous décrivez-vous?

Je suis un type de graisse produit majoritairement par le foie et transporté dans le sang par de petits «coursiers» appelés lipoprotéines. Dans ce contexte, mon origine est dite endogène. Mais parce qu’on me trouve aussi dans certains aliments tels que la viande rouge et les produits laitiers, mon origine est décrite alors comme exogène.

2. Quelles sont vos fonctions et en quoi votre rôle est-il important?

J’occupe de nombreuses fonctions importantes dans l’organisme. J’aide le foie à fabriquer la bile, qui permet de digérer les aliments. Je soutiens la production de certaines hormones (y compris les hormones sexuelles) et la synthèse de la vitamine D par l’organisme. Je favorise également la production de synapses dans le cerveau. Je ne chôme pas! Cela dit, pour m’aider, il n’est pas nécessaire de consommer des aliments riches en cholestérol. Le corps humain est très doué pour fabriquer son propre cholestérol.

3. On parle de «bon cholestérol» et de «mauvais cholestérol». Pouvez-vous en dire davantage sur ces deux facettes de votre personnalité?

Je ne suis pas méchant! Mais un excès de cholestérol peut être dangereux. Je m’explique: je suis transporté dans le sang par des lipoprotéines de basse densité (LDL) et par des protéines de haute densité (HDL).

Le cholestérol LDL est souvent appelé «mauvais» parce qu’un taux trop élevé de ce cholestérol dans le sang peut obstruer les artères en entraînant la formation de plaques sur les parois. Le cholestérol HDL, celui qu’on appelle «bon», aide à éliminer l’excès de cholestérol dans le corps. Pour faire une analogie, disons que je me trouve sur un chemin et que ce dernier, c’est l’artère. Le mauvais cholestérol correspondrait aux sacs d’ordures qu’on met au chemin, et le bon cholestérol seraient les camions qui les ramassent. (Rires.)

Il ne faut pas oublier mes amis les triglycérides, des lipides conservés dans les tissus adipeux du corps. Ces lipides augmentent le risque de développer le diabète et sont associés à un faible taux de bon cholestérol sanguin (qui protège vos artères). En trop grande quantité, ils peuvent entraîner une pancréatite (inflammation du pancréas), potentiellement mortelle.

4. Comment savoir qui est présent dans notre organisme?

Au moyen d’un simple prélèvement sanguin. Le bilan lipidique détermine le taux de lipides présents dans le sang et peut aider à évaluer votre risque de développer une maladie cardiovasculaire. Alors, la meilleure chose à faire est de consulter son médecin pour s’assurer que je ne deviens pas trop envahissant!

5. Quand vous dérapez, quelles sont les conséquences sur l’organisme?

Le corps humain dispose d’un système pour se débarrasser de l’excès de cholestérol. Mais, parfois, ce système ne fonctionne pas aussi bien qu’il le devrait, ou encore il est surchargé. L’excès de cholestérol circulant dans le sang sous forme de LDL entraîne la formation de dépôts graisseux dans les artères (athérosclérose). Les vaisseaux rétrécissent et peuvent finir par se boucher. Cela peut entraîner des maladies cardiaques et des accidents vasculaires cérébraux.

6. Est-ce qu’on ressent des symptômes quand vous êtes en déséquilibre?

Non. Les gens qui souffrent d’hypercholestérolémie (un excès de cholestérol dans le sang) ne présentent aucun symptôme. C’est pourquoi il est important d’évaluer son taux de cholestérol, notamment si on coche une ou plusieurs des cases ci-dessous:

• Homme de plus de 40 ans
• Femme âgée de plus de 50 ans et/ou ménopausée
• Personne atteinte d’une maladie du cœur, de diabète ou d’hypertension artérielle
• Tour de taille supérieur à 80 cm (31,5 po) chez une femme et à 94 cm
(37 po) chez un homme.
• Personne fumeuse ou ayant arrêté de fumer au cours de la dernière année.

7. Le cholestérol peut-il nuire à une personne diabétique ou qui souffre d’autres maladies?

Oui. Les maladies cardiaques sont très fréquentes chez les personnes atteintes du diabète de type 2. Les artères qui irriguent le cœur et le cerveau se bouchent ou rétrécissent à cause des dépôts de graisse et risquent de provoquer une crise cardiaque ou un accident vasculaire.

Les personnes qui ont un taux élevé de mauvais cholestérol (LDL) dans le sang souffrent souvent aussi d’hypertension artérielle. Les veines s’endommagent à cause de ce dernier, et le sang circule y circule moins bien, augmentant la pression sur les artères. Or, ces deux problèmes de santé ne présentent aucun symptôme. Il faut donc être vigilant et faire vérifier régulièrement sa pression par un professionnel de la santé.

Un excès d’inflammation est aussi associé à des maladies cardiovasculaires. Les patients qui sont atteints de maladies inflammatoires comme la maladie de Crown, la colite ulcéreuse, le psoriasis ou la polyarthrite rhumatoïde devraient donc passer un test de dépistage pour le cholestérol.

8. Comment peut-on prendre soin de son cholestérol?

Le mode de vie joue un grand rôle dans la hausse du taux de cholestérol. Une alimentation riche en sucre et en matières grasses et un manque d’activités physiques peuvent causer une augmentation du cholestérol LDL. Si votre taux est élevé, votre médecin vous recommandera un traitement. Il pourra s’agir d’adopter une alimentation plus saine (qui se rapproche de la diète méditerranéenne), de faire de l’exercice régulièrement, d’arrêter de fumer, de contrôler votre tension artérielle, etc.

Pour certaines personnes, les changements de régime et de mode de vie ne suffisent pas.

L’hypercholestérolémie comporte souvent une composante génétique. Ceux qui en sont atteints héritent de gènes modifiés, à l’origine de cette maladie. Dans ce cas, leur médecin leur prescrira un médicament, le plus souvent des statines, qui abaisse le taux de cholestérol dans le sang en réduisant la capacité du foie à fabriquer du cholestérol. Les personnes qui ne tolèrent pas bien les statines peuvent se tourner vers les fibrates, qui peuvent diminuer le mauvais cholestérol et augmenter le bon.

9. Quelles sont les dernières percées médicales à votre sujet?

Les inhibiteurs de PCSK9 sont des médicaments apparus au cours des dernières années. Il s’agit d’un médicament injectable par voie sous-cutanée aux deux semaines, qui augmente la capacité du corps à éliminer le cholestérol. Ils conviennent aux personnes qui ne répondent pas aux traitements standards ou qui ne tolèrent pas leurs effets secondaires, dont les douleurs musculaires.

Prendre soin de son cœur

Il existe différents facteurs de risque concernant les maladies du cœur. Plus le nombre de facteurs de risque augmente, plus le risque de souffrir d’une maladie augmente. La bonne nouvelle? La plupart de ces facteurs de risque sont modifiables!

Parmi les facteurs non modifiables, on dénombre l’hérédité, l’âge et le sexe. Mais, parmi les facteurs modifiables, on compte le tabagisme, le taux anormal de gras dans le sang, le HDL trop bas, le LDL trop élevé, les triglycérides élevés, l’hypertension artérielle, le diabète, l’obésité, la sédentarité et le stress. Agissons!

Merci au Dr Paul Poirier, cardiologue à l’Institut universitaire de cardiologie et de pneumologie de Québec, et au Dr Abdelouahed Khalil, professeur à la Faculté de médecine et des sciences de la santé de l’Université de Sherbrooke, pour leur contribution à cet article.

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