Automédication: comment faire les bons choix

Automédication: comment faire les bons choix

Par Jacqueline Simoneau

Crédit photo: iStockphoto.com

Chaque année, de nombreux Québécois sont hospitalisés à la suite d’une mauvaise utilisation de médicaments en vente libre, en raison d’un surdosage, d’une interaction nocive ou d’une condition médicale particulière. Bref, ce n’est pas parce que les médicaments sont à votre portée sur les tablettes qu’ils sont inoffensifs. Au contraire. Tous les produits vendus sans ordonnance peuvent entraîner des effets indésirables, parfois même graves. Ne courez aucun risque. 

  • Lisez attentivement les recommandations du fabricant pour connaître l’usage, la posologie, le mode d’emploi, les effets secondaires et les contre-indications du produit. Respectez toutes les consignes. 
  • Ne choisissez pas vos médicaments uniquement en fonction des symptômes (maux de tête, toux, courbatures, etc.) décrits sur les emballages. Vous pourriez utiliser simultanément deux ou trois produits en apparence différents, mais qui contiennent les mêmes ingrédients actifs. C’est le cas par exemple de l’Advil Nuit et du Benadryl qui renferment tous les deux de la diphénhydramine, un antihistaminique. D’autres médicaments, dont certains décongestionnants, contiennent de l’acétaminophène. Or, en combinant des préparations ayant un ingrédient commun, vous risquez de vous retrouver en surdosage. Comparez toujours la liste des ingrédients avant d’utiliser plus d’un produit. 
  • Vérifiez auprès de votre pharmacien que la formule que vous vous apprêtez à acheter ne crée pas d’interactions indésirables avec les médicaments, prescrits ou non, que vous prenez déjà. 
  • Si vous souffrez d’une condition médicale particulière, consultez le pharmacien. Plusieurs médicaments en vente libre sont contre-indiqués en cas, notamment, de diabète, de troubles cardiaques, d’hypertension, de problèmes rénaux et d’hyperthyroïdie. 
  • Ne dépassez jamais la dose maximale suggérée. Si le médicament n’est pas efficace à ce dosage, c’est qu’il n’est pas le meilleur choix pour vous. Vérifiez auprès de votre pharmacien ou, si le mal persiste, auprès de votre médecin.
  • N’achetez jamais un médicament sur les tablettes sans connaître exactement la cause du problème. Vous risquez de sélectionner une préparation qui ne vous convient pas ou qui risquerait de masquer les symptômes d’un trouble plus important. 

Les familles de médicaments

Il existe plusieurs grandes familles de médicaments en vente libre: analgésiques, antihistaminiques, décongestionnants, etc. Chacune d’entre elles offre des formules en plusieurs formats, formes (ex: comprimé, gélule, liquide), saveurs et concentrations (ex: régulier, fort, extra-fort, à action prolongée), ce qui complique drôlement les choses lorsque vient le temps de choisir. En général, la forme du médicament est souvent une affaire de goût personnel. Par exemple, certaines personnes trouvent les gélules plus faciles à avaler que les comprimés.

Quant à la mention «extra-fort», elle signifie que la concentration est doublée dans le comprimé. Mais parce que le maximum qu’on peut prendre par jour est alors réduit de moitié, on ne prend pas véritablement un médicament «plus fort». 

Les médicaments à action prolongée (une ou deux doses par jour) sont pratiques, mais ils ne sont pas nécessairement plus efficaces que ceux dits à action courte. 

Pour le reste, chaque famille possède ses propres caractéristiques qu’il convient de connaître. Voici quelques infos utiles sur quatre grandes classes de médicaments en vente libre. 

Les analgésiques

Ils servent à soulager la douleur et à combattre la fièvre. Il existe trois principaux types d’analgésiques en vente libre: l’acétaminophène (ex: Tylenol), l’ibuprofène (ex: Advil, Motrin) et l’AAS (Aspirin). 

Parce qu’il entraîne peu d’effets secondaires, l’acétaminophène est le plus sécuritaire, à la condition bien sûr qu’on respecte la posologie recommandée. Il devrait donc être votre premier choix pour traiter la fièvre et la douleur sans inflammation, comme le mal de tête. À éviter toutefois si vous avez des problèmes importants au foie. 

Par contre, si vous souffrez d’une inflammation (tendinite, arthrite, maux de dents, douleurs musculaires, etc.), l’ibuprofène et l’AAS sont plus indiqués en raison de leurs propriétés anti-inflammatoires. Le hic: ils interagissent avec plusieurs médicaments et irritent l’estomac. De plus, l’AAS éclaircit le sang et, pour obtenir un effet anti-inflammatoire, il faut en prendre des doses élevées qui sont très mal tolérées. N’en consommez jamais sans avoir préalablement consulté votre pharmacien ou votre médecin. 

Les analgésiques topiques en gel ou en crème (ex: Myoflex) peuvent soulager la douleur localement. Précaution: n’appliquez pas de chaleur immédiatement après l’utilisation d’une crème analgésique. Vous risquez de vous brûler la peau, puisque le produit amplifie la réaction de chaleur. Aussi, ne prenez pas en plus un analgésique en comprimé si vous ne voulez pas être en surdosage, à moins d’avis contraire de votre médecin. 

Les antihistaminiques

Ils traitent les symptômes liés aux allergies et aux démangeaisons. Il existe deux générations d’antihistaminiques:  le groupe A (première génération) et le groupe B (nouvelle génération). Ceux du groupe B (ex: Reactine, Claritin, Aerius, Allegra) causent plus rarement de la somnolence que ceux du groupe A. Ils peuvent être utilisés sur une base régulière et à long terme, durant toute la saison des allergies saisonnières par exemple. 

Les antihistaminiques du groupe A (ex: Benadryl) agissent rapidement. Ils sont donc tout indiqués pour le traitement des réactions allergiques aiguës. En revanche, ils ne conviennent pas à une utilisation régulière en raison de leurs effets secondaires (somnolence, sécheresse buccale) et de leur courte durée d’action. 

Bon à savoir: plusieurs de ces préparations renferment un ingrédient décongestionnant. Celles-ci ne doivent donc pas être combinées à un autre décongestionnant. Sachez aussi que les antihistaminiques sont plus efficaces si on les prend au moins une heure avant d’être exposé à l’allergène (un chat, par exemple). 

Les médicaments contre le rhume et la grippe

Dans ce créneau, les produits tout-en-un abondent. Par conséquent, méfiez-vous des appellations générales du genre «contre le rhume ou la grippe». On les appose sur des formules renfermant plusieurs ingrédients actifs qui risquent de provoquer des surdosages, avec tous les dangers que cela implique, s’ils sont combinés à d’autres médicaments, comme un antidouleur (plusieurs contiennent de l’acétaminophène), un décongestionnant ou un sirop. 

Notez aussi qu’il existe beaucoup d’interactions médicamenteuses avec les produits «contre le rhume et la grippe», les décongestionnants et les sirops. De plus, certaines préparations provoquent de la somnolence ou, au contraire, de la surexcitation et de l’insomnie. Plus on vieillit, plus il faut être vigilant. 

Par ailleurs, sachez que les antitussifs calment la toux sèche, tandis que les expectorants éliminent les sécrétions de la toux grasse. Mais parce qu’ils peuvent causer de la somnolence et être mal tolérés, mieux vaut ne les utiliser que pour une très courte période, et seulement si nécessaire. 

Quant aux décongestionnants en vaporisateur (ex: Otrivin, Dristan), ne les utilisez jamais plus de 3 à 5 jours. C’est que, après ce laps de temps, ils risquent de causer un effet rebond: quand vous arrêterez d’en prendre, la congestion reviendra; vous serez alors tenté de recommencer, ce qui peut mener à une certaine dépendance. 

Les décongestionnants en comprimés (ex: Dimetapp, Tylenol Sinus, Drixoral) mettent parfois plus de temps à agir, mais l’effet dure plus longtemps. Ils peuvent toutefois être en cause dans des interactions médicamenteuses. Par prudence, demandez l’avis de votre pharmacien avant de les consommer. 

Les antiacides

Ils contrôlent l’acidité et les reflux gastriques responsables des brûlures à l’estomac ou à l’oesophage. Les antiacides sont vendus sous forme liquide ou en comprimés à croquer. Il existe deux grandes familles d’antiacides: les neutralisants (ex: Tums, Rolaids, Diovol, Gaviscon) et les antagonistes- H2 (ex: Pepcid, Zantac). 

Les premiers diminuent ou neutralisent temporairement l’acidité gastrique. Ils agissent vite, mais pas longtemps. Les seconds réduisent la production d’acide. Ils offrent donc un soulagement beaucoup plus durable, mais pas immédiat. Ils font effet environ une heure après la prise du produit. 

Cela dit, consommer des antiacides en vente libre sur une base régulière, sans en parler à un professionnel de la santé, n’est pas recommandé. De tels produits peuvent nuire à l’absorption d’autres médicaments. Certaines formules neutralisantes peuvent également entraîner une «acidité rebond», c’est-à-dire des symptômes de brûlure plus intenses qu’avant la prise du produit, parce qu’elles poussent l’estomac à fabriquer encore plus d’acide gastrique. Sans compter que la surconsommation d’antiacides peut camoufler un problème médical plus grave, comme des ulcères à l’estomac ou un malaise cardiaque. 

C’est pourquoi il est important de consulter si les symptômes persistent. Enfin, à l’instar des produits contre le rhume ou la grippe, les antiacides liquide ou en comprimés peuvent contenir les mêmes ingrédients. Choisissez un seul produit. Et rappelez-vous que les comprimés extra-forts sont plus concentrés, mais qu’ils n’agissent pas nécessairement davantage que les comprimés réguliers. C’est plutôt le dosage qui diffère. 

Merci à Georges-Émile Bourgault, pharmacien, pour sa précieuse collaboration. 


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