Trois ans se sont écoulés depuis que Michel est séparé. «Même si cela fait un moment, pour moi, c’est encore très difficile. Aujourd’hui encore, je pourrais en parler pendant des heures», confie-t-il. Michel a vécu en couple pendant près de 10 ans avec Christine. Il fait partie de ces hommes qui ont succombé aux charmes d’une autre. «J’ai été infidèle à ma conjointe. Je savais que ce n’était pas bien, mais je ne pouvais m’en empêcher. La première fois, elle m’a pardonné mon écart de conduite. Je ne pourrais expliquer pourquoi, mais j’ai recommencé… Je le regrette parce que j’ai perdu celle que j’aimais. Maintenant, je dois vivre avec les conséquences…», raconte Michel. Des histoires comme celle-là, il y en a des milliers. Il semble que beaucoup de ménages se brisent à cause de l’irrésistible envie de voir si ailleurs, le bonheur goûte meilleur…
Les raisons
Mais qu’est-ce qui peut bien pousser un homme ou une femme dans les bras d’une autre personne que sa tendre moitié? Les explications sont nombreuses et différentes pour chacun. L’auteur Aldo Naouri s’est penché sur la question et a tenté d’y voir clair dans son ouvrage intitulé Adultère (Odile Jacob Édition). Il explique d’abord qu’on exige de son partenaire qu’il nous aide à vivre, en lui apportant – sous forme d’attention, de prévenance, de tendresse et de satisfaction sexuelle – la conviction qu’il occupe une place importante dans notre vie. «Si, ayant insisté pour réclamer ce que je considère comme m’étant dû, je ne vois rien venir, je suis malheureux et mon état peut aller en s’aggravant. À ce moment précis, si je croise une personne qui peut m’apporter ce dont je manque, il est possible que je franchisse le pas», explique M. Naouri. L’auteur affirme que, si notre éducation nous a rendus très sensibles au manque, nous commettrons une faute très vite, sans même nous demander pourquoi notre partenaire n’a pas répondu à notre besoin. En revanche, si nous avons été éduqués de manière à supporter la carence sans nous sentir menacés, nous aurons l’attitude inverse. «Non seulement je supporterai la privation et ne me laisserai pas aller à la compenser en ayant recours à un tiers, mais je vais dépasser ce manque et m’inquiéter de la souffrance éventuelle de l’autre», termine-t-il.
Une affaire exclusivement masculine?
Une affaire exclusivement masculine?
L’infidélité est asexuée, car autant les hommes que les femmes peuvent ressentir l’envie de butiner ailleurs. Aldo Naouri a par contre constaté que les statistiques indiquent peut-être une plus grande fréquence de l’adultère masculin. On peut se demander si les femmes ne sont pas plus discrètes en la matière… L’histoire de Danielle en fait la preuve. «J’ai été en couple pendant longtemps avec un conjoint que je savais volage. Un jour, il m’a tout avoué en demandant qu’on recommence à zéro. Mais la peur qu’il me fasse encore mal était constamment présente… Chaque fois qu’un homme me montrait de l’intérêt, je ne pouvais m’empêcher de penser que mon conjoint aurait certainement sauté sur l’occasion, en étant approché de la sorte par une femme. J’avais l’impression d’avoir un passe-droit parce que lui m’avait déjà trahie. Un jour, mon partenaire a recommencé à me négliger et je me suis donné la permission de le tromper. Étrangement, je n’ai pas eu de sentiment de culpabilité. Je pensais que je ne serais pas capable de vivre avec un mensonge. Sur le moment, c’est comme si je n’avais rien fait. Mais j’ai compris que si j’en étais rendue là, c’est que ça ne marchait plus vraiment entre nous. Je pense que notre relation était finie depuis un certain temps», confie-t-elle.
Ménage à trois
L’adultère ne peut avoir lieu si le fautif ne trouve personne pour sauter la barrière… «Quand j’avais une vingtaine d’années, j’ai eu une relation avec un homme marié qui était mon patron. Il avait dans les 50 ans. Nous nous sommes fréquentés pendant environ un an. Notre aventure a commencé lors d’un congrès. Je l’admirais beaucoup, il avait de l’expérience et sa notoriété m’a charmée. Je me sentais protégée et en sécurité avec lui. Il me disait constamment qu’il laisserait sa femme au moment opportun», raconte Louise.
Ce visage de l’adultère n’est pas plus rose puisque la troisième personne en cause est aussi victime de la situation. Et, disons-le, se cacher pour vivre un amour interdit n’est pas facile à tout moment. «Avoir une relation extraconjugale avec un collègue de travail peut devenir dangereux. Particulièrement si on n’occupe pas le même échelon hiérarchique», affirme Alain Samson, conférencier et auteur de Sexe et flirt au bureau, publié dans la collection SOS Boulot. «On doit faire attention au bouleversement des rapports de force à l’intérieur de l’organisation. Même nos collègues pourraient se sentir désavantagés par peur que nous ayons accès à des informations privilégiées.» Après une année de fréquentation, Louise a finalement mis un terme à son rôle de maîtresse. «Dans les premiers temps, il l’a mal pris, m’envoyant même des courriels pour me transférer, mais je suis restée à mon poste. Si c’était à refaire, je n’attendrais pas aussi longtemps qu’il laisse sa femme», dit-elle.
Le goût de la jeunesse
Le goût de la jeunesse
Le démon du midi arrive vers 40 ou 50 ans, d’où la comparaison avec la moitié de la journée, la moitié de la vie. Il y a plusieurs raisons qui expliquent pourquoi le diable qui sommeillait tranquillement a soudain le goût de bondir. Selon Lise Marcotte, psychologue et psychothérapeute individuelle et conjugale, c’est là que l’individu réalise qu’il n’est pas éternel. «C’est la peur de vieillir qui incite à fuir et se prouver qu’on est encore bien vivant, séduisant et attirant. Alors, on tombe dans l’adultère. Avoir devant soi un visage sans rides, nous fait oublier que le nôtre en a. C’est en quelque sorte un lifting psychologique. Chez les hommes, ça prend des allures génitales. Être nu, à côté d’une jeune femme nue, donne encore plus l’impression d’une renaissance de la virilité.»
Carmen ,mariée pendant plus de 25 ans, a vu son mari partir avec une plus jeune. «Après autant d’années passées ensemble, nous nous étions éloignés. Nous avions des relations sexuelles pour combler un besoin du corps seulement. Un jour, il m’a avoué avoir une aventure. À 45 ans, je me suis sentie comme une ‘vieille sacoche’, laissée pour un modèle plus jeune. Sa nouvelle flamme n’avait que 28 ans. Après notre rupture, j’avais peur de la solitude…» Quand une relation se termine, il faut capitaliser sur tout le reste. On doit s’obliger à penser aux choses positives qui nous entourent et recommencer à entreprendre les activités que nous aimions. Il est aussi important de prendre conscience que nous ne sommes pas seuls. La famille, les enfants et les amis sont toujours là pour nous aider à avancer.
Lise Marcotte, qui est également sexologue, tient à ajouter ceci: «À l’heure du midi, le démon ne sonne pas à la porte de toutes les maisons. Il va voir les couples les moins solides. Comme le loup dans Les trois petits cochons; il a beau souffler sur les maisons de briques, leurs fortifications tiennent bon, contrairement aux habitations de paille ou de bois qui ne résistent pas au vent vigoureux. À l’heure du midi, du souper ou dans la soirée, il y a de nombreuses chaumières sans démon!»
Une solution moderne
Une solution moderne
Puisque la plupart des couples, à un moment ou à un autre, seront victimes de l’adultère, la clé de la réussite peut-elle résider ailleurs que dans l’exclusivité? Dans son livre Aimer plusieurs hommes (Pocket), Françoise Simpère explique le cheminement qui l’a amenée, avec son époux des 33 dernières années, à peaufiner ce modèle bien différent des normes actuelles. Pour Mme Simpère, il ne s’agit pas d’infidélité, mais plutôt des «fidélités plurielles», puisqu’ils (son mari et elle) continuent de rencontrer d’autres amours. «C’est une façon de vivre écologique. C’est vrai, partout, on prône la diversité. On doit diversifier les énergies, les cultures, les plantes et les animaux, avoir et aimer plusieurs enfants, etc. Pour moi, la biodiversité amoureuse enrichit la vie tandis que la monogamie la dessèche, comme la monoculture stérilise les sols», argumente Mme Simpère.
On imagine aisément que cela n’a pas toujours été de tout repos. Au début, quand on commence à vivre ce type de partage, n’a-t-on pas l’impression d’être infidèle? «Mon mari a été étonné que je mette en pratique ce dont nous avions discuté, alors que dans sa tête, cela restait théorique. C’est pourquoi nous avons placé des repères au fil des années. L’avantage est qu’il n’y a pas de routine dans ce genre de relation, on évolue en permanence. Il y a eu parfois des rapports de force, des moments difficiles», se rappelle l’auteure. Lorsqu’on choisit une manière de vivre en couple si différente, est-ce qu’on a tout de même des choses essentielles à respecter? «On doit être présent quand l’autre en a besoin, et comprendre qu’une vie comporte toujours des hauts et des bas, que c’est idiot de se quitter au moindre problème. Enfin, savoir qu’on peut ‘aller ailleurs’ si on le souhaite fait qu’on ne le fait que si on en a envie, pas par transgression, pas par ennui, pas pour se venger de quoi que ce soit. Pour ma part, je ne me suis jamais demandé si j’allais refaire ma vie avec un de ‘mes hommes’, car chacun faisait partie de ma vie. Il n’y avait pas opposition entre mon mari et eux. Je vis avec chacun des choses tout à fait différentes. Le seul que je supporte au quotidien est le père de mes filles!», conclut celle qui a publié récemment Autres désirs, autres hommes (Pocket), un recueil de nouvelles érotiques.
Mise à jour: avril 2008
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