Les acouphènes sont un problème de santé sérieux, mais plus fréquent qu’on pourrait le croire. Le tour de la situation en 10 questions.
1 Qu’est-ce qu’un acouphène?
C’est la perception auditive d’un son qui ne provient pas d’une source extérieure: on l’entend, mais pas les gens autour de nous.
2 Comment se manifeste-t-il?
L’acouphène prend différentes formes: sifflement, bourdonnement, tintement, grésillement, bruissement, chuintement, cliquetis, bruit d’eau, vrombissement, pulsation, stridulation, etc. «Le son peut être perçu dans une oreille ou les deux, mais aussi dans la tête, indique l’audiologiste Marie-Michelle Lavoie. Fort ou faible, grave ou aigu, intermittent ou continu, il apparaît brusquement à la suite d’un traumatisme sonore (une déflagration, par exemple) ou de façon progressive.» Environ 10 à 15 % des adultes atteints souffrent d’acouphène chronique.
3 Y en a-t-il plusieurs types?
On classe les acouphènes en deux catégories: les subjectifs et les objectifs. Les acouphènes subjectifs (95 % des cas) résultent d’une anomalie du système nerveux auditif et le son n’est audible que par la personne affectée. À l’inverse, les acouphènes objectifs correspondent à un bruit réel, créé par un trouble physiologique. Ils peuvent donc généralement être perçus par une autre personne, par exemple un médecin lors de l’examen auditif.
4 Quelles en sont les causes?
L’acouphène n’est pas une maladie, mais un symptôme pouvant résulter de divers problèmes. L’acouphène objectif provient, dans la plupart des cas, de contractions musculaires anormales dans la région de l’oreille ou d’un problème vasculaire induit entre autres par l’hypertension, l’athérosclérose ou une tumeur. Une cause identifiable et traitable, donc. Cibler l’origine d’un acouphène subjectif est plus difficile. Selon Marie-Michelle Lavoie, il découle le plus souvent d’une perte d’audition attribuable au vieillissement. La prévalence augmente donc avec l’âge.
Mais plusieurs autres raisons – on en répertorie plus de 300! – peuvent expliquer ce phénomène: bouchon de cérumen, traumatisme crânien, blessure au cou, maladies (otosclérose, cholestéatome, maladie de Ménière, etc.), prise de certains médicaments, mauvais alignement de la mâchoire, problème dentaire, traumatisme auditif (détonation d’une carabine ou d’un pétard près de l’oreille), etc.
Certaines personnes développent aussi un acouphène à la suite d’une exposition répétée et prolongée à des bruits puissants (amateurs de concerts et de musique forte, chasseurs, ouvriers de la construction, travailleurs en usine, mécaniciens, camionneurs, musiciens, etc.).
5 Les acouphènes peuvent-ils s’aggraver?
La consommation excessive de caféine, de tabac et d’alcool, les drogues, le stress, l’anxiété, la fatigue, l’inactivité physique et la mauvaise posture constituent autant de facteurs de risque ayant un impact non négligeable sur les acouphènes.
6 Quelles sont les conséquences de ce problème?
Les acouphènes ne sont pas dangereux pour la santé. Dans environ 80 % des cas, les gens n’éprouvent d’ailleurs que de légers désagréments. Mais pour les autres 20 %, leurs effets s’avèrent parfois très dérangeants, au point d’affecter les relations personnelles, sociales et professionnelles. Les personnes touchées peuvent souffrir, entre autres, de troubles du sommeil, d’irritabilité, de problèmes de concentration, de difficulté à relaxer, de colère et d’anxiété. Dans les cas extrêmes, certains concentrent toute leur attention sur le bruit, au point d’en faire une obsession, alors que d’autres deviennent dépressifs. D’où l’importance de ne pas prendre les acouphènes à la légère.
7 L’intensité de l’acouphène augmente-t-elle l’inconfort?
«Le dérangement causé par l’acouphène n’est pas nécessairement lié à son intensité, mais plutôt à la perception qu’on a du bruit en question, répond Marie-Michelle Lavoie. L’attitude et les émotions ressenties à l’égard de l’acouphène comptent pour beaucoup dans l’impact qu’il génère. C’est pourquoi une personne avec un léger acouphène peut se trouver plus incommodée qu’une autre dont l’acouphène est plus important.»
8 Quand et qui devrait-on consulter?
Marie-Michelle Lavoie recommande de consulter un professionnel de la santé dès l’apparition d’un acouphène. On commence par notre médecin de famille, afin de s’assurer que ce symptôme ne cache pas un autre problème d’ordre médical. Dans le cas contraire, il nous référera à un audiologiste. L’examen audiologique permet de savoir si l’acouphène est associé à une perte d’audition, la cause la plus fréquente, ou à un autre trouble de l’oreille. Au besoin, on nous référera à un autre spécialiste. On gagne aussi à consulter notre dentiste pour s’assurer que l’acouphène ne résulte pas d’un problème dentaire ou de la mâchoire.
9 Quels sont les traitements offerts?
Parfois, il est possible de réduire considérablement les acouphènes, voire de les éliminer, en écartant la cause sous-jacente (maladie, bouchon de cérumen, médicament, etc.). Mais dans la majorité des cas, il n’existe aucun traitement spécifique. En revanche, certaines approches – dont la thérapie par le son, qui consiste à éviter le silence – en minimisent les désagréments.
«On peut comparer l’acouphène à une chandelle, explique Marie-Michelle Lavoie. Si on place une chandelle dans une pièce sombre, toute notre attention se focalisera sur elle. Mais si on éclaire la pièce, la focalisation sera différentes. C’est pourquoi ajouter un bruit ambiant (télé, radio, fontaine, ventilateur, appareil auditif générateur de sons, etc.) aide à masquer l’acouphène et à détourner l’attention de ces bruits parasites. Dans le cas d’une personne malentendante, le port d’une prothèse auditive permettra de mieux entendre les sons environnants et, par conséquent, de couvrir l’acouphène.»
Autre solution: la thérapie cognitivocomportementale, la seule à avoir été scientifiquement reconnue efficace pour la gestion des acouphènes, selon l’organisme Acouphènes Québec. Cette thérapie vise à modifier les croyances et les pensées négatives, à réduire les désagréments et à diminuer l’anxiété afin d’améliorer la qualité de vie des personnes souffrant d’acouphènes.
Il existe aussi plusieurs approches complémentaires, incluant le biofeedback, l’hypnothérapie et l’acupuncture. Bien que leurs effets ne soient pas prouvés scientifiquement, elles peuvent se révéler bénéfiques pour améliorer le seuil de tolérance et procurer un soulagement de certains symptômes, dont le stress.
10 Comment prévenir l’acouphène?
La meilleure prévention consiste à adopter de saines habitudes. Ainsi, on évite de s’exposer fréquemment et de façon prolongée à des volumes élevés, entre autres lorsqu’on porte un appareil muni d’écouteurs. On baisse le volume de la télé et de la radio. On porte des bouchons ou des coquilles protectrices durant un concert rock ou lorsqu’on utilise des outils ou des appareils bruyants, au travail comme à la maison. On vérifie auprès de notre pharmacien les effets secondaires de nos médicaments, de même que les interactions entre eux. On surveille notre état de santé et notre posture. Et enfin, on n’utilise jamais de coton-tige pour nettoyer nos oreilles!