Ménopause, andropause et libido

Ménopause, andropause et libido

Par Marie-Claude Fortin

Crédit photo: iStockphoto.com

Ménopause et andropause sonnent-elles nécessairement le glas de l’activité sexuelle? «Pas si sûr, dit Manon Leclerc, sexologue, membre de l’Association des sexologues du Québec. Les hormones ont bon dos!» Ainsi, outre les problèmes physiologiques réels liés aux bouleversements hormonaux (comme la sécheresse vaginale, que l’on règle en utilisant un lubrifiant), ce qu’elle constate souvent, dans sa pratique, «c’est que la ménopause peut être une excuse pour celle qui n’a pas trop le goût de faire l’amour… Pourtant, remarque-t-elle, je vois des femmes qui juraient n’avoir plus de désir, et qui, la soixantaine venue, font la rencontre d’un nouveau partenaire. Et hop !, comme par magie, la libido revient.» C’est dire à quel point il est difficile de faire la part des choses, quand il est question de sexualité. Physiologie et psychologie sont inextricablement liées.

Ce qu’il ne faut pas perdre de vue, c’est que la diminution de la libido, la panne momentanée de désir, l’intérêt pour la sexualité et tous les modes de séduction qui s’émoussent, sont des choses normales, quand on vieillit. Mais rien (sauf bien entendu un problème physique précis que votre médecin aura diagnostiqué) ne justifie l’arrêt complet de toute activité sexuelle. «On peut être sexuellement actif toute sa vie, affirme même Manon Leclerc. Mais on a du mal à concevoir que des corps dans la soixantaine peuvent être érotiques. Dans ce domaine, il y a beaucoup à faire pour changer les mentalités.»

Une image vaut mille maux

Car il ne faut pas se leurrer, si nous vivons dans une société où la sexualité est omniprésente et affichée partout – à la télé, au cinéma, dans la publicité –, elle est toujours systématiquement associée à la jeunesse et à la beauté. Quand ils arrivent à la cinquantaine, et que leur corps a perdu de son tonus, trop de gens ont tendance à se mettre eux-mêmes sur la touche. Et pour Yvon Dallaire, psychologue, thérapeute conjugal et sexologue, c’est vraiment dommage.

«De nombreuses recherches scientifiques démontrent que les gens qui ont une vie sexuelle active vivent plus longtemps, en meilleure santé et plus heureux!», soutient-il. Si les couples en arrivent à abandonner la partie, souligne l’auteur de Pour que le sexe ne meure pas et de Qui sont ces couples heureux ? (tous deux publiés chez Option Santé), c’est souvent par ignorance, par méconnaissance du fonctionnement sexuel de l’autre et des conséquences des changements de notre propre corps.

Et si l’on acceptait, tout simplement, que notre corps a changé? Qu’il est tout à fait normal que l’homme n’ait plus les érections qu’il avait à 20 ans? Que la femme n’ait plus les mêmes pulsions de désir? «Quand on vieillit, remarque Yvon Dallaire, on n’a plus la même forme physique. On sait qu’il faut faire de l’exercice, pour se garder en forme, et on le fait. C’est la même chose pour la sexualité. On peut continuer à vivre une sexualité tout à fait satisfaisante, si l’on y met un peu d’effort.»

Quand le désir diminue

Parmi les problèmes que rencontrent les couples dans la cinquantaine, il y a d’importants facteurs émotionnels. «Quand le désir diminue, les hommes et les femmes ne réagissent pas de la même manière, explique Nicole Desjardins, sexologue et thérapeute conjugale et familiale. Les femmes qui vivent une panne de désir vont ressentir de la culpabilité par rapport à leur conjoint. Quant aux hommes, ils peuvent ressentir une grande détresse, car c’est toute leur identité qu’ils croient remise en question. Ils ont l’impression qu’ils ne sont plus de vrais hommes; à partir de ce moment, c’est l’œuf et la poule. Plus ils sont préoccupés par leur érection, pire c’est. Alors que parfois, c’est tout simplement la fatigue qui entre en jeu, ou le stress, un épisode dépressif…»

Comment briser le cercle vicieux? «En dédramatisant, insiste Nicole Desjardins. Il ne faut surtout pas paniquer et ne pas tomber dans le piège de l’évitement. Car moins on se touche, plus on augmente l’anxiété. Il faut en parler, mais savoir comment en parler. Si l’un des deux se sent lésé et se met à multiplier les reproches, les choses vont aller en s’empirant. Au lieu de blâmer, il faut chercher à comprendre. Car celui qui perd son désir souffre autant de voir son conjoint souffrir. On doit reconnaître la souffrance des deux partenaires. C’est ensemble que l’on peut régler le problème.»

Pour raviver la flamme

Les sexologues disposent d’une panoplie de moyens pour raviver la flamme. Outre l’hormonothérapie, la prise de testostérone ou le Viagra qui, «s’il aide à garder une érection, ne suscite pas le désir», rappelle Nicole Desjardins, bien des moyens à la portée de tous peuvent améliorer la qualité de la vie sexuelle d’un couple. À commencer par sortir de la routine, cette vieille ennemie de la libido! «Pourquoi ne pas prendre des vacances ensemble?, suggère Yvon Dallaire. Et pas qu’une semaine. Deux ou trois, si possible. En vacances, on se sent loin de ses soucis, des problèmes des enfants, du bureau… Il est beaucoup plus facile de retrouver sa spontanéité. On peut aussi prendre des vacances chacun de son côté, ajoute-t-il. Quand on se retrouve, le désir revient.»

Yvon Dallaire propose aussi d’adopter ce qu’il appelle l’alternance des pouvoirs, une méthode éprouvée. Pendant une semaine, l’un des deux partenaires prend les rênes, décide où, quand, comment ils feront (ou pas) l’amour. Et pendant une semaine, l’autre devra se soumettre au jeu. Évidemment, il ne s’agit pas d’imposer à l’autre des pratiques qu’il réprouve. Bon sens et bonne volonté doivent être au rendez-vous. «Il ne faut pas oublier que le plaisir sexuel a trois dimensions, rappelle Yvon Dallaire. Donner, recevoir et prendre. Or, les hommes ont souvent des difficultés à recevoir et les femmes, elles, ont du mal à prendre. Mais si l’on s’abandonne vraiment, si l’on accepte de se laisser faire et de se mettre sur un mode réceptif, les résultats peuvent être étonnants.»

Ménopause: l’avis d’une spécialiste

La Dre Michèle Moreau travaille auprès d’une clientèle féminine depuis 25 ans. «On ne peut nier que la ménopause influe de façon importante sur la libido, soutient-elle. En l’espace de quelques mois, les femmes perdent leurs hormones sexuelles. La carence en œstrogène cause de la fatigue, des bouffées de chaleur, de l’insomnie, une instabilité de caractère. Plusieurs femmes souffriront de sécheresse vaginale. La composante psychologique est aussi importante: leur corps change. L’image que la femme a d’elle-même en souffre. On sait que pour s’imaginer plaire à quelqu’un, il faut s’aimer soi-même. Je constate qu’en général, chez l’homme et chez la femme, il y a une baisse graduelle de désir et de fréquence du désir, avec l’âge et avec le temps. On dit même que ce qui laisse le plus présager de la baisse de libido, c’est la durée de la relation, pas l’âge! Quand on est en couple depuis longtemps, il ne faut pas attendre que la pulsion vienne d’elle-même, comme au début de la relation. Il faut se motiver. Et la motivation, ça peut être simplement le désir de plaire à son conjoint. Une fois que l’on arrive à se laisser aller, la relation devient agréable.»

Les ennemis du désir!

Romance d’anticipation

«Prévoir suscite l’attente», écrit Esther Perel dans L’Intelligence érotique (Robert Laffont). Quand vous planifiez une rencontre avec votre conjoint, dans un restaurant ou un bar, essayez d’imaginer tous les détails: les vêtements que vous porterez, votre parfum, votre coiffure… Imaginez à l’avance ce que vous ferez ou direz à votre partenaire. Comme le souligne Esther Perel : «L’attente contribue à construire une intrigue: les romans d’amour et les soaps ne sont faits que de ça.»

Les ennemis du désir

Hormis les aspects psychologiques, plusieurs facteurs peuvent avoir un effet négatif sur la libido. Parmi ceux-ci, l’arthrite et les rhumatismes, qui peuvent rendre l’acte douloureux. Les troubles cardiaques, la haute pression, le diabète peuvent aussi nuire à votre vie sexuelle. Certains médicaments ont des effets secondaires négatifs. Gare aussi à l’alcool! À long terme, nous assure Yvon Dallaire, l’alcool «accélère la baisse de production de testostérone». Quant au tabac, dit encore Yvon Dallaire, 80% des hommes impuissants seraient des fumeurs.

Les vertus des bulles

Le bain de mousse parfumée est un classique. Pourquoi ne pas prendre un bain à deux, à la lueur des chandelles, avec une musique douce? Si votre baignoire est petite, adoptez ce qu’Yvon Dallaire appelle «la position du bobsleigh». Avec une flûte de champagne, romantisme assuré.

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