On n’éprouve plus le grand frisson comme autrefois? Une chercheuse en sexologie nous montre la voie vers une sexualité différente, mais tout aussi excitante.
En plus d’être une expérience physique intense qui culmine après une série de stimulations plaisantes, l’orgasme est aussi décrit par plusieurs comme un marqueur de confiance et d’intimité dans une relation saine. Il est également communément reconnu comme le sceau garant du plaisir, avec soi-même ou partagé avec l’autre.
Selon la littérature scientifique, l’orgasme se fait cependant de plus en plus discret avec l’âge. Et nous pousse à croire que notre sexualité s’effrite et qu’on doit fermer boutique. Heureusement, ça ne veut surtout pas dire qu’il nous faut renoncer au plaisir!
Une sexualité différente
L’atteinte de l’orgasme peut devenir plus difficile pour différentes raisons: baisse de désir, lubrification moins abondante, contractions musculaires au niveau du périnée moins puissantes, intervention chirurgicale au niveau de la prostate, anxiété de performance, stress, dépression, médicaments, maladies ou changements relationnels importants. Il est donc normal d’avoir l’impression de ne plus être totalement aux commandes de notre corps qui n’en fait qu’à sa tête, et ce, en dépit de nos envies. Et tandis que notre corps devient plus capricieux, notre cerveau continue de croire que la sexualité doit se manifester d’une certaine façon, incluant presque toujours une pénétration suivie d’un orgasme.
D’autant plus qu’on associe également la sexualité à la vigueur, à la puissance et, par conséquent, à la jeunesse, ce qui peut inciter à négliger la possibilité d’éprouver du désir, du plaisir et d’avoir une vie sexuelle active passé le cap de la cinquantaine. Si on ne répond plus à cet impératif de jeunesse, on peut ressentir une pression d’abandonner toute vie sexuelle ou encore de chercher à préserver notre fougue à tout prix en utilisant des médicaments (comme la fameuse pilule bleue) ou en pratiquant assidûment des exercices pour renforcer notre plancher pelvien. Bien que ces moyens soient bénéfiques pour plusieurs, ils peuvent aussi contribuer à invalider une sexualité qui n’est pas maintenue à sa puissance maximale.
Se faire plaisir plutôt que jouir
La recherche de plaisir est l’une des principales motivations à atteindre l’orgasme. Cela dit, le plaisir sexuel ne se limite pas à ce seul objectif, pas plus qu’à la pénétration ou à la vigueur des ébats. L’Association mondiale pour la santé sexuelle (WAS) définit d’ailleurs le plaisir sexuel comme l’éventail de sensations comprenant la jouissance et la satisfaction, tant physiques qu’émotionnelles, liées à des expériences sexuelles solitaires ou partagées. L’expérience du plaisir concerne donc autant le corps que les émotions et les pensées, comme nos désirs ou nos fantasmes.
On peut donc éprouver du plaisir de multiples façons. En atteignant l’orgasme, certes, mais aussi en cultivant une connexion avec le partenaire, en partageant une intimité et de la tendresse lors de touchers physiques, par exemple. En fait, la manière dont on expérimente le plaisir a un réel impact sur notre satisfaction sexuelle. Et si on considère l’orgasme comme seul indicateur de plaisir, son absence peut s’avérer assez dévastatrice quant à notre satisfaction sexuelle. Par contre, si on tient compte et valorise d’autres sensations et de sentiments tout aussi jouissifs, on s’ouvre à bien plus de sources de satisfaction.
Se réapproprier ses orgasmes
Améliorer ou retrouver sa fonction orgasmique après 50, 60 ou 70 ans, est-ce possible? Si on se fie aux études à ce sujet, la réponse est oui! D’abord, en prenant son temps. Prolonger les touchers sexuels, aussi appelés préliminaires – caresses, stimulations, baisers sur différentes parties du corps (bref, tout sauf une pénétration vaginale ou anale) – permet d’atteindre l’orgasme plus facilement et de mieux apprécier les activités sexuelles en général. Mais attention, ces touchers ne devraient pas se limiter à «préparer le corps» pour une pénétration. Ce sont des activités sexuelles à part entière, dont on peut mieux profiter en leur accordant plus de temps.
La multiplication des manières de se faire plaisir peut aussi mener à l’extase. Ainsi, des études menées auprès de personnes de 50 ans et plus nous disent que l’ajout ou la prolongation des caresses et d’autres manifestations de tendresse, comme des baisers langoureux ou des massages sensuels, contribuent à améliorer la satisfaction sexuelle. Ces gestes sont associés à une meilleure lubrification et à l’atteinte d’orgasmes. De même, accorder plus de temps à la pénétration ainsi qu’aux attentions et aux caresses après un rapport sexuel sont autant de bonnes habitudes associées à une plus grande satisfaction sexuelle.
Avouons que faire durer le plaisir plus longtemps est plutôt une agréable option, non? Avancer en âge vient avec des changements dans la manière de vivre sa sexualité, mais ceux-ci comportent peut-être des avantages insoupçonnés. Et si on les considérait comme des portes ouvertes vers une sexualité différente, mais tout aussi plaisante et excitante?
Le fossé orgasmique
Le fossé orgasmique entre les deux sexes existe bel et bien. Une étude canadienne publiée en 2019 révélait que 86 % des hommes cisgenres ont déclaré avoir eu un orgasme lors de leur dernier rapport hétérosexuel, contre 62 % des femmes cisgenres. En utilisant ces données, des chercheuses ont lancé une seconde enquête en 2022, et découvert que le sexe oral aide à réduire l’écart.
Qu’est-ce que le Club Sexu?
Morag Bosom est consultante au Club Sexu, une équipe de sexologues et de spécialistes en communication dont la mission est de favoriser une sexualité positive, ludique et inclusive. Pour en savoir plus, on consulte le site clubsexu.com.
Références
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Galinsky, 2012 (détails manquants)
tres bon article