Des fonds prêts à vous indemniser

Des fonds prêts à vous indemniser

Par Didier Bert

Crédit photo: Micheile Henderson via Unsplash

Encore méconnus des Québécois, les fonds d’indemnisation peuvent, dans certaines circonstances, dédommager les consommateurs. En voici deux à découvrir. 

Quand un client ne reçoit pas le service pour lequel il a payé, il peut se retourner contre le prestataire ou s’adresser à un tribunal. Cependant, dans certains secteurs d’activité, des fonds d’indemnisation sont prévus pour rembourser les consommateurs lésés. C’est notamment le cas dans l’industrie des agents de voyages et celle des services financiers.

 

 

Le FICAV 

Le Fonds d’indemnisation des clients des agents de voyages (FICAV) est géré par l’Office de la protection du consommateur (OPC). Il ne remplace pas l’assurance voyage, mais la complète: il ne nous remboursera pas la totalité du montant, seulement la partie qui n’aura pas été couverte par l’assureur. Le Fonds permet de pallier une défaillance d’une agence de voyages dans le cas d’une prestation payée mais non reçue pour, entre autres, l’une des situations suivantes: transport, hébergement, activités touristiques ou service principal non reçus, sécurité compromise, départ ou rapatriement nécessaire, fermeture ou faillite de l’agence de voyages. Il pourra aussi nous indemniser si le transporteur aérien fait faillite avant que nous ayons pu utiliser notre billet d’avion. Le FICAV ne rembourse pas les biens non touristiques (assurance voyage, guides de voyage, valises…) ni les dommages (comme la perte d’une journée de vacances) sauf si un jugement nous l’accorde, ni les services pour lesquels on est insatisfait. 

Cette protection financière est offerte sans frais, mais uniquement si on fait affaire avec une agence de voyages titulaire d’un permis de l’OPC. On peut valider cette information en consultant le registre en ligne (à opc.gouv.qc.ca, sous l’onglet «À propos de l’Office», dans «Publications officielles et autres documents», puis «Registres publics» et «Listes des titulaires de permis»). «La facilité d’achat sur Internet donne l’impression qu’on peut tout faire soi-même, mais avec un agent de voyages, on est mieux protégé. C’est le seul moyen d’être indemnisé en cas de problème», commente Charles Tanguay, porte-parole de l’OPC.

 

 

Comment faire?

• Avant de déposer une demande au FICAV, on tente d’abord d’obtenir le remboursement du service non reçu auprès de l’agent de voyages. On vérifie ensuite si notre assureur peut nous indemniser. Pour cela, il faut présenter toutes les factures afférentes. 

• Si on n’obtient pas entièrement satisfaction, on adresse la réclamation suivante à l’OPC. Il est nécessaire de remplir un formulaire (disponible à opc.gouv.qc.ca, sous l’onglet «Section pour les consommateurs» dans la rubrique «Voyage», puis à «Fonds d’indemnisation des clients des agents de voyages», «Marche à suivre pour être remboursé» et, à l’étape 4, «Réclamation au Fonds d’indemnisation des clients des agents de voyages»). Il faut joindre à cette réclamation les originaux des documents appuyant notre demande, tels que billets et titres de transport, factures, preuves de paiement, correspondance échangée, etc. 

• Après la transmission des documents par la poste, il faut compter 30 jours pour recevoir un accusé de réception. Si la décision de l’Office ne nous satisfait pas, il faut savoir que «la Loi et le Règlement sur les agents de voyages ne prévoit pas de mécanisme de révision relatif à l’indemnisation par le FICAV», précise Charles Tanguay. 

• Cela dit, si l’achat a été effectué par carte de crédit, une autre option s’offre à nous. Dans l’éventualité où nous n’aurions pas reçu le service acheté, certaines compagnies de cartes de crédit acceptent d’annuler le paiement. Si l’achat a été effectué par téléphone ou par Internet, on peut en demander l’annulation si le service n’a pas été fourni dans les 30 jours suivant la date prévue ou dans les 30 jours suivant l’achat si aucune date de fourniture du service n’a été indiquée. Pour annuler, il faut envoyer une mise en demeure au commerçant l’informant de l’annulation du contrat passé avec lui.

 

 

Le FISF 

Le Fonds d’indemnisation des services financiers (FISF) peut rembourser un consommateur victime d’une fraude organisée par un conseiller financier dûment enregistré auprès de l’Autorité des marchés financiers (AMF). Si on est victime d’un escroc qui n’avait pas le droit de nous vendre des services financiers, le FISF ne pourra rien pour nous. En effet, le consommateur est tenu de vérifier qu’il fait affaire avec un représentant figurant sur le registre de l’AMF, c’est-à-dire un représentant en assurance, en épargne collective ou en plans de bourses d’études, un expert en sinistre ou un planificateur financier. On peut consulter le registre en ligne (à lautorite.qc.ca sous l’onglet «Grand public», à la rubrique «Rechercher dans les registres», puis à «Registres des entreprises et des individus autorisés à exercer»). 

La loi a élargi le mandat du FISF en 2018. Auparavant, il fallait que le représentant soit inscrit dans la discipline du service financier sur lequel portait la fraude. À présent, il est possible d’obtenir une indemnisation, même si le conseiller financier nous vend un produit qu’il n’a pas le droit de nous vendre.

C’est l’AMF qui administre le FISF. Elle analyse et valide les demandes d’indemnisation. L’AMF fixe ensuite l’indemnité à verser à la victime. Celle-ci peut toucher un montant maximum de 200 000 $ par réclamation, souligne Sylvain Théberge, porte-parole de l’AMF. Pour que notre demande soit admissible, l’entreprise ou le représentant doit avoir agi dans le but de nous tromper, en nous poussant à lui confier notre argent. Le détournement de fonds est aussi admissible à la demande de réclamation. Notre perte financière doit alors être due à une fraude. Les erreurs, omissions ou négligences commises involontairement par un représentant ne peuvent être indemnisées.

 

 

Comment faire?

• Notre demande au FISF doit être déposée dans l’année suivant le moment où on a pris connaissance de la fraude. Par exemple, si notre argent a été détourné en 2017 et qu’on le découvre maintenant, il est possible de déposer notre requête en remplissant le formulaire de réclamation téléchargeable (à lautorite.qc.ca, sous l’onglet «Grand public», à la rubrique «Indemnisation et protection des dépôts», puis à «Fonds d’indemnisation des services financiers», «Faire une demande d’indemnisation», «Processus de traitement de la demande» et, enfin, «Révision de la décision rendue»). 

• Au cours de l’analyse du dossier, l’AMF pourra déclencher une enquête. Il faudra alors fournir tous les éléments relatifs à notre demande, telles que les polices d’assurance, les copies de chèque, la correspondance échangée avec le représentant... «Le traitement d’une demande d’indemnisation se fait toujours dans les meilleurs délais, normalement en quelques semaines, assure Sylvain Théberge. Cela dit, certains facteurs, comme la complexité d’un dossier ou l’absence de documents, peuvent jouer sur le délai de traitement.»

• La décision du FISF ne nous satisfait pas? On peut en demander la révision en remplissant un formulaire en ligne (à lautorite.qc.ca, sous l’onglet «Grand public», à la rubrique «Indemnisation et protection des dépôts», puis à «Fonds d’indemnisation des services financiers», «Processus de traitement de la demande», «Révision de la décision rendue», et enfin, «Demande de révision d’une décision du Fonds d’indemnisation»). Si la décision de révision n’est toujours pas satisfaisante, on peut alors intenter un recours en contrôle judiciaire devant la Cour supérieure du Québec, en vertu de l’article 529 du Code de procédure civile. Mais avant cela, mieux vaut consulter un avocat.

 

 

Devant les tribunaux

Parallèlement à nos demandes d’indemnisation, il est également possible de se tourner vers les tribunaux civils pour recevoir des montants concernant des dommages non couverts par les fonds d’indemnisation. De plus, si ceux-ci ne nous accordent pas d’indemnités ou si les sommes sont insuffisantes, on peut poursuivre l’agent de voyages ou le conseiller financier concerné. Si le litige porte sur un montant inférieur à 15 000 $, notre demande devra être déposée à la Division des petites créances de la Cour du Québec. Il faudra généralement s’y représenter seul, sans avocat. Il sera possible d’utiliser le service de médiation proposé par la cour afin de trouver un règlement à l’amiable. Si notre réclamation se situe entre 15 000 $ et 84 999 $, notre requête devra être adressée à la Chambre civile de la Cour du Québec, et, au-delà, à la Cour supérieure du Québec.

 

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