Comment financer sa vie de nomade numérique?

Comment financer sa vie de nomade numérique?

Par Dominique Lamy

Crédit photo: iStock

Voir du pays tout en continuant à travailler? La tendance a gagné du terrain et des adeptes chez les jeunes, mais à l’ère du télétravail, c’est aussi une option fort intéressante pour les 50 + désirant profiter de la vie. Envie de passer six mois, un an ou plus en Toscane ou au Mexique? Deux experts nous disent comment transformer ce rêve en réalité.
 
Le phénomène du nomadisme numérique était déjà bien répandu avant l’arrivée de la pandémie et l’essor du travail à distance. Sans bureau fixe, mais avec un accès à l’Internet, le travailleur-touriste conjugue habilement ses impératifs professionnels avec sa passion du voyage. Est-ce trop beau pour être vrai?
 
La formule fonctionne, semble-t-il. Selon une étude de MBO Partners, il y avait plus de 15,5 millions de nomades numériques américains en 2021, ce qui représente une augmentation de 112 % depuis 2019. Et plusieurs autres études estiment désormais le nombre de nomades numériques à 35 millions dans le monde. Vous envisagez de faire le saut et d’adopter cette tendance ? Marie-Ève Lord, spécialiste en communication et marketing numérique et cofondatrice de l’organisme Digital Nomads Association Colombia, et Alexandre Comtois, coach d’affaires et auteur du livre L’ère du solopreneur – Double ta liberté de travailleur autonome, ont accepté de dévoiler leurs secrets de nomades numériques pour vous permettre de partir du bon pied.
 

Réduire le nombre de postes budgétaires

 
Les rentrées d’argent du nomade numérique lui permettent-elles de soutenir son coût de la vie à l’étranger? Si tel n’est pas le cas, des décisions s’imposent en amont. Une foule de dépenses disparaissent lorsqu’on renonce à conserver son logis. On peut par exemple vendre sa maison ou son condo pour profiter de la vigueur des prix observée dans le marché immobilier. Partir vers une destination de rêve sans trimballer une hypothèque ni aucune autre dette : voilà qui facilite la planification d’un projet! Autre option moins radicale, surtout si on en est à sa première expérience: louer son logement et utiliser ces revenus pour financer le séjour à l’étranger. 
 
«Mon plan initial était de visiter 12 pays en 12 mois, raconte Marie-Ève Lord. Mon budget ne me permettait pas de voyager tout en conservant mon appartement et ma voiture à Montréal. J’ai donc choisi de tout vendre. Maintenant, une dizaine de boîtes contenant mes effets personnels sont entreposées chez une de mes amies.»
 
Elle a obtenu un visa spécial de la Colombie qui lui permet de résider dans le pays, d’y entrer et d’en sortir librement pour une période de deux ans. «J’y suis depuis septembre 2022», explique Marie-Ève, souriante, elle qui y a d’ailleurs rencontré l’amour.
 
Alexandre Comtois a lui aussi vendu sa maison, ses meubles et la plupart de ses biens lorsqu’il a décidé d’être nomade numérique à temps plein. «On sous-estime souvent les coûts liés au nomadisme», constate-t-il. Financer un double mode de vie, non merci! «J’avais alors plus de latitude budgétaire pour payer les billets d’avion et l’hébergement.» Épurer pour s’offrir la vie rêvée, pourquoi pas? «C’est bon pour le moral et le portefeuille», assure-t-il.
 

Économiser sur le choix de la destination

 
Cela va de soi, la majorité des nomades numériques optent pour destinations où le coût de la vie est moins élevé et le temps plus clément qu’au Québec. Les régions en tête de liste: l’Amérique du Sud, l’Asie du Sud-Est et certains pays d’Europe où on peut s’en tirer à bon compte, comme le Portugal, l’Espagne ou des régions moins touristiques d’Italie. 
 
Pour Alexandre Comtois, c’est notamment la Thaïlande a répondu à ses critères d’économie.  «Étant entrepreneur web depuis 2009, j’ai l’habitude de gérer un budget relativement instable», se rappelle-t-il. Également fondateur de Pige.Québec, Alexandre vit de ses revenus passifs depuis 2017. La plateforme qu’il a créée a d’ailleurs été vendue en 2021.
 
Dans la recherche d’une destination idéale, le coût du visa n’est pas à négliger non plus. Plusieurs pays rivalisent désormais d’audace pour attirer les nomades numériques et leur proposent un visa adapté, d’une durée de 12, 18 ou 24 mois, c’est selon. Bien souvent, la demande peut s’effectuer en ligne (de 25$ à 100$); il faut cependant prévoir débourser quelques centaines de dollars pour obtenir le visa en question. 
 
Les sites iVisa.com et visalist.io répertorient les exigences d’entrée de plusieurs pays et proposent quantité d’informations utiles sur les destinations potentielles des nomades numériques. L’aventure se déroulera-t-elle en couple ou en famille? Le coût du visa grimpera bien sûr en conséquence. Certains pays imposent aussi des conditions financières à respecter, comme un revenu mensuel minimum à gagner.
 

La productivité, une priorité

 
Générer du revenu, voilà une variable à ne surtout pas négliger dans l’équation! Le nomade numérique doit rester productif malgré les nombreuses tentations touristiques offertes par sa nouvelle terre d’accueil. D’où l’importance de pouvoir compter sur un accès Internet rapide et de qualité. Et se rappeler que, non, la plage n’est pas un lieu très propice à la concentration.
 
Cela dit, entre le boulot et le repos, la vie suit son cours. «Tout est nouveau lorsqu’on dépose sa valise dans un pays, constate Marie-Ève Lord, et ça prend de l’énergie pour conjuguer nos responsabilités professionnelles et notre désir de visiter les lieux. Il faut savoir que faire l’épicerie ou aller à la pharmacie en terre étrangère, c’est plus long que faire ses emplettes au Québec.» Vivre l’expérience à deux, en couple, voilà déjà un premier pas pour faciliter les choses.
 

Le confort, ça compte!

 
Il faut certes prévoir un endroit pour se loger, se nourrir et bien dormir. Et, côté confort, les auberges de jeunesse ne sont peut-être pas le premier choix à envisager dans ce contexte!
On peut se tourner vers une option d’hébergement de type «coliving, coworking». Plusieurs entreprises – Selina ou Sun and Co., par exemple – proposent ce genre de forfait. Tout est prévu sur place pour permettre aux nomades numériques d’être logés confortablement et de travailler dans un endroit optimisé pour le boulot. En plus d’une chambre contemporaine, de l’accès à Internet haute vitesse, de bureaux et de salles de réunion, le travailleur profite de la présence de pairs et de la possibilité de participer à des visites organisées.
 
Si on préfère louer une maison ou un appartement en solo, on peut trouver son bonheur sur des sites des agences de  location locales
 
Certaines agences de voyages s’adressant particulièrement aux nomades numériques, telles que Remote Year, poussent le concept plus loin. En échange d’un coût mensuel fixe, elles s’occupent aussi de planifier le déplacement entre les villes, de trouver des appartements dans différents pays et d’en assurer l’entretien. Elles offrent aussi le soutien d’une équipe locale pour organiser des activités de groupe. La réservation et le prix des billets d’avion sont également inclus!
 
Au cours de la dernière année, Marie-Ève Lord a d’ailleurs choisi ce type d’agence: «Pour environ 3000$CA par mois, toute la logistique liée à l’hébergement et au transport est prise en charge.» Quoique plus coûteuse, cette façon de découvrir le nomadisme numérique assure une transition en douceur. «Je serais maintenant en mesure de m’organiser pour réduire les coûts», constate-t-elle.
 

Travailler autrement

 
Les personnes qui occupent un travail à temps plein peuvent tenter de conclure une entente de télétravail longue distance avec leur employeur – ou même se porter volontaires pour passer à un horaire à temps partiel avec l’objectif de mieux profiter de leur séjour. Il faudra alors tenir compte du décalage horaire au moment de faire le choix de la destination, ce qui explique entre autres la popularité du Mexique chez les nomades. 
 
Nombre de préretraités et retraités optent également pour le travail autonome. Certaines professions s’y prêtent particulièrement bien – comme la rédaction, traduction, le design graphique, le développement web, la programmation, le support technique ou même le service à la clientèle. On peut aussi devenir consultant, ou carrément se lancer à son compte!
 
Selon Alexandre Comtois, on peut tout réussir à distance, qu’on soit au Québec ou à l’étranger.
«Je suis un gars de terrain qui a bâti près d’une dizaine d’entreprises en ligne, dit-il. Celles qui ont échoué m’ont permis d’apprendre et celles qui ont réussi me permettent d’en vivre à 100% aujourd’hui.»
 
Même à 50, 60 ou 70 ans, il est possible de conjuguer le désir de travailler à l’amour du voyage. «Croyez en votre capacité de générer des revenus en ligne, ajoute Alexandre. Plusieurs modèles d’affaires – vendre des produits numériques, offrir une formation en ligne ou faire du marketing d’affiliation, par exemple – permettent de développer un flux de revenus passifs. Sky is the limit!»
 

Pour plus d’info sur:

 
– les agences et programmes pour nomades numériques 
– les exigences de visas
– comment trouver des contrats 

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