Placer ses parents en CHSLD

Placer ses parents en CHSLD

Par Sylvie Dugas

Crédit photo: Jake Thacker via Unsplash

Alors qu’il marchait simplement dans la rue, Ernest, un vigoureux septuagénaire, a subi un accident vasculaire cérébral (AVC). Il est désormais lourdement handicapé : entièrement paralysé d’un côté, il ne peut subvenir à ses besoins de base (toilette, nourriture, prise de médicament). Sa femme n’est pas assez en forme pour en prendre soin. Ses enfants habitent loin. De plus, ils ont un travail prenant et doivent s’occuper de leur propre progéniture. À contrecœur, ils se sont résolus à placer leur père dans un Centre d’hébergement de soins de longue durée (CHSLD). Quelles démarches doivent-ils entreprendre?

Pour trouver son chemin dans les dédales administratifs du ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS), il faut d’abord remonter le cours des événements. À la suite de son accident, Ernest a dû être hospitalisé pour connaître son diagnostic et recevoir les soins d’urgence. Au terme de son hospitalisation, c’est le médecin de l’établissement ou encore son médecin traitant qui l’a dirigé vers le CLSC de son quartier.

Là, Ernest a dû traverser une autre étape, celle du triage. Une infirmière a alors établi les exigences et les priorités de sa demande en matière de soins, d’aide domestique et de soutien. Après avoir renvoyé le patient chez lui, l’équipe du service de maintien à domicile du CLSC sélectionne les professionnels de la santé qui seront affectés à son dossier: infirmières, ergothérapeutes, travailleurs sociaux, etc. Au cours d’une visite à domicile programmée par la suite, Ernest, avec l’aide de sa femme et de ses enfants, a rempli un questionnaire permettant de dresser un profil détaillé de sa situation personnelle. C’est sur la base de ce document que ses besoins seront déterminés et qu’un plan d’intervention sera établi par le CLSC, comprenant le nombre d’heures de soins et de services dont il pourra bénéficier.

Les critères d’admission

Les critères d’admission

Les personnes en perte d’autonomie ont le droit, avec l’assistance de leurs proches, de choisir l’établissement qui leur convient le mieux. Mais, généralement, c’est le personnel des services de santé qui les envoie au CHSLD de leur secteur ou territoire. Cette pratique a pour but d’éviter de déraciner les personnes âgées de leur milieu.

Pour avoir une place dans un CHSLD, certains critères doivent être respectés. Ainsi, Ernest doit nécessiter plus de trois heures de soins quotidiens pour être admis dans le système public. S’il souffrait d’un déficit cognitif (démence ou maladie d’Alzheimer) et se retrouvait sans réseau social immédiat, il serait admis de façon prioritaire dans un CHSLD en raison des risques qu’il présente. Mais ce n’est pas son cas et, en dépit des séquelles de son AVC, Ernest devra faire preuve de patience. En effet, sur l’île de Montréal par exemple, il faut compter en moyenne plus de quatre mois entre l’inscription et l’attribution d’une chambre… S’il n’y avait pas de place disponible et si Ernest n’était pas en état de retourner chez lui, il serait éventuellement dirigé vers un lit d’hôpital de courte durée, qui pourrait être converti en lit de longue durée.

Quoi qu’il arrive, il est essentiel d’entrer le plus rapidement possible en contact avec son CLSC. Car même si les conséquences d’un AVC sont mineures pour la victime, celle-ci nécessitera une assistance du CLSC pour l’aider à faire des emplettes, accomplir des tâches ménagères ou tout autre travail domestique.

Trois types de CHSLD

En tout, le système public québécois regroupe 95 centres de santé et de services sociaux (CSSS), lesquels comprennent un ou plusieurs CHSLD. Le CSSS chapeaute généralement un CLSC, un CHSLD et un Centre d’hébergement (CH). Il existe trois types de CHSLD appartenant au système de santé québécois.

Les CHSLD publics. Ils sont entièrement administrés par le secteur public et comptent 32 000 lits.

Les CHSLD privés conventionnés. On compte 63 établissements de cette catégorie. Ils sont gérés par des entreprises privées, en partenariat avec le secteur public. Ils fournissent 6 555 lits et offrent des services comparables à ceux des CHSLD publics.

Les centres privés non conventionnés. Entièrement gérés par le secteur privé, les 31 centres privés non conventionnés offrent quelque 2 700 lits. Ils hébergent une clientèle constituée de personnes autonomes et semi-autonomes, qui nécessitent au moins une heure de soins par jour. Les soins et l’animation sont payables au bail ou à la carte par les pensionnaires, en fonction des besoins exprimés.

Un nouveau type d’hébergement

Un nouveau type d’hébergement résidentiel a également vu le jour en raison de la demande croissante. Des particuliers, détenteurs d’une entente de service d’un CSSS, accueillent chez eux des personnes en perte d’autonomie. Ces ressources intermédiaires ou familiales font l’objet d’un suivi serré du ministère, qui a annoncé son intention d’augmenter le nombre de ces établissements privés.

Tous les CHSLD, qu’ils soient publics ou privés, sont soumis aux mêmes critères de qualité. Ils doivent en effet être titulaires d’un permis du MSSS et avoir conclu une entente avec le Conseil québécois ou canadien d’agrément, qui les oblige à appliquer un exigeant processus d’amélioration continue. Il existe toutefois certaines différences entre les divers centres publics et privés.

Ainsi, les services d’animation varient d’un CHSLD à l’autre en fonction des ressources disponibles. Règle générale, les CHSLD publics et privés conventionnés rassemblent sous leur toit des cas lourds à mobilité réduite, qui ne peuvent s’adonner à des loisirs élaborés. On trouve donc des jeux de poches ou de cartes dans la plupart d’entre eux. Mais certains CHSLD emploient des professionnels, des techniciens en loisirs et des travailleurs sociaux, alors que d’autres ne font appel aux services d’ergothérapeutes ou de physiothérapeutes qu’une fois par semaine. De plus, un CHSLD hébergeant une clientèle plus jeune n’offre habituellement pas les mêmes services qu’un autre qui loge une clientèle âgée.

Même chose du côté des centres privés non conventionnés, où chaque établissement fixe ses prix en fonction des services proposés. Enfin, si la nourriture est semblable d’une institution à l’autre, les services de repas n’ont pas nécessairement lieu aux mêmes heures. Dans certains centres, le déjeuner sera servi tôt le matin, à 6 h 30, et le souper à 16 h, pour coïncider avec les changements de garde. En fait, chaque CHSLD organise et structure ses propres activités.

Ainsi, si Ernest n’est pas heureux dans le CHSLD où le CLSC l’a dirigé, il est libre de changer d’établissement, s’il y a une place disponible dans celui qu’il convoite. En cas de mauvais traitements ou de plaintes, il peut s’adresser en première instance au Commissaire aux plaintes et à la qualité de l’établissement où il sera logé. Le commissaire est tenu de lui fournir une réponse dans les 45 jours. Si Ernest juge le rapport insatisfaisant, il peut faire appel au Protecteur des usagers, un intervenant de premier plan dans le réseau de la santé pour les cas de maltraitance. Le Conseil pour la protection des malades peut également lui venir en aide.

Des coûts adaptés

Des coûts adaptés aux moyens

L’hébergement en CHSLD n’est jamais gratuit. Ainsi, le coût d’une chambre individuelle dans les CHSLD publics et les CHSLD privés conventionnés dépasse les 1 500 $ par mois (voir tableau ci-bas, Coût des chambres dans les CHSLD publics et privés conventionnés). Cependant, ceci est un prix maximal. En réalité, le montant de la contribution financière qu’Ernest devra fournir sera établi en fonction de sa capacité de payer. Le MSSS tiendra alors compte de ses revenus, des biens qu’il possède, de ses épargnes et de sa situation familiale. Des exonérations peuvent s’appliquer s’il ne possède pas plus de 2 500$ en argent liquide ou en biens mobiliers, 40 000$ en biens immobiliers (maison) et 4 000$ en véhicule automobile. D’autres déductions s’appliqueront si la femme d’Ernest demeure à la maison ou s’il a des personnes à sa charge (voir tableau ci-bas Déductions applicables par mois). La Régie de l’assurance maladie du Québec offre d’ailleurs sur son site Internet un outil de simulation du calcul de la contribution financière de la personne hébergée.

Quant au prix des chambres administrées par le secteur privé non conventionné, il varie d’un établissement à l’autre, dépendant des services dispensés. D’après l’Association des résidences et CHSLD privés du Québec, ce type d’hébergement est accessible à toutes les bourses. Mais ce sont sans doute les aînés les plus fortunés qui peuvent se permettre des soins de santé privés. Quelques appels nous ont permis de constater que les tarifs varient de 800$ à 4 950$ par mois… Cependant, en raison du vieillissement de la population et du sous-financement permanent du système public, ces établissements privés risquent d’être de plus en plus fréquentés au cours des prochaines années.

Coût des chambres dans les CHSLD publics et privés conventionnés en 2007


 Type d’hébergement Coût par mois
Chambre individuelle 1 630,80$
Chambre à 2 lits 1 363,20$
Chambre à 3 lits et plus 1 013,10$


Déductions applicables (par mois)

Dépenses personnelles 188$
Si vous avez un conjoint non hébergé 1 050,37$
Pour chaque enfant à charge de 18 ans et plus 527,32$
Pour chaque enfant à charge de 17 ans et moins 420,58$

Ressources

Ressources

Association québécoise des établissements de santé et de services sociaux, tél.: (514) 842-4861. www.aqesss.qc.ca

Association des établissements privés conventionnés, tél.: (514) 499-3630. www.aepc.qc.ca

Association des résidences et CHSLD privés du Québec (ARCPQ), tél.: (514) 526-3777 et 1-888-440-3777. www.arcpq.org

Régie de l’assurance maladie du Québec, calcul de la contribution financière, www.ramq.gouv.qc.ca/fr/citoyens/contributionetaidefinancieres/index.shtml

Conseil pour la protection des malades, tél.: (514) 861-5922. www.cpm.qc.ca 

Mise à jour: novembre 2007

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