Souvent, dans l’imaginaire collectif, les gens qui arrivent à 60 ans, ou à 65 ans, l’âge de la retraite, disparaissent dans une espèce de trou noir où tout le monde a le même statut: vieux. Pourtant, entre 60 et 82,5 ans (l’âge moyen de l’espérance de vie à la naissance au Québec, hommes et femmes confondus), il y a des jalons que l’on pose qui sont tout aussi significatifs que ceux qui marquent notre existence de la naissance à l’âge adulte.
Pensons-y: jamais on ne mettrait dans le même bateau un écolier qui entre à la maternelle et un diplômé universitaire qui décroche son premier emploi, qui le mènera à une carrière enrichissante.
À l’intérieur de deux décennies, il s’en passe des choses, et ce, peu importe que cette vingtaine d’années se trouve au début ou à la fin de notre vie. N’oublions pas non plus qu’avec l’augmentation graduelle du nombre de centenaires au Québec ou ailleurs, les Janette Bertrand de ce monde auront un 20 ans supplémentaire à combler et à chérir (pourvu que ça les intéresse ou que leur condition physique ou mentale le leur permette, bien sûr)!
Que faire de tout ce temps? Pour la psychologue Laura Carstensen, directrice du Centre de recherche sur la longévité de l’Université Stanford, en Californie, il n’y a aucun doute quant à notre capacité d’en faire bon usage. Malgré les défis du vieillissement, notre santé émotionnelle serait, selon elle, plus stable à 60, 70, 80 et plus qu’elle ne l’était quand on était jeune. Nos horizons temporels seraient certes moins élargis, mais loin de nous décourager, au contraire, cette réalité nous inciterait à nous concentrer davantage sur le présent, réduisant ainsi le stress lié à l’incertitude.
Comment, alors, maximiser ces avantages du vieillissement? Mme Carstensen, elle-même septuagénaire, suggère aux grands décideurs de dessiner ce qu’elle appelle une «nouvelle carte de la vie». Plutôt que d’allonger uniquement la vieillesse, dit-elle, on gagnerait à reconfigurer toutes les étapes de la vie.
Par exemple, en étirant la période des études scolaires, qui pourraient inclure deux années de pause au secondaire (ou au cégep) afin de permettre aux élèves de faire du service communautaire ou un stage professionnel. Une plus grande flexibilité dans la vie professionnelle, en réduisant les semaines de travail à quatre jours et à six heures par jour, ou en proposant des horaires plus légers pour les parents de jeunes enfants, ferait en sorte que les travailleurs arriveraient à la soixantaine moins épuisés et suffisamment motivés pour rester plus longtemps sur le marché de l’emploi. La retraite, selon la psychologue, ne devrait plus être définie par l’âge de 65 ans, mais par l’état de santé ou la volonté individuelle. L’idée est de permettre aux gens de travailler plus longtemps à un rythme moins intense, tout en continuant à contribuer activement à la société.
Peut-on rêver d’une société future où les 60, 70, 80 et plus ne seront pas que des vieux? Où chacun d’entre nous vivra pleinement et restera en bonne santé fonctionnelle pendant la majeure partie de sa vie? Et où ses compétences et ses talents, à chaque étape de son parcours entre la naissance et la mort, seront valorisés pour le bien de tous? Pourquoi pas! Après tout, devenir des acteurs de changement à nos âges, c’est positif!
Le saviez-vous?
Contrairement aux idées reçues, les personnes âgées répondent bien aux thérapies cognitives et comportementales. D’où l’importance de leur faciliter l’accès à ce type de soins afin de les aider à vieillir positivement.