La vie après la ménopause

La vie après la ménopause

Par Eva Chanda

Crédit photo: iStockphoto.com

La ménopause, c’est bien plus que la fin des règles. Sans être une maladie, cette période de transition n’est pas sans conséquences – le corps subit de profondes transformations qui peuvent avoir des répercussions importantes sur la santé si on ne leur accorde pas toute l’attention nécessaire.

Les maladies du cœur: l’apanage des hommes?

Beaucoup de femmes croient que les maladies du coeur touchent davantage les hommes – et les médecins sont eux-mêmes moins enclins à diagnostiquer et à traiter activement ces maladies chez les femmes. Or, cette méprise peut être fatale.

Il est vrai que le risque de maladies cardiaques et d’accidents vasculaires cérébraux (AVC) est généralement faible avant la ménopause. Selon la Dre Beth Abramson, cardiologue de Toronto et porte-parole de la Fondation des maladies du coeur du Canada, on n’en connaît pas vraiment les raisons, mais on sait que l’oestrogène contribue probablement à protéger les femmes contre les AVC.

Après la ménopause, la carence en oestrogène peut entraîner d’importants changements physiques susceptibles d’accroître le risque de maladie cardiaque, notamment une tendance à l’hypertension artérielle, un taux plus élevé de «mauvais» cholestérol et un taux inférieur de «bon» cholestérol. De plus, les femmes se mettent à prendre des kilos au-dessus de la taille plutôt qu’aux hanches et au x cuisses. Résultat: les taux d’AVC chez les femmes commencent à grimper et, 7 à 10 ans après la ménopause, ils rejoignent ceux observés chez les hommes. Ces maladies sont la première cause de mortalité chez les deux sexes.

Prenez soin de votre coeur

Heureusement, il existe de nombreux moyens d’éviter ces maladies. «Il n’est jamais trop tôt – ni trop tard d’ailleurs – pour adopter des comportements bénéfiques pour la santé du coeur», soutient la Dre Abramson. Maintenir un poids santé, manger moins gras, augmenter sa consommation de fruits et légumes, arrêter de fumer et faire de l’exercice régulièrement sont tous des comportements qui favorisent une bonne santé cardiaque.

La Fondation des maladies du coeur recommande de pratiquer la marche rapide ou une activité cardiovasculaire modérée d’une durée d’au moins 30 à 60 minutes, presque tous les jours. Cependant, s’adonner à une activité qui nous essouffle et nous fait transpirer au moins 3 fois par semaine durant 30 minutes devrait être un minimum, selon la Dre Abramson.

Renforcez vos os!

Soyez prévoyante

Une autre façon de tenir à distance les maladies cardiovasculaires consiste à se renseigner sur ses risques de les contracter. Les facteurs de risque sont l’hypertension artérielle, le diabète, le tabagisme, un taux de cholestérol élevé et des antécédents familiaux de maladies cardiaques précoces (dans la cinquantaine pour les hommes, dans la soixantaine pour les femmes). Demandez un bilan de santé qui devrait comprendre les éléments suivants:

  • prise de tension artérielle – assurez-vous de connaître vos résultats, même si votre médecin vous dit que tout est normal (120/80 mm Hg ou moins);
  • vérification du taux de cholestérol – à partir de 40 ans ou plus tôt si vous présentez un facteur de risque de maladie cardiovasculaire;
  • détection du diabète;
  • mesure du tour de taille, de la taille et du poids – si votre tour de taille dépasse 88 cm, vos risques sont plus grands de développer hypertension, taux de cholestérol élevé et diabète.

À partir de ces renseignements, votre médecin peut calculer vos risques de crise cardiaque ou d’accident vasculaire cérébral pour les 10 prochaines années. Chez les personnes à haut risque, un changement des habitudes de vie pourrait ne pas suffire; des mesures plus énergiques, comme la prise de médicaments visant à abaisser l’hypertension ou le cholestérol, contribueront à atténuer les risques.

Renforcez vos os!

L’ostéoporose est un autre problème de santé qui apparaît après la ménopause. Chez les personnes atteintes, les os s’amincissent et peuvent se briser plus facilement; les fractures de la hanche, du poignet et de la colonne vertébrale sont particulièrement fréquentes. Une Canadienne sur quatre de plus de 50 ans souffre d’ostéoporose, mais beaucoup l’ignorent parce qu’elles n’ont pas de symptômes jusqu’à ce que survienne une fracture.

«L’os est un tissu vivant dans lequel des équipes de cellules, certaines affectées au “creusage”, d’autres au “remplissage”, sont constamment au travail pour maintenir la structure osseuse en parfait état», explique la Dre Angela Cheung, directrice du Programme sur l’ostéoporose du Réseau universitaire de santé et de l’hôpital Mount Sinai de Toronto. Chez la femme, l’œstrogène joue un rôle déterminant dans l’équilibre de ces fonctions. Vers la ménopause, avec le déclin de l’oestrogène, l’équipe de remplissage ne travaille plus assez vite pour maintenir la cadence des cellules qui creusent, ce qui entraîne avec le temps un amincissement et un affaiblissement des os. La perte osseuse la plus importante survient au cours des 5 à 10 années qui suivent la ménopause.

La bonne nouvelle? À l’instar des maladies cardiovasculaires, on peut prévenir l’ostéoporose. La Dre Cheung est fermement convaincue des bienfaits de l’exercice: «À la ménopause, ou même plus tôt, non seulement l’exercice est important pour préserver la masse osseuse, mais il aide aussi à entretenir les muscles et à améliorer l’équilibre. Tous ces éléments se conjuguent pour prévenir les chutes, ce qui, par conséquent, prévient les fractures.»

Les exercices mettant en jeu les articulations portantes comme la course, l’aérobique, la marche et la danse contribuent à prévenir la perte osseuse après la ménopause. Les exercices contre résistance, tels que le yoga, le Pilates et le taichi, sont davantage utiles pour maintenir l’équilibre et renforcer les muscles.

«Il faut aussi avoir un apport suffisant en calcium et en vitamine D, lesquels travaillent de concert pour assurer la solidité des os», poursuit la Dre Cheung. Toutes les femmes postménopausées devraient consommer quotidiennement un total de 1000 à 1500 mg de calcium élémentaire – de préférence celui contenu dans les aliments – et n’avoir recours à des suppléments que pour combler des carences. Les produits laitiers, le jus d’orange, le lait de soya et les boissons de riz enrichis, les légumes vert foncé comme le brocoli ainsi que le poisson en conserve avec arêtes (par exemple, le saumon et les sardines) constituent de bonnes sources de calcium.

Quant à la vitamine D, on recommande généralement d’en prendre tous les jours un supplément de 400 à 800 UI après la ménopause. Un supplément est nécessaire car peu d’aliments renferment cet élément nutritif.

Comme l’ostéoporose se développe lentement et sans avertissement, toute femme de plus de 65 ans devrait passer une ostéodensitométrie (DMO). Certaines femmes postménopausées pourraient cependant avoir à passer une ostéodensitométrie plus tôt si elles présentent au moins un des facteurs de risque suivants: ménopause précoce (avant l’âge de 45 ans); antécédents familiaux d’ostéoporose (notamment une fracture de la hanche); fracture d’un os consécutive à une chute depuis la position debout ou à la suite d’une activité quotidienne qui oblige à se pencher, surtout après 40 ans; prise de corticostéroïdes pendant plus de trois mois.

Inconvénients et avantages

Soucis intimes…

Un des effets à long terme de la ménopause est de nature plus délicate: ce sont les changements génito-urinaires, notamment la sécheresse vaginale et les troubles urinaires. Après la ménopause, la carence en oestrogène entraîne souvent un amincissement, un assèchement et une fragilisation des muqueuses génitales externes et des parois vaginales. Ces phénomènes peuvent occasionner une sensation de brûlure, de la douleur durant les relations sexuelles et, parfois, des saignements consécutifs. Pour tout saignement anormal survenant 12 mois ou plus après la ménopause, vous devriez consulter votre médecin afin de vous assurer qu’il n’est pas dû à un cancer ou à une autre maladie grave (attention: si vous suivez une hormonothérapie cyclique qui entraîne des saignements mensuels réguliers, signalez tout écart par rapport aux saignements normaux).

«Les problèmes urinaires ne sont pas, pour leur part, causés directement par la ménopause», explique le Dr David Cumming, obstétricien-gynécologue et professeur à l’Université de l’Alberta, à Edmonton. Toutefois, les symptômes urinaires existants peuvent s’aggraver à mesure que les taux décroissants d’oestrogène amincissent la paroi de la vessie et des voies urinaires. Ce changement peut se traduire par une irritation et une surstimulation des muscles de la vessie, qui se manifestent par des visites plus fréquentes et plus urgentes aux toilettes – un problème appelé vessie hyperactive et qui s’accentue au fil des années. Un autre problème est l’incontinence à l’effort, où les muscles affaiblis du périnée laissent échapper de petites fuites d’urine quand on tousse, éternue ou rit.

Malheureusement, beaucoup de femmes souffrant de ces problèmes n’en parlent pas à leur médecin. Si vous hésitez à en parler, soit par gêne, soit parce que vous croyez, à tort, que ces troubles font partie du processus normal de vieillissement et qu’il n’y a rien à faire, demandez de l’aide. Diverses options pourraient soulager ou même guérir ce qui vous embête «dans ce coin-là» et ainsi améliorer votre qualité de vie.

Du SPM au ZPM

Enfin, la ménopause ne comporte pas que des inconvénients! «L’arrêt des menstruations est habituellement une très bonne nouvelle pour la femme, puisque cela signifie qu’elle n’a plus à s’inquiéter de tomber enceinte», souligne Margaret Lock, professeure d’anthropologie à l’Université McGill, à Montréal. Pour reprendre une phrase célèbre de l’anthropologue Margaret Mead: «Il n’y a pas de force plus créative dans le monde que la femme ménopausée avec un peu de zeste.» C’est aussi elle qui a inventé l’expression «zeste postménopause» (ZPM) pour décrire cet état qui remplace avantageusement le syndrome prémenstruel (SPM). Mais ce phénomène est-il répandu? Très, selon une enquête menée en 2007 auprès de plus de 2000 Canadiennes de 40 ans et plus. La majorité d’entre elles s’accordent pour dire qu’à mesure qu’elles vieillissent, elles se sentent plus sûres d’elles-mêmes; la ménopause est le début d’une étape enrichissante de la vie, et la cinquantaine est la nouvelle quarantaine. Accueillons donc avec sérénité le ZPM!

Et l’hormonothérapie?

Et l’hormonothérapie?

Autrefois, les experts croyaient que puisque l’œstrogène protégeait les femmes contre les maladies cardiovasculaires jusqu’à la ménopause, l’hormonothérapie constituait aussi une bonne protection après ce changement hormonal. Or, dans le milieu médical, il ne suffit pas de croire à la validité d’un fait, il faut le prouver.

L’enquête Women’s Health Initiative (WHI), publiée en 2002, a été l’une des premières études à se pencher sur les risques et les bienfaits de l’hormonothérapie sur la santé. Près de 17 000 femmes, à qui l’on administrait un traitement d’hormonothérapie ou un placebo, devaient être suivies durant plus de huit ans. Or, les chercheurs ont décidé d’interrompre l’essai plus tôt, après une moyenne de seulement cinq ans, ce qui a suscité beaucoup de controverse et de confusion. L’étude a révélé que l’hormonothérapie n’offrait aucune protection contre les maladies cardiovasculaires. En fait, on a relevé un plus grand nombre de maladies cardiaques et d’accidents vasculaires cérébraux ainsi que de cancers du sein chez les femmes qui prenaient des hormones; on a cependant aussi noté une protection légèrement supérieure contre le cancer du côlon et les fractures de la hanche.

Les chercheurs ont finalement estimé que les effets négatifs pesaient plus lourd dans la balance que les avantages. La Dre Abramson conclut: «Jamais nous ne voudrions proposer une thérapie préventive ayant des effets défavorables, c’est pourquoi nous ne recommandons pas l’hormonothérapie pour prévenir les maladies cardiovasculaires.»

Mise à jour: août 2008

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