Qui n’a pas déjà rêvé d’afficher sur le visage un grain de beauté identique à celui de Madonna ou de Cindy Crawford? Malheureusement, les grains de beauté ne sont pas tous aussi mignons ni aussi stratégiquement situés. Certains peuvent même se métamorphoser en mélanome malin. Mais comment différencier celui-ci du simple grain de beauté? Quelles personnes risquent d’avoir ce type de cancer? Peut-on le prévenir?
D’un grain de beauté à l’autre
Les grains de beauté sont formés de cellules pigmentaires (les mélanocytes) qui s’agglutinent les uns aux autres. On les reconnaît à leur forme ronde ou ovale, leur contour bien net, leur couleur uniforme allant du brun clair au noir et leur diamètre le plus souvent inférieur à 6 mm (¼ po). Ils sont plats ou légèrement surélevés, et gardent leur taille, leur forme ou leur couleur durant des années.
Certains grains de beauté sont présents à la naissance: ils portent alors le nom de naevus pigmentaires congénitaux. D’autres apparaissent progressivement au cours de la vie, en général avant l’âge de 20 ans, sur les parties du corps les plus exposées aux UV. Ne l’oublions pas: les mélanocytes fonctionnent à plein régime sous le soleil. Un de nos géniteurs a beaucoup de grains de beauté? Nous en aurons beaucoup nous aussi. Car leur nombre est souvent lié à l’hérédité.
Qu’on les aime ou non, nos grains de beauté sont généralement là pour de bon. Car les médecins sont de plus en plus réticents à enlever un naevus normal, entre autres parce que l’excision laisse souvent une cicatrice moins belle que le grain de beauté lui-même. Bref, ils le retireront uniquement s’il est inesthétique ou mal situé. C’est le cas, par exemple, du grain de beauté sur lequel frottent les bretelles du soutien-gorge, la ceinture ou les lunettes, et qui risque d’être blessé ou arraché par inadvertance.
Bien que la plupart des naevus soient sans danger, il subsiste toujours un risque que l’un d’eux se métamorphose en mélanome malin. «Un tel mélanome peut se développer sur une peau normale ou sur un naevus existant, rappelle le Dr Joël Claveau, dermatologue spécialisé en cancers cutanés. En fait, moins de 25% des mélanomes malins sont associés à des grains de beauté. Et le problème, c’est qu’au début ils leur ressemblent, ce qui n’aide pas à les identifier.» Raison de plus pour placer nos grains de beauté sous haute surveillance.
À la découverte du mélanome malin
À la découverte du mélanome malin
Cette forme de tumeur se multiplie actuellement. Au Canada, son incidence a doublé depuis 20 ans! En 2013, la Société canadienne du cancer estimait que plus de 6 000 Canadiens en souffriraient pendant l’année, et que 1 050 d’entre eux en mourraient. Bien que le risque augmente en vieillissant, la maladie peut toucher tous les groupes d’âge. Étonnant: selon le Dr Claveau, environ 80% des mélanomes diagnostiqués chez les hommes seraient découverts par leur conjointe ou leur amie! Les femmes, habituées à examiner leur peau, seraient tout simplement plus vigilantes.
Le mélanome malin ressemble souvent à un grain de beauté qui grossit en changeant de couleur et de forme et qui, parfois, saigne ou s’ulcère. Pour le distinguer du banal grain de beauté, il suffit, selon la dermatologue Danielle Marcoux, de se rappeler qu’il obéit à la règle de l’ABCDE – A pour asymétrie, B pour bordure irrégulière, C pour couleur qui varie d’une zone à l’autre, D pour diamètre (en général supérieur à 6 mm) et E pour évolution habituellement rapide.
Les scientifiques n’ont pas encore découvert tous les facteurs responsables de l’apparition du mélanome malin, mais il est certain que l’exposition excessive au soleil joue un rôle déterminant dans son développement, de même que les coups de soleil graves (qui font des cloques), subis dans l’enfance ou à l’âge adulte. Il faut aussi tenir compte du facteur héréditaire : des antécédents dans la famille accroîtraient le risque. De la présence de naevus dysplasiques (grains de beauté d’apparence étrange, mais non cancéreux) également. Par ailleurs, plus une personne affiche un grand nombre de grains de beauté (plus de 50), plus son risque de développer un mélanome augmente. À surveiller très étroitement: les naevus d’origine congénitale, plus prompts à changer de forme. D’autres personnes à risques: les gens à la peau et aux yeux clairs qui brûlent au lieu de bronzer, ceux qui en ont déjà été victimes et ceux qui travaillent à l’extérieur.
Enfin, le mélanome malin apparaît le plus fréquemment sur le dos chez les hommes, et à l’arrière des jambes chez les femmes. Il peut cependant se développer n’importe où à la surface de la peau. Quand, rarement, il apparaît chez les personnes à la peau foncée, c’est surtout sur la paume des mains, la plante des pieds et sous les ongles.
Dépistage, traitement et auto-examen
Dépistage et traitement
Lorsqu’il est découvert et traité rapidement, le mélanome présente l’un des meilleurs taux de guérison de tous les cancers, soit 90%. Dans le cas contraire, il pénétrera profondément sous la peau et se propagera dans le système sanguin ou lymphatique. À ce stade, il est souvent mortel. D’où l’importance du dépistage précoce. Idéalement, on fait examiner sa peau annuellement par son dermatologue et, à la maison, on pratique l’auto-examen du corps complet plusieurs fois par année afin de détecter le grain de beauté qui aurait changé d’apparence ou d’identifier les excroissances nouvelles. Dans le doute, on consulte sans tarder.
«Si un naevus est suspect, on procède à une biopsie, explique la Dre Danielle Marcoux. Cette intervention consiste à prélever un grain de beauté et à l’examiner au microscope. Si le résultat est positif, on pratiquera alors une excision chirurgicale totale de la lésion et de certains tissus environnants, accompagnée d’une analyse au microscope pour s’assurer qu’il ne reste plus de trace de la tumeur cancéreuse.»
Le Dr Claveau tient à souligner: «On n’enlève plus les grains de beauté normaux comme on le faisait autrefois, au cas où ils deviendraient cancéreux. Pour certaines personnes, leur ablation serait de toute façon impossible, étant donné qu’elles en ont sur toutes les parties du corps. Mieux vaut apprendre à reconnaître le mélanome malin et à se protéger des UV.» Message reçu!
Comment procéder à l’auto-examen de sa peau?
Pour faciliter l’examen, on s’installe dans un endroit bien éclairé, devant un miroir qui permet de se voir en pied. On aura aussi besoin d’un miroir à main pour vérifier certaines zones, comme le cuir chevelu. Mieux encore, on demande à notre conjoint de nous aider. Voici la marche à suivre:
- Examiner attentivement les grains de beauté et les taches sur la peau. Noter leur apparence normale. Les mesurer, au besoin. Par la suite, surveiller tout changement dans la taille, la texture ou la couleur d’un grain de beauté, ainsi que toute lésion qui ne guérit pas.
- Examiner le devant (ne pas oublier le dessous des seins) et le dos du corps dans le miroir. Puis lever les bras et observer le côté gauche et le côté droit.
- Plier les coudes et vérifier les mains (dessus, dessous, entre les doigts et sous les ongles) et les avant-bras, y compris l’arrière et la partie supérieure des bras, ainsi que les aisselles.
- Regarder le devant et l’arrière des jambes. Examiner également la région des fesses et des organes génitaux.
- En position assise, bien scruter les pieds, incluant la plante, les ongles et les espaces entre les orteils.
- Surveiller le visage, le cou (sans oublier les oreilles) et le cuir chevelu en s’aidant d’un peigne ou d’un séchoir pour déplacer les cheveux.
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