Selon les dernières données, l’espérance de vie est de 20 à 30 ans après l’âge de 65 ans. Une belle période, donc, qu’on espère toujours savourer pleinement. Ce guide en trois étapes explique comment se préparer mentalement à ce grand bouleversement, le traverser sans souci et devenir un retraité joyeux.
1 AVANT
Ce que je pourrais ressentir
Jusqu’à un an précédant la retraite, il arrive qu’on envisage celle-ci en tenant compte uniquement de notre fonds de pension ou de nos RÉER, sans réaliser pleinement son impact sur notre mental. «Pris par les occupations professionnelles et personnelles, on ne réalise pas qu’on aura tout ce temps libre devant nous», confirme Josée Blondin, psychologue et co-auteure de Ma retraite: des spécialistes m’aident à la préparer (éditions Logiques). Or, la retraite est un état d’être et non de situation, et qui se prépare toute une vie. Selon la psychologue, plus on vise l’équilibre dans tous les aspects de notre existence et ce, à n’importe quel moment au fil des années, mieux on vivra cette transition.
Comment me préparer
Le secret est effectivement dans la préparation. «Les recherches le confirment: mieux on prépare notre retraite, mieux on la vivra», rapportent Jeannette Lalonde et Mary Morency, coachs de retraite renouvelée (coachingretraite.ca). Celles-ci recommandent de l’organiser, de préférence entre un an et cinq ans avant le moment crucial. Cela dit, il n’est jamais ni trop tard ni trop tôt pour y songer et concevoir un plan de match qui va nous permettre d’en profiter au maximum. Pour les deux coachs, la retraite n’étant pas uniquement synonyme de loisirs, on gagne à se demander ce qu’on rêve de devenir quand on sera grand… comme lorsqu’on était petit! «Rien ne nous oblige à arrêter de travailler, renchérit Josée Blondin. Au contraire, nos efforts après la retraite sur le plan physique, social, mental, entre autres, peuvent contribuer à favoriser notre épanouissement. Ce qui compte est de se réserver au préalable du temps pour réfléchir à qui on est, ainsi qu’à ses envies.»
-> Je me projette dans l’avenir. On gagne, bien sûr, à planifier une retraite… qui nous ressemble. «Le scénario des expéditions en mer sur un voilier n’est pas pour tout le monde, illustre Josée Blondin. J’encourage pour ma part les gens qui préfèrent, par exemple, pêcher la truite au bord d’un lac dans le fond des bois plutôt que de s’installer dans un condo en Floride à suivre leur propre voie.» On veut faire le tour de l’Amérique du Nord en Winnebago? Si on a déjà fait l’expérience d’un long voyage en motorisé et qu’on a aimé, tant mieux. «Sinon, mieux vaut essayer lors des prochaines vacances avant de nous commettre», recommande la psychologue. Démarrer notre propre entreprise de consultation, exploiter une érablière familiale, ouvrir une boutique de savons, pourquoi pas, surtout si on détient déjà une certaine expérience dans le domaine qu’on choisit… et que ça nous tente vraiment de le faire!
À prévoir aussi: un plan A, B et même C, puisque des facteurs liés au vieillissement, comme la baisse d’énergie, la maladie, le décès de notre conjoint, peuvent nous mettre des bâtons dans les roues.
-> Je plonge dans l’action. Nous projeter dans l’avenir veut dire aussi trouver tout de suite ce qui nous allume et nous y mettre sans tarder. «On est souvent tellement pris par le travail qu’on ne songe pas à nourrir d’autres passions, avance Jeannette Lalonde. En s’adonnant à des activités qui nous branchent avant la retraite, on n’a ensuite tout simplement qu’à continuer de les faire une fois celle-ci venue.» La crise de la quarantaine sert déjà parfois à faire le point et à identifier ses besoins. «On peut en profiter pour dresser le bilan de sa vie, se demander qui on est et ce qu’on souhaite réaliser, décrit Josée Blondin. Ensuite, on s’active.»
-> Je planifie avec mon conjoint. Comme la retraite est une cause de divorce chez environ 20 à 25 % des couples retraités, rapporte Mary Morency, mieux vaut communiquer avant d’organiser. On définit nos intérêts et les projets qu’on veut réaliser en solo, en duo ou en groupe. «Si on aime le vélo, mais que notre partenaire ne partage pas cette passion, on prévoit de se réserver des plages horaires afin de pratiquer cette activité seul ou avec des amis.»
À moins d’être totalement sur la même longueur d’onde, on y pense aussi à deux fois avant de décider de se retirer ensemble. La retraite faisant en effet partie du top 10 des facteurs de stress, mieux vaut laisser du temps à l’autre pour vivre sa période d’adaptation si on ne veut pas que ça brasse dans la chaumière, recommande Josée Blondin: «Idéalement, on ne dépasse pas cinq ans, surtout si c’est la femme qui se retire en premier. Les femmes s’adaptant généralement mieux que les hommes à ce nouveau mode de vie, certaines délimitent déjà beaucoup leur territoire dans la maison, laissant peu de place à leur conjoint.»
2 PENDANT
Ce que je pourrais ressentir
Ça y est, il nous reste seulement un à deux mois à travailler! «Pour certains, il s’agit d’une période d’euphorie durant laquelle on raye les journées sur un calendrier et on a hâte d’avoir enfin du temps pour nous, confie Josée Blondin. Pour d’autres, qui réalisent que ça se termine sous peu, c’est le choc.» Quel que soit notre attitude face à cette retraite imminente, une bonne préparation est la clé pour ne pas être pris au dépourvu.
Comment je me prépare
Faire le deuil de son identité professionnelle, quitter ses collègues et rompre avec la routine peut s’avérer difficile. Même à la veille du départ, on peut toutefois trouver des solutions visant à simplifier notre passage à la retraite. Un soutien extérieur (ateliers de préparation, conférences, livres, coaching) pourrait se révéler efficace. «Le lâcher-prise n’est pas toujours facile, particulièrement pour ceux qui ont été valorisés par le travail pendant longtemps, prévient Jeannette Lalonde. Des conseils et des outils peuvent les aider à franchir cette étape.»
3 APRÈS
Ce que je pourrais ressentir
Enfin les longues vacances où on peut voyager, se reposer ou jouer au golf sans compter son temps! Sauf qu’au bout de 6 à 12 mois, la lune de miel tire à sa fin. «Il arrive, même si on a planifié notre retraite, de vivre un profond sentiment d’inutilité, affirme Josée Blondin. On se demande à quoi on sert, où on s’en va…» La bonne nouvelle est qu’il n’est pas trop tard pour ne pas faire partie des 25 % des retraités qui traversent une dépression et pour «renouveler notre retraite», assure Jeannette Lalonde.
Les «elles» de la retraite
Les femmes semblent en général s’adapter à leur nouvelle vie plus aisément que les hommes. «Cela dépend bien entendu jusqu’à quel point elles se sont identifiées à leur travail, nuance Josée Blondin. Mais comme elles ont souvent joué plusieurs rôles à la fois et joui d’un réseau social plus élargi, elles ont plus de facilité à décrocher. Les hommes tendent à adopter un mode de vie plus casanier.»
Comment je vis au mieux ma retraite
Si on éprouve le besoin de s’inventer une nouvelle vie, un travail d’introspection s’impose… Déménager dans un autre pays, concrétiser un rêve d’enfant, retourner aux études, fonder une entreprise, à nous de voir ce qui nous fait vraiment envie.
-> J’adopte une attitude positive. On tend à broyer du noir devant tous les changements que nous fait vivre la retraite? «C’est normal d’avoir tendance au négativisme», rassure Mary Morency. D’avoir à relever les nombreux défis liés à l’âge peut semer l’inquiétude en soi. On craint l’isolement. Heureusement, la recherche a démontré qu’on peut modifier nos pensées, nos états d’âme et notre attitude de façon à envisager les événements avec positivisme, ajoute la coach. «Par exemple, au lieu de voir la retraite comme une fin, on se dit qu’il s’agit en fait d’un nouveau départ.»
-> Je dresse (et défais) ma to-do list. Tenir un agenda a du bon, à condition toutefois de l’actualiser de temps à autre. «Si on joue au golf tous les jours pendant des mois, la petite balle blanche risque de finir par nous taper sur les nerfs!», avance Josée Blondin. Il n’y a pas de mal à modifier notre plan de match en cours de retraite. Cela pourrait même servir à nous remettre sur le piton en cas de détresse ou d’ennui. On a une bucket list? «Il faut également revoir celle-ci», conseille la psychologue. Pour éviter de procrastiner, on se fixe des objectifs et des délais, à court terme idéalement. «Une bonne façon d’y parvenir est de nous écrire une lettre à nous-même en y indiquant nos projets et le temps qu’on se donne pour les réaliser. Puis on la cache ou on remet à un tiers. On la lit ensuite plus tard pour constater nos progrès.»
-> Je vais chercher de l’aide. Outre l’exercice physique (le meilleur des antidépresseurs), ainsi que la stimulation intellectuelle et sociale (des incontournables qui augmentent notre résilience), on peut se tourner vers un soutien extérieur en cas de détresse. «Il arrive parfois qu’on entretienne la pensée magique face à notre retraite, mais qu’on déchante une fois la lune de miel terminée, raconte Mary Morency. Il n’est jamais trop tard pour trouver de l’aide et des conseils qui nous aider à développer une attitude positive et à dresser un plan de match. Parfois, juste le fait de savoir que ce qu’on ressent est tout à fait normal et de partager avec d’autres dans la même situation s’avère d’un grand secours.»
-> Je fais mes devoirs
Si on veut compter parmi les retraités heureux, on travaille notre retraite sans relâche! Une bonne idée est d’imiter ce qu’on faisait au boulot, mais à notre rythme et selon nos envies, suggère Josée Blondin. Par exemple, en établissant une routine, à l’aide d’un agenda, on se tient occupé et on se sent utile. «On peut y inscrire des activités comme garder nos petits-enfants, réaliser des travaux de rénovation pour nos enfants, aller au théâtre avec des amis.» Sans oublier de réserver des moments à soi, comme se détendre au spa ou pratiquer un hobby qui nous fait du bien. On gagne aussi à développer notre réseau d’amis, en dehors de la gang du bureau si pendant des années elle a pratiquement constitué nos seuls contacts sociaux!
Par ailleurs, on peut aussi faire valoir nos compétences… sur le marché de la retraite! Non seulement le fait de rester curieux permet de stimuler les neurones, mais l’acquisition de nouvelles connaissances est tout indiquée pour rehausser l’estime de soi et limiter les risques de maladies dégénératives, tels l’Alzheimer ou le Parkinson. On n’hésite donc pas à maîtriser une autre langue et même retourner sur les bancs d’école. L’Université du 3e âge de Québec (UTAQ) et l’Université du troisième âge (UTA) se vouent d’ailleurs à l’éducation continue des tempes grises.
Et pour prouver que le travail n’est pas le seul endroit où on peut s’accomplir et se définir, Josée Blondin suggère d’illustrer dans un scrapbook certaines de nos réalisations importantes, comme un accouchement, une activité de bénévolat, un exploit sportif. Qui sait, l’expérience pourrait même nous amener à songer à d’autres projets. «La réalisation de soi peut passer par ce qu’on a vécu, mais aussi par ce qu’on a encore envie de faire», poursuit la psychologue.
-> Je me fais plaisir. «En profitant du moment présent, en se réinventant constamment et en réalisant ses rêves d’antan, on retrouve son cœur d’enfant», concluent Jeannette et Mary. Et ça, ça nous garde jeunes!
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