Quand les snowbirds ne passent plus l’hiver aux États-Unis, les effets ne sont pas que financiers

Quand les snowbirds ne passent plus l’hiver aux États-Unis, les effets ne sont pas que financiers

Par Valorie A. Crooks et Jeremy Snyder, Simon Fraser University

Crédit photo: iStock

Chaque hiver, des centaines de milliers de Canadiens retraités partent aux États-Unis. Mais ces dernières semaines, de nombreux snowbirds ont commencé à revoir leurs plans.

Nous avons d’abord entendu des témoignages de personnes qui affirmaient ne plus vouloir participer à cette migration saisonnière en raison de la situation politique aux États-Unis. La dépréciation du dollar canadien a également suscité des inquiétudes. Cette tendance en a incité plusieurs à vendre leur demeure hivernale aux États-Unis.

Plus récemment, c’est la modification des règles frontalières risquant de rendre plus difficiles les longs séjours aux États-Unis qui a retenu l’attention. Les snowbirds sont préoccupés par les exigences administratives et procédurales qui pourraient compliquer les voyages transfrontaliers.

Pendant la pandémie de Covid-19, des snowbirds canadiens ont eu de la difficulté à entrer aux États-Unis pour l’hiver ou à revenir au Canada. Toutefois, certains n’ont pas hésité à passer l’hiver aux États-Unis malgré la fermeture des frontières aux voyages non essentiels.

Selon des recherches menées dans les communautés des snowbirds, l’aspect économique et la facilité de déplacement sont deux facteurs qui favorisent les voyages saisonniers de longue durée.

Il n’est donc pas surprenant que les snowbirds fassent de nouveau parler d’eux à la lumière des récents événements.

Bouleversements économiques et politiques

Si les bouleversements liés à la pandémie n’ont pas empêché certains snowbirds de passer l’hiver dans le sud, il en va tout autrement des perturbations économiques et politiques actuelles. La Floride est une destination populaire pour les retraités canadiens. Selon une enquête réalisée en 2023, huit des dix meilleures destinations américaines se trouvent en Floride.

Si les snowbirds canadiens envisagent d’annuler leurs projets de séjour dans le sud et de vendre leurs propriétés, les habitants de la Floride devraient s’en préoccuper.

Début mars, le gouverneur de Floride Ron DeSantis a plutôt minimisé les impacts du choix des Canadiens de ne pas voyager dans son État. Citant un récent rapport de l’industrie du tourisme, il a indiqué que seuls 3,3 millions des 142,9 millions de visiteurs de la Floride en 2024 venaient du Canada.

DeSantis a ajouté que, selon lui, il ne s’agissait pas vraiment d’un boycottage. Étant donné que 91,5 % des touristes en Floride sont originaires d’autres États américains, cela signifie que les 2,3 % de Canadiens représentent en fait une part importante des visiteurs internationaux.

Les récentes déclarations de DeSantis ne correspondent pas aux préoccupations exprimées lors de la pandémie de Covid-19, qui faisaient état d’impacts importants pour la Floride si lessnowbirdscanadiens n’y passaient plus l’hiver.

Des membres de la collectivité

Outre ces retombées économiques, une chose que nous avons apprise au cours de nos années de recherche auprès des Canadiens qui passent l’hiver aux États-Unis, c’est que beaucoup d’entre eux deviennent des membres importants des collectivités de destination. Que ce soit en participant à des programmes de sensibilisation aux questions de santé publique ou en faisant du bénévolat dans des hôpitaux locaux, ils sont nombreux à saisir les occasions d’être actifs dans les endroits où ils s’installent pour l’hiver.

Toute diminution du nombre de voyageurs saisonniers vers des destinations américaines aura des coûts sociaux pour les collectivités, au-delà des pertes économiques quantifiables.

De nombreuses destinations américaines prisées par les snowbirds ont des systèmes de santé conçus pour s’étendre et se rétracter en fonction des variations saisonnières de la population. Nos recherches ont permis d’observer ce phénomène de plus près à Yuma, en Arizona, où des secteurs entiers du principal hôpital sont fermés l’été et dotés d’un personnel saisonnier en hiver.

Par ailleurs ,une partie du personnel infirmier qui arrive pour l’hiver est originaire du Canada. Tout abandon de ces destinations par les snowbirds canadiens pourrait avoir des conséquences importantes pour les systèmes de santé et les secteurs connexes. Cela peut en fin de compte avoir un impact sur la qualité des soins que recevront les patients locaux.

Autres impacts

Si l’on doit tenir compte des impacts économiques de l’absence des Canadiens qui séjournaient depuis longtemps dans ces collectivités, il est important de comprendre que d’autres impacts, moins mesurables mais tout aussi importants, se feront sentir. Tout comme la longue amitié entre les États-Unis et le Canada est aujourd’hui mise à rude épreuve, les collectivités de snowbirds composées de Nord-Américains retraités de divers horizons risquent de décliner.

Quand les snowbirds canadiens ont été moins nombreux à se rendre dans le sud pendant la pandémie, les chefs d’entreprise des destinations américaines ont déclaré avoir subi des pertes. Des collectivités et des secteurs d’activités canadiens ont constaté que ces changements dans les habitudes des consommateurs pouvaient constituer des opportunités.

À l’heure où les snowbirds se demandent s’ils veulent affronter les nouvelles complexités frontalières et retourner aux États-Unis l’hiver prochain, nous devons être attentifs aux histoires qui se cachent derrière les chiffres pour comprendre l’impact réel de leur décision. Comme les commentaires du gouverneur DeSantis et d’autres politiciens l’ont clairement montré, les snowbirds canadiens doivent désormais faire face à de nouvelles considérations économiques et émotives.The Conversation

 

Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. 

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