Vente d’une maison: mode d’emploi pour tirer le maximum des bénéfices

Vente d’une maison: mode d’emploi pour tirer le maximum des bénéfices

Par Dominique Lamy

Crédit photo: iStock

Les 25 dernières années consacrées à l’entretien de notre propriété et au remboursement de notre prêt hypothécaire tirent à leur fin. Que fait-on de la cagnotte encaissée, une fois la vente conclue?

La vente de la résidence familiale peut être l’occasion de dégager quelques centaines de milliers de dollars qu’on pourrait judicieusement investir. Quelles sont les meilleures options à considérer sur le plan financier? Les options de placement à envisager? Les planificateurs financiers Jérémie Lemieux, conseiller inscrit auprès de Gestion de Patrimoine Lemieux inc. et représentant en épargne collective inscrit auprès de MICA Capital inc., et Mylène Lapointe, représentante en épargne collective rattachée à Services en placements PEAK, partagent avec nous leurs conseils pour optimiser ce pécule.

Pas de décision précipitée

Une fois la maison vendue, la transaction notariée et les frais liés à la vente assumés, un moment de réflexion s’impose avant de décider ce qu’on veut faire avec le produit de la vente. Pour une décision éclairée, les deux experts recommandent de consulter un planificateur financier, avec lequel on pourra réviser notre plan de retraite et notre budget.

«En connaissant nos nouveaux objectifs de vie, un planificateur financier sera plus en mesure d’estimer les sommes qui peuvent ensuite être investies. Si on choisit de vendre la grande maison pour acheter un condominium ou un petit jumelé, à plus faible coût, l’excédent du prix d’achat pourrait être investi. Si on opte plutôt pour la location, une somme plus importante peut probablement faire l’objet d’une stratégie de placements», explique Jérémie Lemieux.

Même son de cloche chez Mylène Lapointe. «Cette rencontre permettra de déterminer le montant optimal qu’il sera possible de retirer annuellement. Cette somme additionnelle, qui bonifie le budget initial, est souvent utilisée pour assumer le coût du nouveau logement. Il faut aussi se garder une marge de manœuvre pour pouvoir s’offrir de l’aide à domicile et des soins de santé au moment venu.»

Jérémie Lemieux rappelle aussi que charité bien ordonnée commence par soi-même. L’analyse complète de notre situation financière devrait idéalement être revue avant de dépanner financièrement des membres de notre famille, par exemple. «Ne vous engagez pas immédiatement à donner des montants d’importance à vos enfants avant de procéder à la réévaluation de vos propres finances, conseille-t-il. Pour mieux décider, il faut prendre du recul, consulter, puis aviser.»

Réviser son bilan financier personnel

Faire un bilan, c’est calculer notre avoir net en dressant la liste de nos possessions (les actifs) et de nos dettes (le passif) à un moment précis. Réaliser cet exercice est utile pour prendre des décisions financières importantes ou élaborer des stratégies de placement. «La vente d’une résidence est l’occasion rêvée de faire le ménage de nos dettes, surtout si on possède un profil d’investissement conservateur», explique Jérémie Lemieux.

Si, dans les dernières années, on a accumulé un solde à payer sur nos cartes de crédit ou sur une marge de crédit personnelle et si on détient un emprunt automobile, il peut s’avérer judicieux d’éliminer ce passif. «Un client qui souhaite détenir uniquement des placements très sécuritaires obtient une faible espérance de rendement sur ses investissements. Si ses dettes lui coûtent entre 8% et 20% d’intérêts par année, il ne se trompe pas en acquittant d’abord celles-ci», explique M. Lemieux.

Un manque de liquidités disponibles à court terme pourrait aussi ressortir dans l’analyse de notre bilan. Or, un fonds d’urgence est utile en cas d’imprévu. «Ces sommes peuvent représenter l’équivalent de trois mois du coût de vie et doivent être accessibles rapidement», dit le conseiller.

Comparer les différentes boîtes fiscales

Pour faire travailler nos deniers, différents régimes financiers peuvent être mis à contribution. Chacun d’eux a des avantages et des inconvénients. «Je les compare à des « boîtes fiscales », en quelque sorte. À l’intérieur de celles-ci, on ajoute des produits d’investissement: des certificats de placement garanti (CPG), des actions, des obligations ou des fonds communs de placement, à titre d’exemple. Mais il faut d’abord identifier les boîtes fiscales idéales à utiliser en fonction de sa situation personnelle», explique Jérémie Lemieux.

Voici trois suggestions de régimes à prioriser.

1. Le CELI

En raison des nombreux avantages qu’il offre, Mylène Lapointe recommande de prioriser le compte d’épargne libre d’impôt (CELI). Une personne qui n’aurait jamais cotisé au régime depuis son lancement en 2009 a le droit d’y déposer une somme de 95 000$ en 2024. Un couple pourrait donc en profiter pour y diriger 190 000$, sous réserve de la limite individuelle mentionnée précédemment. «Le rendement obtenu demeure à l’abri de l’impôt et les retraits sont non imposables. Ce régime offre notamment de la flexibilité à la retraite, lorsque vient le moment d’effectuer des décaissements», explique-t-elle.

2. Le REER

Le régime enregistré d’épargne-retraite (REER) est aussi à considérer, au cas par cas. «C’est moins un automatisme que le CELI», soupèse Jérémie Lemieux. On peut d’ailleurs y cotiser jusqu’au 31 décembre de l’année où l’on atteint l’âge de 71 ans. «Par contre, il faut que l’économie d’impôt réalisée au moment de la cotisation soit supérieure à la somme d’impôt à payer au moment du retrait éventuel.» D’où l’importance d’obtenir une simulation de nos revenus de retraite avant de décider d’y cotiser ou non.

Les retraités qui peuvent déjà compter sur un régime de retraite à prestations déterminées ou qui ont la chance d’avoir des revenus importants doivent envisager cette boîte fiscale avec parcimonie. Un retrait REER qui s’ajoute au mauvais moment peut entraîner un impôt de récupération de la pension de la Sécurité de la vieillesse (IRPSV). Si nos revenus annuels dépassent le seuil de 81 761$, il faut s’attendre à devoir rembourser une partie ou la totalité de la pension de la Sécurité de la vieillesse (PSV) préalablement reçue.

3. Le compte non enregistré

Dans un compte non enregistré, le rendement n’est pas exonéré d’impôt. «Mieux vaut obtenir 6% de rendement et payer un peu d’impôt que de laisser trop d’argent dans un compte-chèques qui ne rapporte rien», nuance d’ailleurs Jérémie Lemieux. Et attention! Tout type de rendement – revenu d’intérêts, gain en capital et dividendes – occasionne un traitement fiscal différent.

«Un conseiller peut aider à choisir des produits qui distribuent des revenus fiscalement avantageux. Par exemple, dans un compte non enregistré, il est recommandé d’éviter le revenu d’intérêt, qui est 100% imposable, contrairement aux deux autres types de revenus», dit-il. Générer du gain en capital et obtenir des dividendes sont donc des choix plus avantageux dans cette boîte fis- cale. «Il faut cependant évaluer la tolérance au risque de l’investisseur, puisqu’une exposition aux actions est requise pour espérer obtenir ces types de revenus.»

Choisir ses placements avec soin

Pour déterminer avec justesse les types de placements à ajouter en portefeuille, il est essentiel de connaître notre capacité réelle à gérer le risque d’investissement. Comment procéder? En complétant notre profil d’investisseur!

Cet outil, sous forme de questionnaire, permet de déterminer la meilleure stratégie d’investissement en fonction de notre situation financière, de nos objectifs et de notre tolérance au risque. Il prend en compte plusieurs éléments importants, tels que l’âge, les revenus, le montant des économies, les objectifs à long terme, comme celui de la retraite, et notre capacité à absorber des pertes financières.

Il s’agit donc d’un point de départ dans l’élaboration de notre stratégie de placement. L’outil nous propose une répartition d’actifs, selon que l’on est conservateur ou audacieux, ou entre les deux. «Certaines personnes ont une très grande peur de perdre du capital: mieux vaut alors opter pour des produits garantis, puisqu’elles vivront difficilement le stress associé à la volatilité boursière», constate Mylène Lapointe.

Cela dit, lorsque plusieurs années nous séparent du moment où le capital devra être décaissé, il est avantageux d’investir dans les marchés financiers. On profite alors de rendements sur une plus longue période, reconnus pour être plus élevés. «Prenez le temps de discuter de votre ressenti avec votre conseiller de confiance, pour réviser votre profil d’investisseur au besoin», rappelle-t-elle.

On songe à louer?

Avant de décider, certains éléments doivent être pris en compte, dit la conseillère financière Mylène Lapointe.

«Les loyers sont très élevés aujourd’hui. Un logement qui coûte minimalement 1700$ par mois est souvent la norme. Ce retrait mensuel effectué sur une période de 10 ans représente une ponction minimale de 204 000$ dans notre bas de laine. Il est donc important d’élaborer un plan de match précis pour utiliser judicieusement les liquidités générées par la vente de la maison.»

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