La cueillette de champignons pour voir notre terroir autrement

La cueillette de champignons pour voir notre terroir autrement

Par Amélie Cloutier, Marc-Antoine Vachon et Patrick Coulombe, UQAM

Crédit photo: iStock

Le mycotourisme, ou tourisme des champignons, devient de plus en plus populaire à mesure que les gens recherchent des expériences davantage axées sur la nature.

Ce créneau touristique unique combine la cueillette guidée de champignons avec les traditions culinaires et la culture rurale afin d’offrir aux voyageurs une expérience distincte des formes de tourisme plus traditionnelles.

Le mycotourisme a un potentiel économique et environnemental significatif pour stimuler les économies locales, en particulier dans les zones rurales, tout en favorisant une connexion plus profonde entre les visiteurs et la nature. Lorsqu’il est pratiqué de manière durable, il peut également aider à conserver les écosystèmes locaux et les traditions culturelles en partageant avec le public les méthodes traditionnelles de cueillette de champignons et les connaissances écologiques.

La popularité croissance du mycotourisme reflète une tendance plus large vers le tourisme lié aux forêts et le tourisme gastronomique. Le premier comprend des activités telles que la cueillette et la récolte de produits, car les voyageurs cherchent à se rapprocher de la nature, tandis que le second implique des voyageurs à la recherche d’expériences culinaires.

Le tourisme rural, lui aussi, a suscité un intérêt croissant ces dernières années. L’Organisation mondiale du tourisme des Nations unies a désigné 2020 comme l’Année du tourisme et du développement rural. Le mycotourisme s’aligne avec cet objectif, car il est étroitement lié aux économies rurales, impliquant souvent de petites entreprises saisonnières aux multiples défis.

En réponse à cette tendance, le gouvernement du Québec a dévoilé une stratégie 2024-2029 pour établir la province comme une destination culinaire de premier plan. Le mycotourisme s’aligne parfaitement avec les objectifs culinaires et touristiques plus larges du Québec.

Mycotourisme: Un aperçu rapide

La cueillette de champignons a longtemps été pratiquée de manière informelle dans de nombreuses régions du monde. Elle évolue maintenant vers une industrie touristique formalisée, dirigée par des experts locaux et ce, afin d’en garantir la sécurité.

Des pays comme le Mexique, l’Espagne, le Portugal, l’Écosse et l’Afrique du Sud sont des pionniers dans ce marché.

L’Espagne, où le mycotourisme a vu le jour, est à la pointe avec son industrie bien établie de «micoturismo», en particulier dans la région de Castilla y León.

Au Canada, le Québec est devenu un point chaud pour le mycotourisme grâce à ses paysages naturels riches, y compris de vastes forêts et des écosystèmes diversifiés. La province a vu une demande accrue de la part des visiteurs locaux et internationaux.

Les régions de Kamouraska et de la Mauricie, en particulier, se sont imposées comme des leaders du mycotourisme en Amérique du Nord. Cette augmentation, qui a été stimulée par la pandémie de Covid-19, a positionné ces régions comme des destinations clés pour les amateurs de champignons.

Le nombre de cercles de mycologie amateur et de leurs membres a également augmenté considérablement dans la province, reflétant un intérêt croissant pour les champignons sauvages.

Cependant, malgré sa croissance, le mycotourisme reste relativement méconnu de nombreux Canadiens. Cela représente une opportunité inexploitée pour l’industrie touristique au pays.

Surmonter les défis de l’industrie

Le secteur du mycotourisme fait face à plusieurs défis, notamment des initiatives fragmentées, ce qui pose des problèmes dans des domaines tels que la promotion, l’infrastructure et le partage des connaissances.

Il est nécessaire d’améliorer la coordination entre les parties prenantes du mycotourisme. Au Québec, elles incluent des associations touristiques régionales et des associations sectorielles comme Terroir et Saveurs du Québec.

Établir une plateforme ou un réseau unifié pour les parties prenantes du mycotourisme pourrait faciliter l’échange de meilleures pratiques, améliorer la promotion et soutenir sa croissance durable.

En surveillant de près les nouvelles initiatives, les chercheurs, les entrepreneurs et les professionnels du tourisme peuvent mieux comprendre les défis et les opportunités dans ce domaine.

Cette approche collaborative permettrait d’identifier des partenaires potentiels pour de futures collaborations, de mettre en lumière des ressources et des outils, et de garantir que le développement de cette industrie respecte tous les acteurs, y compris les communautés autochtones.

Notre étude sur le mycotourisme

Notre étude récente met en lumière la croissance de l’industrie du mycotourisme au Québec. Grâce à une analyse environnementale approfondie, nous avons identifié 57 prestataires à travers la province, dont la majorité est concentrée en Mauricie et au Bas-Saint-Laurent, y compris la région de Kamouraska.

Nous avons constaté que les prestataires de mycotourisme au Québec sont des microentreprises ou de très petites entreprises, ce qui signifie que la collaboration et le réseautage sont essentiels pour soutenir leur croissance et leur durabilité.

Les activités proposées par ces prestataires se répartissent en cinq grandes catégories:

  1. Événements et apprentissage: inclut des festivals, des conférences, des sessions de formation et des cours.

  2. Expériences culinaires: comprend des ateliers culinaires et des séances de dégustation.

  3. Visites guidées et accueil: englobe des visites guidées et des événements d’accueil de groupes.

  4. Exploration de la nature et cueillette: inclut des expéditions de cueillette guidées ou en autocueillette.

  5. Hébergements avec cueillette de champignons: expériences de logement permettant aux invités de participer à la cueillette de champignons pendant leur séjour

En outre, notre étude a identifié quatre types de prestataires dans le secteur. Ceux-ci vont des entreprises individuelles spécialisées dans des activités de niche, à celles, polyvalentes, offrant une gamme diversifiée d’expériences et de services, aux entreprises légèrement plus grandes se concentrant sur des services ciblés.

Il est clair que le secteur du mycotourisme au Québec est dynamique, avec des entreprises développant continuellement des offres nouvelles et innovantes. La large gamme d’expériences proposées est conçue pour attirer de nouveaux segments de touristes intéressés par l’agritourisme, la gastronomie ou d’autres hébergements uniques.

Exploiter le potentiel du mycotourisme

Alors que le mycotourisme continue de croître, il est crucial que les initiatives à petite échelle dans ce secteur obtiennent un soutien et une reconnaissance plus substantiels de la part du secteur touristique, des organisations régionales et des agences gouvernementales.

Sans ce soutien, ces entreprises peuvent avoir du mal à surmonter des défis tels que la visibilité limitée, les efforts fragmentés et les ressources insuffisantes. Si ces défis ne sont pas relevés, cela pourrait freiner la croissance du secteur et sa capacité à contribuer aux économies locales et au développement rural.

Avec ses vastes forêts, sa riche biodiversité et ses secteurs de l’agritourisme et de la gastronomie en développement, le Canada est bien positionné pour s’établir comme une destination de choix pour les amateurs de champignons. Mais pour réaliser pleinement son potentiel, le Canada doit créer un environnement qui favorise l’innovation, la collaboration et l’investissement dans le mycotourisme.La Conversation Canada

 

Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. 

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