La publicité dit: «Louez pour seulement 199$ par mois», alors que la mensualité d’achat pour le même véhicule demande près du double? Attention: petite mensualité n’est pas synonyme de faible coût, prévient Éric Brassard, planificateur financier chez Brassard, Goulet, Yargeau et auteur du livre Finance au volant.
Même que c’est une grossière erreur de penser que la location «ne coûte pas cher». On s’en rend compte quand on regarde au-delà de la mensualité demandée, en commençant par l’un des éléments les plus importants du procédé: le taux d’intérêt. Ainsi, on notera au passage que les taux d’intérêt de la location sont souvent plus élevés que ceux de l’achat. Et, en bon consommateur, on se rappellera que idéalement, mieux vaut miser sur le plus petit taux d’intérêt possible.
Mais les modèles loués semblent financièrement plus «accessibles»? C’est logique: en location, on ne paie qu’un temps (déterminé) d’utilisation du véhicule. Mais voilà qui n’en réduit pas le coût véritable pour autant. Souvenez-vous qu’en fin de bail le «petit paiement» aura représenté plusieurs milliers de dollars versés… pour une voiture qui ne vous appartient pas.
Vous voulez la rendre? Il faudra veiller à ce que les éraflures et l’usure des pneus ne soient pas au-delà de la normale. Ou que le kilométrage qui vous a été alloué ne soit pas allègrement dépassé. Vous voulez la conserver? Vous devrez en débourser la valeur résiduelle – une somme qu’il vous faudra bien trouver quelque part…
Quand la location à long terme fait du sens
Après avoir lu «Cette dépréciation qui fait mal», vous comprendrez que ce qui est généralement le plus sensé, économiquement parlant, c’est de conserver sa voiture: «La seule manière d’amoindrir le choc de la dépréciation, c’est de la répartir sur le plus grand nombre d’années possible», soutient Éric Brassard. Cela dit, il arrive que la location ait autant, sinon plus de sens que l’achat. Ainsi, les travailleurs autonomes et entrepreneurs savent que fiscalement, il est souvent plus avantageux de louer. Il existe d’autres circonstances où la location est plus intéressante qu’un achat. Voici lesquelles. . .
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1- Quand le taux est plus avantageux
Les taux d’intérêt varient grandement selon les termes d’achat ou de location, mais aussi les marques, voire les différents modèles d’une même marque. Et il arrive que le taux de location est le même, ou encore qu’il est meilleur que celui de l’achat.
Ça devient alors une possibilité à considérer: «Car à taux semblables, la location et l’achat sont deux options qui s’équivalent, dit M. Brassard. De fait, la location constitue un mode d’emprunt comme un autre, mais dont le solde n’est pas nul à l’échéance.»
Ce mode d’emprunt, il faut néanmoins l’utiliser intelligemment. Ainsi, l’argent dégagé pourra être versé dans un REER, qui fera épargner de l’impôt. Ou encore placé dans un CELI qui fait des petits à l’abri du fisc, histoire d’avoir sous la main de quoi racheter la voiture en fin de bail.
Attention, toutefois: avec ses (plus) faibles mensualités et ses tours de passe-passe du genre «paiements hebdomadaires», la location ouvre la porte à la tentation d’une voiture plus grande, mieux équipée, plus luxueuse… et plus chère. C’est bien beau, une «BMW pour seulement 150$ par semaine», mais on ne doit pas oublier que plus on va vers le haut de gamme, plus l’entretien coûte cher.
2- Quand le budget est très «serré»
3- Quand on veut changer de voiture comme de chemise
Pour ceux qui aiment changer de voiture comme de chemise, la location a un net avantage sur l’achat : elle établit à l’avance ce que vaudra le véhicule à la fin du bail. La voiture s’avère un citron ou a dû être réparée après une collision? Un propriétaire devra fort probablement essuyer une perte à sa revente, mais le locataire aura l’avantage de pouvoir s’en débarrasser simplement en rendant les clés – sans se soucier de faire sa mise en marché, de rencontrer les acheteurs, d’en négocier le prix…
Reste que ceux qui louent à perpétuité subissent encore et toujours la dépréciation, si coûteuse lors des premières années d’un véhicule. De même, ils contractent de sempiternelles dettes automobiles, en plus de payer des intérêts pour l’éternité. N’est-ce pas Woody Allen qui disait: «L’éternité, c’est long… surtout vers la fin»?
Cette dépréciation qui fait mal
Vous savez ce qui coûte le plus cher, en matière automobile? Plus que l’entretien, bien plus que le carburant et même plus que les réparations? C’est la dépréciation. Ce n’est pas là un mythe: Dennis DesRosiers, grand manitou de la statistique automobile au Canada, rapporte que, selon les modèles, un véhicule acheté neuf aura, trois à cinq ans plus tard, perdu la moitié de sa valeur.
Certes, l’automobiliste ne reçoit pas une facture où le montant de la dépréciation est inscrit en gros chiffres. Mais la note est quand même salée. Voyez notre tableau comparatif entre un acheteur qui, pendant 12 ans, fait durer sa voiture, réparations et entretien compris, et un automobiliste qui, pendant cette même période, loue trois voitures neuves.
La somme épargnée par le premier consommateur, qui conserve et entretient sa voiture sur plus d’une décennie, est majeure : à peu près le coût de la voiture compacte elle-même (ajusté en dollars d’aujourd’hui).
Financer sur sept ou huit ans… à éviter!
Financer sa voiture pendant sept ou sur huit ans? Généralement, on est perdant, pour la simple et bonne raison que les intérêts sont souvent plus élevés et, surtout, qu’ils courent plus longtemps.
Vrai qu’avec leur fiabilité d’aujourd’hui, les voitures se prêtent à des termes de 84 ou même 96 mois. Et soyons clairs: si les constructeurs proposaient leurs modèles à 0% de financement sur huit ans, on serait fou de ne pas en profiter.
Mais les vrais 0% sur de si longs termes sont rares*. Et on ne doit pas se laisser berner non plus par des mensualités qui semblent toutes petites : en les additionnant, on découvrira à quel point les intérêts galopent.
Et puis sept ans… huit ans… C’est dire que vous payez (encore) pour un véhicule dont la garantie est échue. Pas très intéressant de devoir régler, en plus des mensualités, le coût des réparations…
Notre conseil ? Optez pour le plus petit taux et le plus petit terme possible.
*Attention: un petit taux de financement n’en est plus un si, pour la même transaction payée au comptant, un rabais en argent sonnant vous aurait été accordé. Une voiture compact (prix d’une version bien équipée: 20 000$) s’offre à 1,99% sur cinq ans, mais la payer au comptant apporte une réduction, avant taxes, de 1500$ ? Voilà qui signifie que vous êtes plutôt en présence d’un taux de financement de deux à trois fois plus élevé qu’annoncé – de 5,3%, pour être très précis.
Racheter son véhicule loué? Pourquoi pas…
En fin de location, votre véhicule vaut moins sur le marché que ce qu’il vous faut verser pour le garder, et votre première impulsion est de vous en débarrasser. Mais… «pas si vite», dit le planificateur financier Éric Brassard.
Est-ce que votre véhicule vous convient toujours? En êtes-vous encore satisfait? Est-il fiable? Si la réponse à ces questions est «Oui», vous pourriez avoir avantage à le racheter. Voilà qui vous protégerait d’une autre forte dépréciation (accompagnant l’acquisition d’une autre voiture neuve), de même que d’intérêts (sur un plus gros montant) et de primes d’assurances plus élevées.
Votre véhicule a parcouru beaucoup moins – ou beaucoup plus – de kilomètres que prévu à votre contrat de location? Raison de plus pour le garder. Dans le premier cas, vous vous assurez de consommer ce pour quoi vous avez déjà payé. Et dans le second scénario, vous évitez de payer l’excédent.
Attention toutefois de ne pas tomber dans les extrêmes. Certes, «à moins de 2 000$, on ne se pose pas la question, dit M. Brassard. Mais entre 2 000$ et 3 000$, c’est la zone grise. Et ça devient une mauvaise affaire si la valeur marchande est très réduite par rapport à la dette qu’il reste à payer.»
Finance au volant, par Éric Brassard (Brassard, Goulet, Yargeau), février 2003, 25,95$. www.ericbrassard.com
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