Pour choisir le régime qui nous rapportera davantage, il faut se fier à des critères précis. Conseils d’experts et pistes de réflexion pour nous aider à prendre la meilleure décision.
Les experts invités
Mylène Lapointe, planificatrice financière, conseillère en sécurité financière et représentante en épargne collective rattachée à Services en placements PEAK.
Jean-François Vinet, conseiller en placements et planificateur financier affilié à Gestion de capital Assante ltée.
Plusieurs régimes financiers disponibles au Canada peuvent faire fructifier nos deniers. Le compte d’épargne libre d’impôt (CELI) et le régime enregistré d’épargne-retraite (REER) sont deux de ces «boîtes fiscales». Elles permettent d’accueillir des produits d’investissement sélectionnés avec soin: des certificats de placement garanti (CPG), des actions, des obligations ou des fonds communs de placement, à titre d’exemple.
Cela dit, en raison des nombreuses particularités de chaque régime et de la complexité du système fiscal canadien, le choix d’investir dans le CELI ou dans le REER (ou dans les deux!) mérite réflexion. Alors que la traditionnelle «campagne REER» bat son plein, les planificateurs financiers Mylène Lapointe et Jean-François Vinet dévoilent quelques-uns des critères à considérer pour nous permettre de trancher entre le CELI et le REER.
1. Le nombre d’années d’ici la retraite
REER
Il est possible de cotiser à celui-ci jusqu’au 31 décembre de l’année où l’on atteint l’âge de 71 ans, et de cotiser au REER de notre conjoint si celui-ci n’a pas encore atteint l’âge limite. Si la date fatidique approche, il peut s’avérer judicieux de cotiser dès maintenant au REER pour obtenir un avantage fiscal immédiat.
CELI
Il n’y a pas de limite d’âge pour y effectuer des cotisations et des retraits. Peu importe le nombre d’années qui nous séparent de la retraite, le CELI peut être un choix gagnant. Et les liquidités déposées temporairement dans celui-ci peuvent, de toute façon, être éventuellement dirigées au REER.
2. La différence entre le taux d’imposition actuel et futur
REER
Les contributions au régime réduisent le revenu imposable. Elles permettent ainsi de bénéficier d’un report d’impôt jusqu’au retrait des fonds. Pour que le choix d’y investir soit avantageux, notre taux d’imposition actuel doit être plus élevé que celui prévu au moment de la retraite.
CELI
Les cotisations ne réduisent pas le revenu imposable, certes, mais les retraits et le rendement ne sont pas imposables, ce qui simplifie le calcul. Par conséquent, si on prévoit déjà pouvoir compter sur des revenus importants au moment de la retraite (le taux d’imposition futur risque d’être plus élevé qu’actuellement), le CELI mérite certainement d’être considéré.
3. Une occasion unique de maximiser l’économie d’impôts
REER
Ce régime permet d’accumuler les droits de cotisation inutilisés des années antérieures. Si un boni, un paiement forfaitaire d’heures supplémentaires ou une promotion ont augmenté le montant de notre compte de banque (et celui inscrit sur le T4), une bonne idée serait alors de maximiser la cotisation REER de l’année en question pour obtenir un remboursement d’impôt substantiel.
CELI
Bien que les cotisations ne réduisent pas le revenu imposable, le CELI peut néanmoins être complémentaire au REER. Une fois le remboursement d’impôt obtenu, investissons-le dans le CELI pour faire croître notre pécule à l’abri de l’impôt.
4. L’impact financier des retraits éventuels
REER
Les retraits du REER viennent augmenter le revenu familial. Or, la générosité de certaines prestations de retraite, comme la pension de la Sécurité de la vieillesse (PSV), diminue avec l’augmentation du revenu imposable à partir de 90 997 $ par année, en raison de l’impôt de récupération de la pension de la Sécurité de la vieillesse (IRPSV). Finalement, les retraits REER peuvent aussi faire diminuer les montants attribués du Supplément de revenu garanti (SRG), et même faire perdre notre admissibilité.
CELI
Les retraits effectués sont non imposables et donc sans effet sur les prestations gouvernementales. Si la planification financière de notre retraite repose essentiellement sur ces rentes, mieux vaut probablement investir en amont dans ce régime, surtout si le REER a déjà accueilli des cotisations par le passé.
5. La souplesse au moment des retraits
REER
Tous les retraits sont imposables, à moins d’utiliser le Régime d’accession à la propriété (RAP) ou le Régime d’encouragement à l’éducation permanente (REEP). Et l’épargnant qui doit convertir son REER en fonds enregistré de revenu de retraite (FERR) après 71 ans doit ensuite prévoir, dès l’année suivante, de retirer le montant minimum annuel requis du FERR. Or, en règle générale, les montants encaissés d’un FERR sont imposables dès qu’on les reçoit.
CELI
L’argent peut être retiré à tout moment et ce, sans ponction fiscale. En début d’année, nos droits de cotisation sont d’ailleurs majorés du montant total des retraits du CELI effectués au cours de l’année précédente. Donc, contrairement à ce qui prévaut au REER, un retrait n’entraîne pas l’élimination du droit de cotisation qui lui est associé.
6 Un besoin de liquidités à court terme
REER
Si l’on ne prévoit pas avoir besoin de liquidités à court terme et que notre objectif principal d’épargne est de préparer financièrement notre retraite, le REER peut être la meilleure option à envisager, au cas par cas.
CELI
En revanche, si l’on prévoit avoir besoin d’argent à court ou moyen terme pour des dépenses importantes – un voyage, des réparations sur la voiture ou des rénovations à la maison, à titre d’exemple –, le CELI demeure le choix idéal pour nous permettre d’effectuer le retrait voulu au moment opportun sans subir la ponction fiscale.
7. Les objectifs de transmission de patrimoine
REER
La clôture d’un REER au décès est imposable. L’impôt à payer se calcule sur la juste valeur marchande du REER à encaisser. La facture peut être salée! Seule exception: le roulement du REER au conjoint ou le transfert aux survivants admissibles. Si on lègue notre REER ou notre FERR à notre conjoint, celui-ci peut transférer les fonds dans son propre régime enregistré à notre décès. Il n’aura pas d’impôt à payer, tant qu’aucune somme n’est retirée, bien évidemment.
CELI
Au moment du décès, les sommes déposées dans un CELI deviennent accessibles à la succession, sans impact fiscal. L’héritier qui les dépose dans son propre CELI doit veiller à ne pas dépasser son plafond de cotisation. Le conjoint survivant peut se prévaloir d’une cotisation dite «exclue», c’est-à-dire qu’il a la possibilité de transférer le solde actuel du CELI dans son régime, même si l’ensemble de ses droits de cotisation est déjà utilisé. L’appréciation du capital qui survient entre la date de décès et la date du règlement de la succession demeure cependant imposable.
Toujours indécis?
Voici le résumé des critères selon votre situation.
Choisissez le REER si:
• Vous êtes dans une tranche d’imposition élevée et avez besoin d’économies fiscales immédiates.
• Vous épargnez spécifiquement pour la retraite et n’avez pas besoin d’accéder à vos fonds à court terme.
• Vous avez des droits de cotisation REER inutilisés et voulez maximiser votre épargne-retraite avant de devoir convertir votre pécule en FERR.
• Vous prévoyez recourir au RAP ou au REEP dans un avenir rapproché.
Choisissez le CELI si:
• Vous souhaitez obtenir de la flexibilité pour effectuer des retraits, sans devoir sortir la calculatrice fiscale à chacun d’eux.
• Vous voulez éviter d’augmenter votre revenu imposable et affecter le montant de vos prestations de retraite.
• Vous avez déjà maximisé vos cotisations REER ou êtes dans une tranche d’imposition basse.
• Vous prévoyez léguer une somme importante à une personne autre que votre conjoint au moment de votre décès.