Dans un couple, l’argent est un fréquent sujet de discorde, et les conjoints retraités n’échappent pas à la règle! Ces conseils vous aideront à effectuer un partage plus égal des revenus et des dépenses.
Pour bien des couples, le passage à la retraite est un terrain miné. Il y a bien sûr le moment où chacun décide de quitter le marché du travail – un départ qui ne sera pas nécessairement synchronisé – mais aussi l’épineuse question financière.
À ce chapitre, les embûches sont multiples. En effet, l’épargne retraite peut différer grandement entre les conjoints, ce qui crée des enjeux de gestion budgétaire. Qui paye quoi et dans quelles proportions, fiscalité, planification, comptes bancaires, etc. Voici tout ce qu’il faut savoir pour assurer un relatif équilibre entre conjoints.
S’ENTENDRE SUR LES OBJECTIFS DE RETRAITE
Ouvrir le dialogue sur ce qu’on attend de la retraite, sur nos besoins et nos objectifs est l’une des clés du succès. Et mieux vaut s’y prendre plus tôt que tard, conseille Isabelle Bérard, planificatrice financière et représentante en épargne collective chez Gestion financière Assante ltée, Major Gestion Privée. «Dans ma pratique, je constate que parler d’argent dans le couple est toujours un sujet sensible. Or, certains n’en ont jamais discuté durant leur vie active, et lorsqu’ils se retrouvent à la retraite, ils réalisent qu’ils auraient dû le faire afin de mieux planifier cette période», dit-elle.
La conférencière et formatrice Véronique Joanis abonde dans le même sens. «Pour éviter les mauvaises surprises, on devrait aborder la question bien avant et men- tionner à l’autre ce que l’on souhaite. Par exemple, si l’un rêve de passer six mois par année en Floride, alors que l’autre préfère rester à la maison, il faudra faire des compromis. Les besoins en épargne diffèrent aussi en fonction des projets», explique-t-elle.
Elle ajoute qu’un déséquilibre entre les montants disponibles à la retraite – un généreux fonds de pension comparativement aux rentes gouvernementales uniquement – génère aussi des inquiétudes chez les conjoints. «Il faut échanger sur nos craintes et nos insécurités respectives et faire preuve d’empathie financière», souligne- t-elle. Plusieurs stratégies permettent aussi de rééquilibrer les revenus de retraite, d’où l’importance d’en discuter.
FAIRE UN BUDGET
Durant la vie active comme à la retraite, établir un budget est indispensable. «Grâce à celui-ci, on pourra établir clairement quels sont les revenus de chacun, mais aussi quelles sont les dépenses communes et personnelles», détaille Barbara Demers, conférencière et formatrice en bien-être financier.
À partir de là, il sera possible de fixer la participation de chacun. On peut avoir recours à différentes méthodes: déposer tous les revenus dans un compte conjoint et payer les dépenses à partir de celui-ci; séparer les dépenses 50/50; diviser les dépenses au prorata des revenus, etc. «Personnellement, je recommande le prorata, surtout s’il existe une différence entre les revenus des conjoints. C’est plus équitable ainsi», estime Barbara Demers.
Même son de cloche du côté d’Isabelle Bérard, qui remarque également que pour les couples en union de fait, la mise en commun des ressources n’est pas nécessairement la meilleure option. «En cas de rupture, cette formule sera désavantageuse pour le conjoint qui détient le moins d’actifs puisqu’il n’y aura pas de partage du patrimoine familial comme pour les couples mariés», précise-t-elle.
FLEXIBILITÉ ET RÉVISION DU BUDGET
La flexibilité est de mise tout au long de cet exercice. «La retraite ne signifie pas la fin des discussions sur l’argent, bien au contraire. De plus, il peut y avoir des fluctuations durant les 5 à 10 premières années. Par exemple, le conjoint décide de retourner sur le marché du travail à temps partiel, de reporter son RRQ, etc. On doit donc mettre à jour le budget régulièrement pour s’assurer qu’il cor- respond encore à la réalité et l’adapter le cas échéant», précise Véronique Joanis.
Elle mentionne que, pour éviter les frustrations, il est d’ailleurs préférable de miser sur un objectif de satisfaction de 80 % entre les conjoints, plutôt que de 100%. Ce budget devrait être réévalué une fois par an ou chaque fois que les revenus ou les dépenses varient.
COMPTE BANCAIRE CONJOINT OU COMPTES SÉPARÉS?
Le compte conjoint est indispensable pour les couples qui mettent en commun leurs revenus et leurs dépenses, puisque tout transitera par celui-ci. Dans les autres cas de figure – partage au prorata ou 50/50 –, on peut ouvrir un compte conjoint pour les dépenses communes et conserver un compte bancaire personnel pour ses propres dépenses. «L’important est que les deux conjoints se sentent à l’aise dans le mode de fonctionnement choisi», dit Isabelle Bérard.
Lorsque les projets de retraite sont très différents, Véronique Joanis conseille fortement de détenir ces deux types de comptes, afin que chacun puisse se sentir libre de dépenser son argent en fonction de ses souhaits et besoins, pour autant qu’il fasse sa part pour le paiement des dépenses communes.
Bon à savoir: depuis 2022, les comptes conjoints ne sont plus gelés en cas de décès de l’un des détenteurs.
MAXIMISER LA FISCALITÉ
Le fractionnement des revenus de pension est une excellente façon de réduire le fardeau fiscal global du couple. Il permet au conjoint qui perçoit les montants les plus élevés de partager jusqu’à 50% du revenu admissible avec son partenaire. «Il ne s’agit pas de lui donner de l’argent en tant quel tel, mais seulement d’une écriture sur la déclaration d’impôt», indique Isabelle Bérard. Les revenus peuvent être issus d’un fonds de pension d’un employeur, de REER convertis en FERR ou provenir d’un régime de participation aux bénéfices. La pension de la Sécurité de la vieillesse (SV) est exclue du fractionnement, de même que le Supplément de revenu garanti. Au niveau fédéral, on peut fractionner son revenu de retraite à partir de 60 ans, mais il faut patienter jusqu’à 65 ans au provincial.
Il est également possible de fractionner le RRQ, mais dans ce cas, l’argent est réellement versé au conjoint. «La proportion du partage est calculée par Retraite Québec en fonction de la durée du couple», explique Isabelle Bérard.
Séparer ses revenus de retraite avec son conjoint permet non seulement de réduire la facture fiscale, mais aussi d’éviter l’impôt de récupération de la pension de la SV, qui débute à partir de 90 997$ (2024) de revenus imposables et augmente progressivement.
Autre bon conseil: un planificateur financier mettra en place une stratégie plus avantageuse de décaissement de nos avoirs. N’hésitons pas à y recourir.
PRÉPARER LES DOCUMENTS LÉGAUX
Préparer son testament, de préférence notarié, est un incontournable pour protéger son conjoint, en particulier si le couple n’est pas marié. «Toutefois, certains éléments n’entrent pas dans le patrimoine familial, même pour les personnes mariées, le CELI par exemple. Il faut donc l’indiquer dans son testament», fait valoir Barbara Demers.
À ne pas oublier: le mandat de protection, lequel prévoit qui prendra soin de nous et de nos biens en cas d’invalidité.
ANTICIPER LES IMPRÉVUS
Parce que les choses ne se déroulent pas nécessairement comme prévu, mieux vaut se montrer proactif et constituer un fonds d’urgence contenant l’équivalent de trois à six mois de dépenses. «Cela évitera de s’endetter si on fait face à des frais importants, en raison de travaux de rénovation ou de problèmes de santé, par exemple. En vieillissant, être endetté constitue un stress important qu’on préfère éviter», prévient Barbara Demers.
Comment on fait pour calculer au prorata?