Les conséquences de notre alimentation riche en sucre raffiné ne sont plus à démontrer : mauvais cholestérol et risque plus élevé de diabète, d’obésité et de maladies cardiaques. Pour réduire ces risques, plusieurs se tournent vers des succédanés de sucre. Un bon choix, se demande le Détecteur de rumeurs?
Trois types d’alternatives
On les reconnait sous plusieurs appellations : aspartame, sucralose, stévia, sorbitol. Les succédanés de sucre constituent un marché en croissance rapide: on estime que plus de 23 000 produits vendus à travers le monde en contiendraient, dont des boissons gazeuses, des yogourts aromatisés, de l’eau pétillante et des fruits en conserves.
Les alternatives au sucre se classent en trois catégories:
- Les édulcorants artificiels : l’aspartame, le sucralose (Splenda), l’acésulfame-potassium (Ace-K) et la saccharine en font partie. Ce sont des sucres dits artificiels puisqu’ils sont synthétisés en laboratoire. Ils sont de 200 à 600 fois plus sucrés que le sucre blanc. Il faut si peu de calories pour obtenir une saveur sucrée que l’impact calorique est négligeable.
- Les édulcorants naturels : ils incluent la stévia, le fruit de moines et le sirop de Yacon. Comme les édulcorants artificiels, ils ne produisent aucune calorie. Ils sont dérivés de plantes et sont considérés pour cette raison comme « naturels », mais certains d’entre eux, comme la stévia, doivent passer par un processus d’extraction chimique pour concentrer la saveur sucrée.
- Les sucres-alcool (ou polyalcools) : l’érythritol, le mannitol, le sorbitol et le xylitol sont des produits dérivés de l’amidon, mais qui sont beaucoup moins sucrés que ce dernier et contiennent peu de calories. Les polyalcools, particulièrement le xylitol, pourraient prévenir la carie dentaire et ils sont donc fréquemment utilisés dans les gommes à mâcher.
Des édulcorants qui trompent notre cerveau
Parmi ces alternatives, y en a-t-il à privilégier? Ou au contraire, une dont il faut se méfier pour notre santé? Pour y répondre, il faut comprendre la façon dont notre corps réagit lorsqu’on lui donne du sucre. Ce dernier est transformé en glucose, une molécule riche en calories, donc riche en énergie: notre cerveau en raffole puisqu’il constitue son principal carburant. D’un point de vue évolutif, l’humain a développé une tendance naturelle vers les aliments contenant du sucre pour assurer sa survie (pour aller plus loin, lire On ne peut pas vivre sans sucre?).
Notre corps ne réagit pas de la même façon lorsqu’on lui présente de faux sucres. Dans le cas des édulcorants artificiels et naturels sans calorie (les catégories 1 et 2), ils trompent le cerveau. Ils goûtent le sucre, de sorte que nos papilles gustatives captent le message qu’une source d’énergie est en route.
Mais lorsqu’ils atteignent notre système digestif, le cerveau comprend qu’il a été berné puisqu’il n’a aucune calorie à se mettre sous la dent.
On ne connait pas encore les effets à long terme de cette ruse sur notre métabolisme. Toutefois, en 2022, une étude française qui avait suivi plus de 100 000 participants pendant 12 ans, a observé une augmentation des maladies cardiovasculaires dès que la consommation quotidienne de ces édulcorants excédait 80 milligrammes, soit l’équivalent de la moitié d’une canette de boisson gazeuse. Ce risque n’était pas présent chez ceux qui en consommaient occasionnellement.
Quant aux sucres-alcools, qui constituent la troisième catégorie, ils sont à consommer avec modération, puisqu’ils peuvent fermenter dans l’estomac et créer des problèmes intestinaux comme des ballonnements et un effet laxatif. Il est suggéré de limiter la consommation quotidienne à 10 grammes. En février 2023, une étude américaine suggérait même que l’érythritol, ingéré en grande quantité, pourrait augmenter les caillots sanguins, particulièrement chez les individus à risque d’accident vasculaire cérébral ou de crise cardiaque.
Le mirage de la perte de poids
Plusieurs consommateurs utilisent ces produits pour un meilleur contrôle de leur poids corporel. Qu’en est-il?
Les données sont encore mitigées à ce sujet. À court terme, il semble que de remplacer les boissons sucrées par des boissons artificiellement sucrées entraînerait une perte de poids. La transition vers des boissons en version « diète » serait particulièrement bénéfique chez les personnes avec un niveau élevé de graisse abdominale. Même s’il était vrai que ça entraîne une perte de poids, celle-ci serait bien moindre que chez les personnes qui consommaient des boissons sucrées. Mais à plus long terme, soit au-delà d’un an, ces bénéfices semblent disparaitre et pourraient même être liés à un gain de poids, concluait une méta-analyse parue en 2017.
Une revue systématique de la littérature conduite par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) en 2022 a pour sa part mené à l’adoption de nouvelles lignes directrices: depuis mai 2023, l’OMS conseille de ne pas consommer les édulcorants non sucrés dans le but de perdre du poids et recommande plutôt de se tourner vers la consommation d’aliments contenant des sucres naturellement présents, comme les fruits, ou d’aliments et de boissons non sucrés. L’organisation souligne également les effets indésirables potentiels liés à une utilisation prolongée des succédanés, tels qu’un risque accru de diabète de type 2, de maladies cardiovasculaires et de mortalité chez les adultes. Étant donné que le niveau des preuves menant à ces recommandations variait de «très faible» à «faible», la recommandation a été évaluée comme conditionnelle.
Les lignes directrices de l’OMS ne concernent toutefois pas les sucres-alcool et ne s’adressent pas non plus aux personnes diabétiques qui pourraient bénéficier de ces substituts, elles qui doivent contrôler le taux de sucre circulant dans leur sang. En effet, les sucres-alcools et les édulcorants artificiels, incluant la stévia, ont peu ou pas d’effet sur la glycémie. Diabète Canada les autorise, tout en mettant en garde de respecter la dose journalière admissible.
Verdict
L’alternative parfaite au sucre blanc n’existe pas. Les édulcorants devraient être consommés avec modération, tout comme le sucre raffiné. Ils ne constituent pas une solution pour manger plus d’aliments sucrés.
Toutefois, à moins d’une condition médicale particulière comme le diabète, s’ils sont intégrés dans notre alimentation avec parcimonie, les sucres ou substituts de sucre ne sont pas nécessairement dangereux pour notre santé: ils peuvent faire partie d’une alimentation équilibrée.
Lorsque j’ai découvert que mon conjoint était pré-diabétique, j’ai tout simplement coupé la quantité de sucre au lieu d’utiliser un édulcorant ou autre. Même s’il ne l’est plus, dans tous les desserts où il y a du sucre, n’importe la quantité, je mets une cuillère à soupe et moins. Nous ne voyons pas la différence. Au contraire, nous trouvons que les desserts sont plus goûteux.