On estime que près de 70% de la population sera confrontée à un épisode de douleur à l’épaule au cours de sa vie. En soi, cette douleur ne poserait pas de problème si elle disparaissait aussi vite qu’elle apparaît. Malheureusement, elle a tendance à persister dans le temps. Chez la moitié des patients, la douleur persiste ou réapparait un an après son apparition initiale. Elle peut même persister plusieurs années dans certains cas.
On considère que 70% des épisodes de douleur à l’épaule qui nécessitent une consultation auprès d’un professionnel de la santé peuvent être identifiés comme une douleur à l’épaule liée à la coiffe des rotateurs. Celle-ci fait référence à une douleur et une perte de fonction de l’épaule, principalement lors des mouvements nécessitant de lever le bras. Bien que plusieurs options efficaces s’offrent aux patients, un tiers d’entre eux ne constateront pas de changement significatif dans leur condition, et ce, peu importe les interventions utilisées.
Plusieurs raisons pourraient expliquer ce succès limité. Le choix des exercices prescrits et certaines caractéristiques psychologiques et contextuelles propres à chaque individu ont été identifiées comme des hypothèses potentielles.
Experts sur la douleur à l’épaule, nous proposons d’apporter un éclairage sur l’efficacité de diverses interventions pour la prise en charge de la douleur à l’épaule, et le rôle que certaines variables peuvent jouer dans la résolution de cette douleur.
Des questions importantes
Notre équipe de chercheurs s’est donc intéressée à savoir:
-
S’il fallait prioriser un type d’exercices plutôt qu’un autre pour la prise en charge de la douleur à l’épaule.
-
Si l’ajout d’exercices (la bête noire de plusieurs personnes qui consultent un professionnel de la réadaptation) menait à des bénéfices supplémentaires en comparaison à une intervention ne comprenant que de l’éducation et des conseils favorisant l’autogestion de la douleur.
-
Si certaines caractéristiques psychologiques et contextuelles, telles que les attentes des participants quant à l’efficacité de l’intervention ainsi que l’auto-efficacité face à la douleur, sont associées à un meilleur pronostic.
L’auto-efficacité face à la douleur est le niveau de confiance d’une personne quant à sa capacité à vaquer à ses activités et atteindre ses buts malgré la douleur.
Comment avons-nous tenté de répondre à ces questions?
Dans le cadre de notre nouvelle étude publiée dans le British Journal of Sports Medicine, 123 personnes présentant une douleur à l’épaule depuis plus de trois mois ont été assignées aléatoirement à l’une des trois interventions de 12 semaines :
-
Éducation.
-
Éducation combinée à des exercices de contrôle moteur.
-
Éducation combinée à des exercices de renforcement.
Des questionnaires ont été utilisés afin de suivre les changements de la condition des participants dans le temps, notamment au niveau de leur douleur et de leurs capacités fonctionnelles.
Avant le début de l’intervention, nous avons aussi utilisé des questionnaires pour mesurer les attentes des participants quant à l’efficacité de l’intervention qu’ils allaient recevoir, ainsi que leur niveau d’auto-efficacité face à la douleur.
Quel était le contenu de chacun des groupes?
Éducation
Les participants de ce groupe ont reçu deux séances d’éducation et de conseils dispensées par un physiothérapeute. A noter qu’en France, ces fonctions sont généralement assurées par un kinésithérapeute. Les informations portaient sur l’épaule et la douleur, et les conseils incluaient des stratégies pour favoriser l’autogestion de leur condition.
Les participants étaient également informés sur l’importance d’être actif et d’adopter un mode de vie sain pour optimiser la prise en charge de la douleur persistante, comprenant notamment une alimentation adéquate, une bonne hydratation, la gestion du stress et une bonne hygiène de sommeil.
Enfin, les participants devaient visionner six courtes vidéos sur ces thèmes.
Après le visionnement, ils devaient identifier les aspects qu’ils jugeaient importants et ceux qui suscitaient des questions afin d’en discuter avec le physiothérapeute.
Éducation combinée à des exercices de contrôle moteur
En plus de bénéficier de cette éducation, les participants de ce groupe ont suivi un programme d’exercices de 12 semaines.
Les exercices comprenaient des modifications dans la façon d’effectuer leurs mouvements visant à leur permettre de bouger leur bras avec moins de douleur. Ces modifications étaient intégrées à des exercices reproduisant les gestes impliquant l’épaule lors des activités quotidiennes.
Éducation combinée à des exercices de renforcement
Encore une fois, les participants de ce groupe ont reçu la même composante d’éducation.
Ils ont aussi reçu un programme de renforcement des muscles de l’épaule à réaliser tous les jours pendant 12 semaines.
Quels sont les résultats de notre étude?
À la fin de l’étude, les participants des trois groupes ont démontré des améliorations au niveau de leur douleur et de leur fonction. Toutefois, l’ajout d’exercices (contrôle moteur ou renforcement) à l’intervention d’éducation n’a pas mené à des bénéfices supplémentaires.
Par ailleurs, les personnes recrutées dans l’étude dont les symptômes étaient considérés comme résolus à la suite de la prise en charge de 12 semaines avaient des attentes plus positives envers l’efficacité de leur intervention et avaient un niveau plus élevé d’auto-efficacité face à la douleur.
Ce qu’il faut retenir
L’ajout d’exercices de renforcement ou de contrôle moteur à une intervention éducative n’a pas résulté en des bénéfices supplémentaires par rapport à une approche basée uniquement sur l’éducation et les conseils. Pour certaines personnes présentant une douleur persistante à l’épaule, de l’éducation et des conseils privilégiant l’autogestion de la douleur pourraient être suffisants pour favoriser la résolution des symptômes.
Les exercices, quelle que soit leur forme, demeurent une intervention fort pertinente pour la prise en charge de la douleur à l’épaule, ainsi que pour le maintien de l’autonomie et l’optimisation de la santé à long terme.
L’auto-efficacité face à la douleur et les attentes des participants quant à l’efficacité de l’intervention qu’ils reçoivent peuvent jouer un rôle dans le pronostic de leur douleur à l’épaule.
Mais surtout…
Lorsque vous vivez un épisode de douleur à l’épaule, il peut être bénéfique de diminuer temporairement certaines activités susceptibles d’aggraver votre douleur. Toutefois, il est important de ne pas tarder à réintégrer progressivement ces activités dans votre quotidien.
La présence de douleur, surtout lorsqu’elle persiste dans le temps n’est pas nécessairement un signe que votre condition se détériore. Elle pourrait simplement indiquer que les gestes ou les activités réalisés dépassent la capacité actuelle de l’épaule à tolérer la charge qui lui est imposée.
Dans tous les cas, n’hésitez pas à aller consulter un professionnel de la santé, tel qu’un physiothérapeute au Canada ou, en France, un kinésithérapeute, qui saura vous «épauler» dans la prise en charge de votre condition!
Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.
Commentaires: