Alors que vieillir est généralement associé au déclin du corps et de l’esprit, des experts nous disent que l’on devrait peut-être réviser notre façon de voir. Que vivre longtemps, heureux et en santé, eh bien oui, c’est à notre portée…
L’espérance de vie augmente. C’est un fait. En 2016, on évaluait à 1 800 le nombre de centenaires au Québec (dont 90 % étaient des femmes). D’ici 10 ans seulement, selon l’Institut de la statistique du Québec, ce chiffre pourrait tripler. Le hic, c’est que toutes ces années ajoutées au compteur viennent souvent avec leur lot de maux, autant psychologiques que physiques. Vu sous cet éclairage, le titre du nouveau livre québécois paru sur la question, La vie intégrale – Vivre 100 ans, en santé et heureux, paraît plutôt utopique, non? «Pas du tout, estime Éric Dupont, idéateur de l’ouvrage et l’un de ses quatre coauteurs. C’est vers là qu’on s’en va naturellement. En un siècle, l’espérance de vie a augmenté de 60 %. Et avec toutes les connaissances qu’on possède aujourd’hui, on est de plus en plus en mesure de vieillir en bien meilleure santé.» Et heureux. Car l’un ne va pas sans l’autre. C’est le principe même de la vie intégrale: les différents aspects de notre vie – physique, sociale, personnelle – s’influencent l’un l’autre.
«La force de ce livre est justement de rassembler tous ces aspects dans un seul ouvrage, accessible, bien vulgarisé et surtout très bien documenté», avance Christine Michaud, conférencière, animatrice et coauteure de La vie intégrale. «On voulait donner l’heure juste sur les différents piliers de la santé, comme l’alimentation, le sommeil, l’exercice, l’épanouissement personnel ou les relations sociales», poursuit le Dr Christian Fortin, expert en santé publique qui a également contribué à cet ouvrage de référence que ses auteurs souhaiteraient retrouver sur la table de chevet de tous les Québécois.
Le livre a en effet été pensé en mode prévention: que peut-on faire aujourd’hui, quels changements apporter pour prolonger son existence en gardant la forme, mentale et physique? «Non, on ne peut pas prévenir toutes les maladies ou les problèmes de santé, mais on peut améliorer grandement notre condition si on en prend les moyens», ajoute Éric Dupont. Le livre a aussi été écrit pour nos enfants. Et les enfants de nos enfants. «Un mode de vie, ça ne se change pas facilement, mais il peut grandement s’améliorer de génération en génération si on transmet le message.»
Un changement à la fois
Ne pas fumer, bouger, faire des choses que l’on aime, avoir des projets… Plusieurs des préceptes évoqués dans l’ouvrage s’appuient sur le gros bon sens et des messages véhiculés depuis un certain temps. Mais les auteurs vont beaucoup loin, en chiffrant notamment nos gains potentiels en années si, par exemple, on devient plus actif ou on réduit notre consommation d’alcool. En abordant aussi une centaine de «mesures» qui, si on arrive à toutes les cocher sur notre liste, feront de nous des centenaires pétants de santé! «Le but n’est pas d’adopter toutes ces propositions, mais d’y tendre, nuance Christine Michaud en riant. Et de savoir que le moindre changement positif apporté à notre vie entraîne des gains. Des gains qui s’additionnent à mesure que l’on adopte de bonnes habitudes.»
Par où commencer?
Voici quelques-uns de ces préceptes, commentés par les auteurs du livre.
1 On tient compte du tour de taille plutôt que les calories.
«Avec l’âge, notre métabolisme change, il ralentit, observe le Dr Fortin. Le gras abdominal tend alors à s’accumuler, et cela entraîne toutes sortes de conséquences négatives comme d’augmenter le risque de diabète, de maladies cardiovasculaires et d’hypertension. Bref, notre tour de taille est un meilleur indicateur de notre santé que le nombre de calories consommées. Et mesurer son tour de taille est à la portée de tout le monde.»
2 On développe notre résistance au stress.
Hypertension, troubles de mémoire, troubles anxieux, ulcères, vulnérabilité aux infections… La liste des conséquences indésirables d’un niveau de stress trop élevé est longue. «Dans notre livre, on fournit de nombreux outils pour arriver à le contrôler, commente Christine Michaud. Mais ce qui est important, c’est de trouver ce qui marche pour nous.» Méditation, sport, prière, animal de compagnie, amis, hobby, musique… À nous de voir ce qui nous convient. À titre indicatif, si on arrivait à passer d’un niveau de stress intense à léger, on pourrait potentiellement ajouter 2,5 années à notre existence!
3 On pratique un sport qu’on aime.
Si on a déjà adopté la bonne habitude de marcher tous les jours ou presque, doit-on vraiment ajouter la pratique d’un sport? «Idéalement oui, répond le Dr Fortin. C’est un plus, un complément à la marche. Que ce soit du vélo, de la natation, du ski de fond ou autre, le sport fait travailler le corps différemment et le garde plus souple. Ce qui n’est pas à négliger, puisque le corps a justement tendance à perdre de sa souplesse à mesure que les années passent.» Toujours se rappeler aussi que ce n’est pas tant la fréquence qui importe que la régularité. Pratiquer un sport quatre fois par semaine? Si c’est pour s’en lasser trois semaines plus tard, il vaut mieux se limiter à une ou deux séances hebdomadaires, mais pour longtemps.
4 On est créatif.
En quoi la créativité a-t-elle quelque chose à voir avec notre santé et notre bonheur? Beaucoup, semble-t-il! «Ce n’est pas moi qui le dis, mais des centaines d’études, assure Christine Michaud. Développer sa créativité améliore la santé, le niveau de bien-être et la longévité.» Nul besoin toutefois de passer chez DeSerres ou de s’inscrire à des cours d’aquarelle pour augmenter la moyenne de notre bilan de santé (sauf si on en a envie, évidemment!). La créativité se traduit aussi dans des gestes en apparence anodins: écrire librement ce qui nous passe par la tête, fabriquer quelque chose de nos mains comme une carte de souhaits, écouter de la musique jamais entendue qui nous inspirera peut-être des idées, emprunter un tout nouveau trajet pour se rendre quelque part, modifier un peu une recette que l’on connaît bien au gré de nos envies, etc. «N’importe quoi qui bouscule un peu notre quotidien et nos habitudes favorise la créativité. Cela nous garde alerte, allumé et vivant.»
5 On se choisit un milieu de vie sain.
«Au Canada, on est assez chanceux, rassure Monsieur Dupont. Notre air n’est pas aussi pollué que dans d’autres pays. Cela ne veut pas dire pour autant qu’on ne peut pas chercher à améliorer notre propre environnement.» Éviter la cigarette, bien sûr. Mais aussi aérer la maison régulièrement, se balader dans la nature le plus souvent possible, adopter des plantes vertes, et garder en tête que maintenir un niveau de lumière et de bruit raisonnable est aussi important pour notre santé. Un environnement trop pollué de toutes sortes de manières aura une incidence sur notre niveau de stress, notre sommeil, notre concentration et notre humeur. Bref, sur notre santé au complet!
6 On donne un sens à notre existence.
Rien de moins. «Les deux premières années après la retraite sont critiques pour bien des gens, qui peuvent sombrer dans la déprime notamment, surtout quand le sens de leur vie dépendait de leur travail», explique l’expert. Se poser des questions comme «Qui suis-je?» et «Pourquoi suis-je ici?» ne devrait pas nous effrayer, mais au contraire nous amener à réfléchir à ce qui compte profondément pour nous, ce qui fait sens à nos yeux. Aider les autres, apprendre, voyager, avoir du plaisir, découvrir, aimer… Selon plusieurs études, les personnes avec une vie intérieure riche, une vie spirituelle ou religieuse, sont généralement plus heureuses, moins malades et vivent plus longtemps. Jusqu’à 35 % plus longtemps même, d’après une de ces recherches!
7 On fait un bilan de santé annuel.
Demander un bilan à notre médecin chaque année même si on se sent bien et qu’on n’est pas malade? «C’est justement le point, rétorque Monsieur Dupont. Un bilan de santé prend tout son sens quand on veut agir en prévention. Actuellement, notre système de santé gère les bobos. On consulte notre médecin quand on se sent mal et que quelque chose cloche. Mais c’est avant qu’on devrait aller le voir. En misant sur la prévention, on éviterait de très nombreuses maladies, ou on les guérirait souvent plus facilement. Notre mentalité doit donc changer, ainsi que celle des spécialistes de la santé, afin que la prévention soit à la base du système. Bien sûr, des maladies se développeraient quand même: on n’a pas le contrôle sur tout et on n’est pas responsable de tout ce qui module notre santé. Mais on doit prendre conscience qu’on a beaucoup plus de pouvoir sur celle-ci que l’on ne croit. En adoptant le plus possible de bonnes habitudes et en essayant de vivre une vie la plus épanouie possible, on se donne toutes les chances de vivre 100 ans. En santé, et heureux!»
Pour plus de conseils: La vie intégrale – Vivre 100 ans en santé et heureux, par Éric Dupont, Christine Michaud, Dre Diane Bilodeau et Dr Christian Fortin (Édito, 27,95 $).
Commentaires: