Les cliniques privées se multiplient au Québec. Leur offre de services s’élargit et les soins proposés sont de plus en plus pointus, mais cette voie de contournement a un prix. Nous faisons le point.
Quand l’accès aux soins de première ligne est limité et que les urgences affichent complet, la médecine privée vaut son pesant d’or. Faut-il le rappeler ? Quelque 776 708 Québécois sont orphelins d’un médecin de famille, selon les données de janvier 2023 du Guichet d’accès à un médecin de famille. En choisissant de payer pour consulter un généraliste ou un spécialiste, le patient s’attend à recevoir un diagnostic et une prise en charge plus rapide, ainsi que des soins de qualité. Il peut aussi vouloir abréger le temps d’attente pour une chirurgie comme celle de la hanche ou du genou, qui dépasse souvent 12 mois. Même chose pour les délais parfois longs pour obtenir des services d’imagerie médicale, dont l’échographie, la tomodensitométrie (CT scan) et la résonance magnétique. Les raisons de considérer le privé sont donc nombreuses.
N’allez surtout pas croire que c’est seulement le club des 1% qui fait appel au privé! Les couples qui travaillent, ceux qui ont de jeunes enfants ou qui sont sans médecin de famille et les personnes âgées ne peuvent pas toujours attendre des heures à l’urgence ou dans une clinique sans rendez-vous.
Aujourd’hui, beaucoup de contribuables de la classe moyenne se tournent donc vers la médecine privée, confirment les experts consultés.
Soulignons que les frais facturés par un médecin non participant au régime d’assurance maladie public varient grandement, comme c’est le cas pour les autres professionnels comme les avocats, les notaires ou les comptables. « Les médecins peuvent, dans une certaine limite, facturer au patient selon une grille tarifaire qui leur est propre. Dans ce domaine, qu’il s’agisse de chirurgie esthétique, d’orthopédie, d’ophtalmologie ou d’un autre secteur d’activités, il revient au patient de faire sa propre évaluation et d’exercer sa vigilance, tout comme dans le cadre de l’achat de tout bien ou service professionnel», précise le Collège des médecins du Québec sur son site Web.
Qu’en est-il de la médecine familiale au privé?
«Nous souhaitons offrir un service personnalisé de qualité. On passe plus de temps avec le patient, afin de bien comprendre l’ensemble de ses problèmes de santé. On le rappelle et on assure un suivi», souligne le Dr Normand Lavoie, un précurseur des soins privés au Québec.
En 2003, ce généraliste a fondé la Clinique Services Santé Rosemère, qui se spécialise en médecine familiale. On y fait de la consultation ponctuelle, des suivis de dossiers ainsi que des examens annuels. Des soins esthétiques (comblement et traitement des rides), des infiltrations sous échographie, du monitorage cardiaque, certaines biopsies en dermatologie ou en gynécologie, des tests sanguins et de la vaccination sont notamment proposés.
«Nous ne vendons pas de forfait familial ou à l’année comme le font certaines cliniques, précise Sonia Lemay, gestionnaire de la Clinique Services Santé Rosemère. Nos tarifs à la carte ne sont pas plus coûteux qu’ailleurs. Il importe de vérifier si la clinique à laquelle on s’adresse exige des frais d’ouverture de dossier ou des frais administratifs à chaque consultation ou sur une base annuelle qui peuvent gonfler la facture, ce qui n’est pas notre cas.»
Notons qu’un forfait familial pourrait convenir à un ménage qui a de jeunes enfants et qui doit consulter régulièrement pour divers problèmes de santé, comme des otites. Même chose si une personne diabétique souhaite un suivi plus régulier. Tout dépend des besoins de chacun. Par exemple, l’abonnement annuel aux Cliniques Médicales Lacroix revient à 799$ pour la formule bronze. Celle-ci donne droit à trois consultations en médecine familiale, des rabais sur des analyses en laboratoire privé, des gestes infirmiers et certaines investigations. Les consultations sont interchangeables entre les membres de la même famille.
De nombreuses autres cliniques proposent des forfaits annuels – individuels ou familiaux – dont les tarifs sont très variables. Le mot d’ordre: magasiner sa clinique en évitant le réflexe d’adopter d’emblée celle de son quartier.
Les frais de consultation diffèrent eux aussi considérablement d’une clinique à l’autre. Une consultation standard dure environ une vingtaine de minutes. À la Clinique Services Santé Rosemère, les frais oscillent entre 115 $ et 175 $ pour un problème spécifique et peuvent grimper jusqu’à 295 $ dans le cas d’un examen annuel (durée de 45 minutes) et à 300 $ pour les personnes de 75 ans et plus, qui passent près d’une heure dans le bureau du médecin. Pour les membres des Cliniques médicales Lacroix, le coût de la consultation est de 249$ en semaine et de 299$ le weekend. Ces prix peuvent « varier selon la durée de la consultation», peut-on lire sur leur site Web. Les frais sont les mêmes pour la télémédecine (actes médicaux à distance).
Quant au bilan de santé pour les 50 ans et plus, par exemple, la consultation sera plus longue, mais également plus onéreuse. Selon la clinique, le coût dépasse aisément les 500$, pour atteindre 700$ et même davantage si on ajoute un examen physique complet, un bilan sanguin, un électrocardiogramme et divers tests.
Les prix grimpent chez les spécialistes
En ce qui concerne les médecins spécialisés, le secteur privé n’est pas en reste. Désormais, il est possible de consulter en quelques jours ou quelques semaines, selon la spécialité et l’urgence des cas, un expert des domaines suivants : allergologie, dermatologie, gastroentérologie, gynécologie, hématologie, neurologie, otorhinolaryngologie, orthopédie, pédiatrie, pneumologie, urologie et parfois même en oncologie, cardiologie, psychiatrie, etc. Tout dépend des médecins traitants qui pratiquent à la clinique privée choisie.
Comme de raison, les coûts de consultation sont généralement plus élevés qu’en médecine familiale. Les clients abonnés aux Cliniques médicales Lacroix ont la possibilité d’interchanger deux consultations en médecine familiale pour une consultation en médecine spécialisée. Le coût d’une première rencontre, quelles que soient la spécialité et la clinique, sera rarement inférieur à 200$ et peut atteindre 400$ ou 500$, voire plus dans certains cas, notamment en psychiatrie.
Accélérer l’accès à une chirurgie
Du côté des interventions chirurgicales, la médecine privée a beaucoup évolué. Les chirurgies mineures et les traitements au laser se multiplient. Plusieurs cliniques ont des blocs opératoires avec des équipes constituées de chirurgiens, d’anesthésistes et d’infirmières. Bien sûr, il faut obtenir et payer une consultation préalable avec un médecin afin d’évaluer son cas et les risques encourus. Cela dit, certaines interventions pointues ou délicates – comme le traitement d’un cancer ou une opération à cœur ouvert – sont encore du ressort du système de santé public.
Outre la chirurgie esthétique, voici un aperçu des champs d’intervention envisageables au privé : hernie inguinale, fistule anale, biopsie pour une masse bénigne au sein, ablation de l’endomètre, hystéroscopie, retrait d’un kyste ovarien par laparoscopie… sans oublier l’ophtalmologie et l’opération de la cataracte ou du glaucome. Quant à la chirurgie orthopédique, il est également possible d’obtenir une arthroscopie ou un remplacement complet de la hanche ou du genou. Pour avoir une meilleure idée des frais encourus, mieux vaut contacter plusieurs cliniques avant de faire un choix.
«Depuis 2008, plusieurs cliniques privées proposent des interventions en milieu extra-hospitalier, mais très peu offrent la possibilité d’un hébergement après la chirurgie», remarque Martin St-Amour, directeur général de la Clinique Duval, située à Laval. Ce centre médical spécialisé en chirurgie orthopédique effectuait jusqu’en 2020 environ 300 chirurgies par année. En 2022, plus de 900 interventions y ont été pratiquées en neuf mois.
Depuis la pandémie, la demande a explosé, les remplacements articulaires n’étant pas une priorité dans le système de santé public puisque la vie du patient n’est pas en danger. «La moyenne d’âge de nos patients est de 71 ans, note le DG. Certains cas complexes attendent depuis plus de 1000 jours avant d’être opérés. À cette période de la vie, quand l’arthrose est si avancée que même les narcotiques ne font plus effet, chaque jour compte.»
Quel est le coût d’une telle intervention? Par exemple, pour une prothèse complète d’un genou ou d’une hanche, le prix oscille entre 22 000$ et 24 750$, selon Martin St-Amour (montants exonérés des taxes). «Ça inclut les services chirurgicaux, la médication, l’hébergement jusqu’à trois nuits, la nourriture et la physiothérapie durant cette période», précise l’expert. Il faudra également débourser des frais de 275$ pour une consultation préalable avec le chirurgien.
Remboursements et crédits d’impôt pour compenser les frais encourus
En ayant recours au privé, le patient choisit d’assumer la totalité des frais de consultation et des coûts liés à un traitement ou une chirurgie. La clinique doit d’ailleurs afficher sa tarification et indiquer clairement aux patients que les médecins qui y pratiquent ne participent pas au régime de la Régie de l’assurance maladie du Québec (RAMQ). Par conséquent, les coûts des services offerts ne sont pas remboursables par le régime public.
Petit baume: un crédit d’impôt pour frais médicaux, au provincial et au fédéral, pourrait compenser une partie des frais encourus par le patient, tout dépendant de son revenu ou de celui du ménage. Les frais en question doivent être admissibles; à cet égard, ceux liés à des soins purement esthétiques ne le sont pas.
«Pour une prothèse complète du genou ou de la hanche, nos patients reçoivent potentiellement entre 4000$ et 7000$ en crédits d’impôt », constate Martin St-Amour. Au Québec, le montant du crédit se calcule en appliquant un taux de 20 % au total des frais médicaux admissibles qui excède 3% du revenu net familial. Il n’y a pas de plafond à ce crédit. Au fédéral, le taux du crédit est de 15% des frais médicaux admissibles qui excèdent le moindre de ces deux montants: 3% du revenu net du particulier ou 2635$ (année d’imposition 2023). Au provincial, on peut aussi réclamer un crédit pour des frais de déplacement et de logement liés aux soins médicaux non dispensés dans un rayon de 200 km de de notre lieu de résidence. Pour plus de renseignements et en cas de doute, mieux vaut s’adresser à un comptable.
Bon à savoir: les tests prescrits par un médecin au privé peuvent généralement être faits au public ou au privé au choix du patient et selon le type de test. Certains tests ne sont pas disponibles au privé (ou plus difficile à faire) comme la scintigraphie osseuse.
Pour la résonance magnétique où l’attente est longue au public, on pourra choisir d’aller au privé. Les assurances collectives les couvrent-elles? La plupart d’entre elles ne remboursent pas les frais liés à des actes médicaux déjà couverts par la RAMQ. Ça vaut tout de même la peine de contacter notre assureur privé ou celui de notre employeur afin de poser des questions. Certains vont rembourser des médicaments, des tests en laboratoire ou même l’infiltration sous échographie payés au privé.
Le gouvernement se décharge de son régime assurance maladie universel et on continue à payer de plus en plus d’impôts, d’assurance maladie et de fss et il reste les médecins. Allez au privé même s’il en manque au public, même chose pour les infirmières!
Effectivement, très cher au Québec pour des soins de chirurgies orthopédiques au privé et notamment des soins exceptionnels donnés avec grand professionnalisme et compétence.
Par contre qu’arrive-t-il dans les autres provinces? Et pourquoi les patients qui viennent au Québec pour de telles chirurgies bénéficient d’un retour sur leur investissement via le régime de santé public de leur province d’origine?
Car des patients de CB ou Alberta ou Ontario choisissent parfois ces cliniques ultra-spécialisées au Québec et ont accès à l’assurance publique de leur province pour défrayer certains coûts du chirurgien ou anesthésiste ou autres coûts.
Donc, le système de santé canadien universel devrait-il défrayer nos coûts si on allait se faire opérer au privé en CB par exemple?
Et surtout au lieu de maigres crédits d’impôts, pourquoi ne pas accepter de payer une partie du privé avec la RAMQ?
Ça ne pénaliserait pas le privé, mais ça aiderait à l’accès au privé à ceux qui sont capables de payer une partie des coûts.
La Facture, émission bien connue, pourrait se pencher sur cette question.
AVEC NOS IMPÔTS QUE NOUS PAYONS POUR LA CARTE ASSURANCE MALADIE ALORS ON PAIE DEUX FOIS EN ALLANT AU PRIVÉ
Bonjour, je n’ai pas de médecin de famille, et inscrite à un groupe de médecine familiale(GMF).
Je dois me faire opérer à 2 orteils, mal alignés, et évaluer mon pieds en général.
Pourriez-vous me suggérer un spécialiste.
Merci de me répondre.
Bonjour Mme Gaumond, nous ne sommes malheureusement pas en mesure de recommander de spécialistes de la santé. Vous pouvez communiquer avec le 811, qui pourra vous dire où aller près de chez vous.