Calvitie et hérédité
Vous êtes un homme de plus de 40 ans et vous perdez vos cheveux? Votre père était chauve à l’âge que vous avez? Il faut vous faire à l’idée: vous deviendrez chauve, à moins de recourir à une greffe de cheveux ou à une perruque. Vous êtes une femme? Le constat est le même. Cette réalité brutale, une fois assimilée, vous évitera de dépenser une fortune en traitements inutiles.
Petite leçon de biologie: la chute des cheveux est due à l’hérédité dans une proportion de 95%. Cette chute dépend d’un trouble appelé alopécie androgénique. Chez les hommes, une hormone dérivée de la testostérone et sécrétée par la prostate, la dihydrotestostérone, cause l’amincissement graduel et définitif des cheveux.
Des chercheurs qui se penchaient sur les problèmes d’hypertrophie (enflure) de la prostate ont découvert qu’un médicament, le finastéride, avait comme effet secondaire de bloquer les effets de l’hormone sur la perte des cheveux. Cela a donné le médicament connu sous le nom de Propecia, délivré sur ordonnance. Ce médicament ralentit la perte des cheveux existants, mais ne fait pas repousser la toison sur les crânes dégarnis.
Le Dr Michel Chagnon, de la Clinique de greffe de cheveux Bédard, à Montréal, met en garde ses clients masculins contre les effets secondaires du Propecia: baisse de libido, problèmes érectiles, apparition de bourgeons mammaires et quelques rares cas de cancer du sein. Cela donne froid dans le dos…
Calvitie: traitements et solutions
Suzanne Donofrio, porte-parole des cliniques Capilia, croit pour sa part qu’une bonne hygiène capillaire est essentielle pour réduire la perte des cheveux. Tout en déplorant le fouillis d’informations contradictoires que le public peut trouver sur Internet, elle affirme que certaines carences alimentaires (zinc, calcium, acides aminés) peuvent causer la calvitie chez la femme, de même que le stress, le tabagisme ou l’observation d’une diète stricte. Ces propos, il faut le dire, ne sont appuyés par aucune recherche scientifique sérieuse.
Les cliniques Capilia offrent cependant une façon définitive de retrouver une chevelure de rêve: la «correction capillaire», nouveau terme pour «perruque». Fini les grosses moumoutes mal ajustées qui ont couvert tant d’hommes de ridicule. Aujourd’hui, on injecte des cheveux humains dans une fine membrane plastique que l’on colle sur les crânes rasés. L’illusion est parfaite. On enlève la membrane après quatre ou huit semaines, on nettoie la tête et on replace une nouvelle membrane. La facture est assez salée: de 250$ à 350$ par mois, à vie! Mme Donofrio reconnaît que ces «corrections capillaires» s’adressent surtout à des jeunes hommes soucieux de leur image et à des femmes qui dépensent de toute façon cette somme chez le coiffeur.
Si la calvitie vous traumatise, vous voudrez peut-être essayer des produits capillaires vendus en pharmacie, quitte à vous délester de plusieurs précieux dollars. L’entreprise Norgil Canada, une filiale de Norgil France, exploite ce créneau. Elle vend un produit d’importation appelé Alpharegule. Le porte-parole de Norgil, Alain Vrain, nous explique que ce produit est «l’équivalent du Propecia, sans les effets secondaires néfastes sur la libido ou sur la santé».
Composé d’éléments naturels comme l’huile de bourrache, l’huile de pépins de courge et l’ortie, Alpharegule peut être consommé par les hommes et les femmes. Vendu sans ordonnance, il est considéré comme une «cure» et non comme un médicament. M. Vrain reconnaît que son produit ne fera jamais repousser les cheveux sur la tête d’un chauve, mais croit qu’il aidera les petits poils à reprendre de la vigueur. Quand on cesse de l’utiliser, les cheveux retournent au néant en quelques semaines.
Un autre produit Norgil, l’Aliment de Vie du cheveu, se vend en comprimés et prétend «renforcer la structure du cheveu en cas de chutes carentielles comme la ménopause». Un traitement mensuel d’Alpharegule coûte 69$, et il faut débourser 50$ par mois pour l’Aliment de Vie du cheveu. Les 15 centres Norgil du Québec offrent aussi une analyse du cuir chevelu au laser grâce à leur logiciel au nom très français de Hair Analyzer. Les employés de ces centres ne sont pas médecins.
Et qu’en est-il des traitements traditionnels contre la perte des cheveux? Suzanne Donofrio, de Capilia, croit qu’il ne faut pas s’en moquer: «De plus en plus de laboratoires ont recours aux éléments contenus dans les remèdes de grand-mère, affirme-telle. La sagesse populaire a souvent fait ses preuves.» Ainsi, le blanc d’oeuf et la moelle de boeuf auraient de réels effets bénéfiques pour les cheveux anémiés. Chères mémés…
La greffe de cheveux
Lorsque tous les traitements ont échoué, la greffe de cheveux reste la solution ultime, coûteuse mais définitive. La technique est simple et a été mise au point par le médecin montréalais Michel Bédard il y a 35 ans. On prélève des greffons de cheveux dans la couronne bien garnie derrière la tête du patient, puis on les greffe là où il n’y en a plus. Les cheveux de la couronne sont programmés pour tomber plus tard que les autres, ce qui assure à la greffe une garantie prolongée.
Encore là, il faut rester prudent ! De nombreuses cliniques offrent des greffes à des prix très bas, mais il faut savoir pourquoi: on y prélève généralement moins de greffons à chaque opération, ce qui donne au patient le détestable look de la pinède, encore plus voyant qu’une perruque bon marché! Le Dr Michel Chagnon, de la Clinique de greffe de cheveux Bédard, affirme qu’il faut s’assurer que la greffe est effectuée, comme chez lui, par des chirurgiens entourés d’infirmières compétentes. «Si c’est un vendeur qui vous offre une greffe, méfiez-vous, ajoute-t-il, car les risques d’infection sont nombreux. En plus, les médecins sont soumis à un code d’éthique rigoureux.»
Le Dr Chagnon reconnaît qu’il n’existe aucun argument santé pour vendre une greffe de cheveux; c’est une opération purement esthétique. Pour un homme qui a le coco dégarni, une greffe peut entraîner des débours de 12 000 à 15 000$. Ces frais ne sont pas remboursés par l’assurance-maladie du Québec. C’est le prix de quelques voyages en Europe…
Être chauve ou pas?
La question se pose de plus en plus dans notre société obsédée par l’image. Certains vendeurs de greffes affirment sans sourciller que des «études» auraient tendance à montrer que les employeurs engagent plus volontiers des gens à la chevelure ondoyante, jugés dynamiques, que des chauves, jugés trop pépères. Vraiment?
Dans certains milieux, à l’université par exemple, un chauve sera considéré comme un intellectuel, un sage; les jeunes génies de l’informatique ont souvent le crâne rasé. Une mode? De nombreux comédiens utilisent leur calvitie pour se distinguer des autres; pensons au sexy James Hyndman, au comique Martin Matte ou à Rachid Badouri. Tous chauves et célèbres!
Bien sûr, pour les femmes, c’est différent. Selon Suzanne Donofrio, la perte des cheveux peut causer de réelles angoisses chez celles qui suivent des traitements de chimiothérapie, par exemple. «Elles sont souvent plus traumatisées par l’idée de devenir chauves que par le cancer lui-même.» Dans ce cas, une prothèse temporaire fera des merveilles. Il faut dire aussi que de plus en plus de femmes luttant contre le cancer osent afficher leur calvitie. Sûres d’elles, belles et dignes, elles nous montrent que le cancer n’est plus tabou. Je les trouve magnifiques!
Vous aimerez aussi:
Mise à jour: septembre 2013
Commentaires: