Entraîner son cerveau, c’est gagnant!

Entraîner son cerveau, c’est gagnant!

Par Jacqueline Simoneau

Crédit photo: iStock

En vieillissant, plusieurs personnes disent que leur mémoire leur joue des tours, que leurs réactions sont plus lentes. À priori, il n’y a pas de quoi s’affoler. D’autant plus qu’on peut stimuler notre «coco» à tout âge. Explications.

Le cerveau est un organe complexe. Il se compose d’environ 100 milliards de neurones qui reçoivent et transmettent des informations sous forme de signaux électriques. Essentiels au fonctionnement du corps, ces neurones communiquent entre eux par le biais de connexions appelées synapses. Celles-ci évoluent constamment en fonction des apprentissages, des expériences et de l’environnement.

Hélas, tout comme le corps, le cerveau vieillit avec l’âge. Et le processus de vieillissement débute tôt. Dès l’âge de 25 ans, le nombre de neurones commence à décliner lentement, selon le Dr David Fortin, neurochirurgien et professeur titulaire au département de chirurgie, de radiobiologie et de pharmacologie à l’Université de Sherbrooke. Après 50 ans, le vieillissement s’accélère: le volume du cerveau et de l’hippocampe (siège de la mémoire) diminue progressivement, le flux sanguin cérébral se réduit et les communications entre les neurones ralentissent, entre autres choses. Ces processus se produisent encore plus vite après 70 ans, ce qui augmente considérablement le risque de maladies neurodégénératives. La plus fréquente est sans contredit l’Alzheimer, mais il n’y a pas qu’elle. Parmi les autres troubles pouvant affecter les fonctions cognitives se trouvent la maladie de Parkinson, la démence à corps de Lewy, la démence fronto-temporale et la démence vasculaire.

Il va sans dire que le vieillissement du cerveau n’est pas sans répercussions. «Il s’accompagne d’un ralentissement de certaines fonctions cognitives telles que les capacités d’enregistrer et de traiter rapidement de l’information, de prendre des décisions, de contrôler l’attention, d’accomplir plusieurs tâches à la fois, de retenir des choses nouvelles et de faire de nouveaux apprentissages», rapporte le Dr Louis Bherer, neuropsychologue spécialisé dans le vieillissement du cerveau, professeur titulaire au département de médecine de l’Université de Montréal et directeur du Centre ÉPIC de l’Institut de cardiologie de Montréal. Toutefois, les effets et leur intensité varient beaucoup d’une personne à l’autre. Oublier l’endroit où on a déposé nos clés, le code de notre carte bancaire ou le prénom d’un ancien voisin est agaçant, mais ça ne signifie pas forcément qu’une maladie cognitive nous guette, surtout si ces petits désagréments n’affectent pas notre quotidien.

«L’inattention explique bon nombre de trous de mémoire, soutient le Dr Bherer. Parfois, aussi, les gens ont tellement de choses en tête qu’ils oublient le souvenir précis de certaines informations. Une partie des troubles de la mémoire s’explique également par le fait que nos sens, comme la vision et l’audition, diminuent avec l’âge, d’où la difficulté de bien capter l’information.»

De nouvelles connexions

Les neurones endommagés ou perdus ne se régénèrent pas. En revanche, le cerveau conserve sa neuroplasticité, c’est-à-dire sa capacité à créer de nouvelles connexions entre les neurones et à restructurer les réseaux cognitifs, et ce, tout au long de sa vie.

«Plus on stimule le cerveau, plus on préserve cette capacité de neuroplasticité, assure le Dr David Fortin. Celle-ci permet notamment de maintenir ses fonctions cognitives le plus longtemps possible et de réduire l’impact des maladies neurodégénératives. La neuroplasticité est très performante de 30 à 60 ans, mais diminue à partir de 60 ans. D’où l’importance de stimuler son cerveau en vieillissant pour la garder active.»

Éveiller ses neurones

Comme les muscles, les neurones doivent être exercés quotidiennement. Si on ne s’en sert pas, ils deviennent paresseux et se dégradent rapidement. À l’inverse, plus on les sollicite, plus on crée de connexions entre les neurones et plus on renforce notre protection contre le déclin cognitif. Cela dit, faire des mots croisés, c’est bien. Mais si on ne pratique que ce loisir, on ne renforcera que les connexions qui y sont liées, soutient le Dr Fortin. Il faut donc varier les activités pour faire travailler tous les circuits.

Il existe d’autres manières de stimuler son cerveau: lire, écrire à la main, pratiquer des calculs, jouer au scrabble ou à des jeux de cartes, de mémoire et de société, faire des sudokus et des casse-têtes, exercer sa mémoire visuelle, suivre des cours (danse, langue, musique), etc. Débattre d’un sujet avec des amis ou sortir de sa routine en prenant un chemin différent pour faire les courses met aussi le «coco» à contribution. L’utilisation des nouvelles technologies n’est pas non plus à négliger. Selon le Dr Fortin, des études ont démontré que les gens âgés qui utilisent les médiums numériques pour faire des recherches ou des lectures sur internet maintiennent leurs fonctions cognitives plus longtemps.

C’est connu que l’activité cérébrale est à son maximum quand le cerveau est confronté à de nouveaux défis qui exigent un effort supplémentaire. Ainsi, il est suggéré de passer aux casse-têtes de 1500 morceaux si on a l’habitude d’en faire à 1000 pièces. De même, les gens qui réussissent sans problème les sudokus faciles devraient passer au niveau de difficulté suivant. Selon le Dr Louis Bherer, les jeux de vitesse qui obligent à prendre des décisions rapidement sont également profitables pour le cerveau.

On bouge!

L’activité physique régulière a un effet protecteur contre le déclin cognitif. Elle améliore notamment la connectivité entre les neurones et favorise la neuroplasticité. «Plusieurs études ont conclu que les personnes actives physiquement perdent moins de volume cérébral que les personnes sédentaires du même âge et qu’elles conservent leurs fonctions cognitives plus longtemps, constate le Dr Bherer. Elles sont moins à risque de développer une démence en vieillissant.»

Ce n’est pas tout. Selon le Dr Fortin, la santé du cerveau dépend de celle de ses vaisseaux sanguins – d’une longueur de 650 km! – qui fournissent oxygène et énergie aux cellules cérébrales. «L’atteinte des vaisseaux sanguins alimentant le cerveau contribue largement à la démence vasculaire, explique le neurochirurgien. L’activité physique, tout comme le contrôle des maladies chroniques qui affectent le système sanguin comme l’hypertension, le diabète et l’obésité, constitue l’une de meilleures façons de baisser significativement le risque de démence et de troubles cognitifs.»

Pour activer les neurones et améliorer le flux sanguin, il suffit d’un minimum de 20 minutes d’exercice modéré à intense par jour (vélo, natation, marche rapide, danse, etc.). Une mesure assez simple, finalement.

Des habitudes payantes

Selon le Dr Bherer, les personnes qui privilégient un mode de vie sain et préventif ont de 30 à 40% moins de risque de développer la démence. Parmi les bonnes habitudes: dormir, bien s’alimenter et socialiser.

«Pendant le sommeil, le cerveau traite les informations, consolide les apprentissages, évacue les informations jugées superflues pour faire de la place aux mémoires utiles accumulées durant la journée et restaure les fonctions cérébrales, mentionne le Dr Fortin. Un sommeil de mauvaise qualité ou trop court affecte ces processus et, par ricochet, la mémoire et les apprentissages.»

On connaît les bienfaits d’une saine alimentation sur la santé du corps. Mais on oublie souvent son incidence sur le cerveau. Pour assurer son bon fonctionnement, on mise sur les aliments riches en polyphénols, en antioxydants, en lycopènes et en oméga-3.

Finalement, des interactions sociales fréquentes et significatives stimulent le cerveau. Autrement dit, être bien entouré retarde les problèmes cognitifs. Pourquoi pas organiser votre prochaine sortie maintenant?

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