Où devriez-vous investir votre argent?

Où devriez-vous investir votre argent?

Par Olev Edur

Crédit photo: iStockphoto.com

Quand vient le temps de planifier une stratégie d’investissement, les conseils sur les placements de participation ne manquent pas: fonds communs de placement ou actions, croissance ou valeur, analyse fondamentale ou technique, marché intérieur ou étranger, rotation sectorielle et ainsi de suite. En revanche, l’information sur les stratégies d’épargne à revenu fixe se fait plus rare. Or, pour beaucoup de retraités, surtout ceux parvenus à un stade plus avancé de leur retraite, cette information revêt souvent une importance encore plus grande. Voici quelques conseils d’experts qui vous aideront à tirer le maximum de vos titres à revenu fixe.

Comment répartir vos placements?

La première question à se poser au moment de constituer un portefeuille: combien investir dans des instruments à revenu fixe par rapport à des titres de participation? Autrefois, on avait coutume d’utiliser la formule «90 moins l’âge de l’investisseur» pour établir le pourcentage à investir dans des actions. Ainsi, une personne de 60 ans devait investir 30% de ses économies dans des actions et 70% dans des titres à revenu fixe.

Toutefois, avec le prolongement de l’espérance de vie et, par conséquent, de la période durant laquelle le retraité doit vivre de ses économies, ce chiffre (90) a été haussé à 100 durant les années 1990 (augmentant de 10% la part d’actions pour toutes les catégories d’âge). Or, depuis, la barre a encore monté. «À 100, cela signifiait qu’à 60 ans, vos investissements en actions devaient représenter 40% de votre portefeuille, mais aujourd’hui, même cette formule de calcul est dépassée», affirme Warren Baldwin, vice-président régional de T.E. Mirador, à Toronto.

Selon lui, cette règle était peut-être valable dans les années 1980, quand les taux d’intérêt atteignaient 10% ou 12%. Elle permettait d’obtenir un rendement assez intéressant, mais maintenant, avec des instruments à revenu fixe qui ne vous rapporteront que 4% ou 4,5% d’intérêt, la situation n’est plus la même.

«Avec les tendances baissières ou latérales des marchés boursiers au cours de la dernière année, même un taux de 4% peut sembler un rendement acceptable à l’heure actuelle, indique Warren Baldwin. Toutefois, un tiers de cet intérêt passera en impôts, l’inflation en grugera encore 2% chaque année, ce qui fait qu’au final, vos placements afficheront en réalité un taux de rendement nul.

«Les actions sont le seul véhicule offrant à long terme un rendement qui excède l’inflation et l’impôt, ajoute-t-il. Elles assurent un rendement avantageux sur le plan fiscal en raison du traitement favorable accordé aux gains en capital et aux dividendes. Alors, oui, la règle de 100 peut être un indicateur utile, mais elle n’est pas très adaptée au contexte d’investissement actuel. Je ne crois pas qu’une proportion de 40% d’actions soit appropriée aujourd’hui pour un sexagénaire.»

Todd Asman, vice-président adjoint à la planification des investissements stratégiques chez Groupe Investors, à Winnipeg, estime que la règle de 100 est un bon point de départ, mais selon lui, vous devez aussi évaluer les revenus dont vous aurez besoin pour atteindre vos objectifs de retraite. «Tout dépend de votre tolérance au risque. Un portefeuille constitué à 40% de titres à revenu fixe à 60 ans peut sembler un choix modéré, mais certaines personnes prennent désormais leur retraite plus tôt et elles devront compter sur leurs revenus d’investissement pendant encore 20 ou 30 ans. C’est pourquoi certains portefeuilles contiennent parfois jusqu’à 70% d’actions.»

La diversification, une nécessité

Les actions présentent un certain risque, mais selon Warren Baldwin, trop investir dans les titres à revenu fixe constitue également un risque. «Une fois calculés l’impôt et l’inflation, vous risquez à long terme de manquer d’argent. C’est un aspect que vous ne pouvez négliger, car une fois engagé dans cette voie, vous ne pouvez plus changer le cours des choses. Prendre 4% de votre actif chaque année et l’investir dans des titres à revenu fixe est le meilleur moyen de vous retrouver à court d’argent.»

La diversification, une nécessité

«L’avantage de cette formule de répartition du portefeuille, c’est qu’elle incite les gens à diversifier leurs placements, la pierre angulaire de toute stratégie d’investissement équilibrée, ajoute Warren Baldwin. Les calculs vous sembleront peut-être compliqués au départ, mais tout repose en fait sur le risque et l’espérance de gain. À partir du moment où on comprend les enjeux, on peut prendre une décision plus éclairée.»

Todd Asman souligne que les deux facteurs clés du rendement des placements à revenu fixe sont l’échéance et le risque de crédit. «Les obligations émises par des sociétés privées dégagent un rendement supérieur aux obligations d’État, mais le risque est également supérieur. C’est pourquoi nous recommandons généralement un portefeuille varié comportant à la fois des obligations d’État et de sociétés privées, avec des échéances différentes.»

Les retraités devraient néanmoins éviter une exposition à long terme avec les obligations parce que la volatilité peut être élevée. «Il est vrai que si vous conservez vos obligations jusqu’à ce qu’elles arrivent à maturité, vous obtiendrez toujours le rendement nominal, continue Todd Asman. Mais les valeurs à long terme peuvent fluctuer beaucoup plus que celles à court et à moyen termes, alors vous devrez parfois attendre 20 ou 30 ans pour obtenir la totalité de ce rendement nominal. J’opterais plutôt pour des placements à moyen terme de 5 à 10 ans et à court terme de 1 à 5 ans.»

Scott Ward, planificateur financier chez Edward Jones, à Toronto, est moins préoccupé par la volatilité à long terme. Il recommande un portefeuille d’obligations composé de 25% à 35% de titres à court terme (1 à 5 ans), de 30% à 40% de valeurs à moyen terme (6 à 15 ans) et de 30% à 40% de placements à long terme (plus de 16 ans). «En règle générale, les obligations à long terme offrent des rendements plus élevés et contribuent à compenser les fluctuations de taux à court terme», ajoute-t-il, mais, selon lui, il vaut mieux s’en tenir à des émissions d’obligations de bonne qualité, soit les titres cotés BBB ou plus.

Titres à échéances diverses

Warren Baldwin recommande l’achat d’obligations intérieures et de fonds à revenu fixe, mais il souligne que les ratios de frais de gestion (RFG) de certains fonds peuvent en faire de mauvais choix. «Si un fonds produit un rendement de 4,5%, mais qu’il a un ratio de frais de gestion de 1,5% – de nombreux fonds à revenu fixe ont des ratios de frais de gestion de 1,25% à 1,75% –, vous n’en retirerez qu’un gain de 3%. Déduisez ensuite 1% pour l’impôt et 2% pour l’inflation et votre rendement réel est nul.»

Si Warren Baldwin évite les titres à revenu fixe étrangers en raison du risque de change, Todd Asman conseille d’en acquérir un petit pourcentage – environ 5% à 10% du total de vos placements à revenu fixe. «Optez cependant pour des échéances à court terme, moins volatiles.»

Il recommande aussi d’acheter des obligations à rendement réel, dont les taux sont indexés sur l’inflation. «Vous vous protégerez ainsi contre d’éventuelles hausses du taux d’inflation.» Mais Scott Ward prévient que leurs rendements pourraient être inférieurs à ceux des obligations ordinaires. «Vous ne devez pas investir plus de 5% à 10% de vos économies dans des obligations à rendement réel.»

Warren Baldwin et Scott Ward prônent tous deux l’échelonnement des échéances, c’est-à-dire l’achat de titres à échéances diverses afin d’avoir toujours des placements à maturité. «Cette stratégie vous assure une source continue de liquidités et vous rend moins vulnérable aux fluctuations des taux d’intérêt», souligne Warren Baldwin, ajoutant que l’acquisition de produits à échéances diverses peut parfois coûter moins cher que les fonds d’obligations.

Ces deux conseillers suggèrent aussi de se procurer quelques titres qui versent des dividendes, même s’il s’agit d’actions. «Votre revenu de retraite devra couvrir vos dépenses pendant parfois encore 20 ans et ces dépenses augmenteront avec le temps, soutient Scott Ward. Des titres qui produisent de bons dividendes peuvent se révéler très précieux pour compenser l’inflation.»

Todd Asman recommande aussi le Fonds de biens immobiliers Investors qui, contrairement à la majorité des fonds de biens immobiliers parfois très volatils, investit dans des biens immobiliers produisant des revenus de location réguliers. «À l’instar des véhicules à revenu fixe, ce fonds rapporte un rendement d’environ 4%, mais il comporte aussi une plus-value, le rendement total correspond donc plutôt à 6% ou 7%.»

Warren Baldwin conclut: «Si vous détenez à la fois des comptes enregistrés et non enregistrés, essayez de garder les placements qui vous rapportent des intérêts dans votre régime enregistré, et cherchez à obtenir des gains en capital et des dividendes à l’extérieur des régimes enregistrés, là où ils profitent d’un traitement fiscal préférentiel, affirme-t-il. Dans un REER ou un FERR, les gains en capital et les dividendes sont imposés comme des revenus ordinaires.»

Mise à jour: août 2008

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