Livreurs de bonheur

Livreurs de bonheur

Par Linda Priestley

Crédit photo: leonie wise via Unsplash

Un système de livraison monté à la volée, une armée de bénévoles au travail: c'est la réalisation de Mirella Di Blasio et de son service LULU, qui sert depuis le début de la pandémie de COVID-19 plus de 240 repas par semaine. Du dévouement sur quatre roues!

Depuis plus d’un mois, des voitures de livraison improvisées sillonnent les rues désertes du grand Montréal pour aller porter chez des gens des victuailles… et de l’espoir. «Si vous entendiez les mercis et les mots gentils qu’on nous dit, ça tire des larmes», raconte tout émue Mirella Di Blasio. Le 12 mars, la dynamique fondatrice de LULU événements, une entreprise organisatrice d’événements corporatifs, avait pressenti le tsunami. «Ce jour-là, le premier ministre François Legault annonçait l’interdiction des rassemblements de plus de 250 personnes à l’intérieur, signifiant ainsi l’arrêt temporaire des activités de ma business. En même temps, je travaillais à rapatrier ma mère qui se trouvait alors en Floride.» Le flash lui est venu dans la nuit de samedi 14 mars après avoir cueilli celle-ci à l’aéroport et fait son épicerie: «Je me suis demandé ce que maman aurait fait si personne n’avait été là pour elle. J’ai songé aux personnes vulnérables, et l’idée m’est venue de leur offrir un service de livraison gratuite.»

 

 

Appelez LULU!

Aussitôt dit, aussitôt fait. Le lendemain, l’annonce, en même temps qu’une demande de bénévoles, est lancée sur les réseaux sociaux. La réponse n’a pas tardé. «J’ai été estomaquée de voir à quel point mon numéro de téléphone a circulé: l’Office municipal d’habitation de Montréal (OMHM), des CLSC, des résidences privées, des personnes isolées, des organismes représentant divers groupes, comme les personnes vivant avec une maladie mentale ou celles à mobilité réduite… Même des banques alimentaires et des popotes roulantes, dont les bénévoles aînés, qui assurent habituellement la distribution des denrées, étaient tenus de rester à la maison, se sont tournées vers nous. Ils m’ont demandé: "Pouvez-vous livrer pour nous?" J’ai répondu: "Bien sûr que oui!"»

 

Mirella Di Blasio 

photo: Benoît Rousseau photographie

Des bénévoles rock stars

Depuis, Mirella Di Blasio, aidée de son équipe, dont font partie son conjoint et sa maman, reçoit chaque jour entre 130 et 150 appels. «Nous distribuons 240 repas et paniers alimentaires par semaine et effectuons entre 70 et 80 livraisons par jour, toujours en suivant un protocole sanitaire très strict. Préparer une épicerie demande environ trois heures: réception de la commande, triage, magasinage, livraison… Les bénévoles doivent parfois faire la file avant de pouvoir entrer dans le magasin.» Ses 90 bénévoles, âgés de 20 à 60 ans et provenant de tous les milieux, font le travail nécessaire de bon cœur. «Les gens leur disent: "Vous êtes des anges". En retour, ils sont touchés parce qu’ils se sentent utiles, ils apportent un baume. Ça fait du bien aussi de voir qu’ensemble, on peut déplacer des montagnes. Quand tout cela sera fini, on se fera tout un party!»

 

 

L’amitié dans un panier

L’artisane de ce généreux projet, pour sa part, a trouvé une façon de rendre hommage à ses parents, Jacques Di Blasio et Diane Gagné, qui, dit-elle, lui ont inculqué des valeurs d’entraide. «Tous les Noëls, on allait voir l’arbre de la Place Ville Marie, puis on allait donner un coup de main au sein d’organismes de charité à Saint-Henri et à Pointe-Saint-Charles.» C’est sa chère maman qui a eu l’idée de créer un fonds, Love Money. Celui-ci sert notamment à payer l’essence des bénévoles. Mais au lieu d’empocher l’argent, ces derniers préfèrent la plupart du temps le remettre dans la cagnotte. Ces sous servent alors à acheter des victuailles pour des personnes plus démunies. «Quand elles nous commandent seulement un sandwich au jambon et une canette de coke, on leur demande ce qui leur ferait plaisir. Le Love Money sert alors à bonifier leur panier d’épicerie.»

 

 

Des liens impérissables

Mirella Di Blasio s’est toujours sentie très proche de ses grands-parents. Elle s’est aussi occupée de son papa pendant 20 ans quand celui-ci a été atteint de la maladie d’Alzheimer. Les aînés, elle les respecte. «Ils sont les bâtisseurs de notre pays. Il faut en prendre soin.» Et même si elle a parfois l’oreille en chou-fleur au bout d’une cinquantaine d’appels, elle ne se lasse jamais d’entendre la voix de ses interlocuteurs. Impossible, dit-elle, de ne pas s’attacher, par exemple, à la gentille Brenda, toute seule chez elle, qui veut des cacahuètes pour les écureuils, du pain pour les oiseaux, des toasts Melba pour les souris qui vivent dans les murs de son appartement et une tarte aux pommes pour gâter tous les soirs sa chienne Molly. «Je dis au gens "On ne se connaît pas, mais là, on est liés pour la vie!" J’ai d’ailleurs des rendez-vous déjà prévus: avec l’une pour prendre le gâteau, une autre pour boire le thé. Et j’irai faire une balade avec Brenda et Molly. Mon carnet social sera bien rempli!»

 

Pour plus d'info: 514 409-4790 ou covid-19@luluevenements.com.

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