Jamais trop tard pour changer ma vie!

Jamais trop tard pour changer ma vie!

Par Caroline Fortin

Crédit photo: Troy Spoelma via Unsplash

Ce n’est pas parce que les années ont passé qu’on doit cesser d’oser. Stratégies pour lever ces barrières mentales trop souvent auto-imposées. 

«Ce n’est plus de mon âge.» «Je suis bien trop vieille pour ça!» Des phrases qui ont sans doute déjà effleuré notre esprit et qui nous ont, consciemment ou non, empêché d’avancer, de réaliser un projet ou de nous lancer dans l’inconnu. Et si on changeait le regard qu’on pose sur nous-même dès maintenant, histoire de ne pas éprouver de regrets plus tard?

 

Les limites imaginaires

S’il est vrai que les circonstances de la vie et l’état de santé peuvent agir comme des freins, reste que le principal obstacle est bien souvent… nous-même. «Notre discours interne et les croyances qu’on entretient à notre égard ont une grande incidence sur nos prises de décision quant à notre engagement dans un projet ou une activité, explique Anouchka Hamelin, psychologue, neuropsychologue, chargée de cours et professeure associée au département de psychologie à l’UQTR. Et ces impressions sont influencées par des stéréotypes que la société associe à l’âge, comme la lenteur, la perte d’autonomie, d’indépendance, de capacité à apprendre de nouvelles choses, etc.» D’où les pensées limitantes du genre: «Je ne serai jamais capable, à mon âge, de X, Y, Z».

Le hic, c’est que plus on se répète cette litanie, plus on s’enfonce dans l’immobilisme. «Des chercheurs ont suivi sur plusieurs décennies deux groupes de personnes réparties selon la perception qu’elles avaient du vieillissement, ajoute la neuropsychologue. Ils ont constaté que les performances sur le plan de la mémoire s’avéraient moins bonnes chez celles qui entretenaient des croyances négatives sur le fait de vieillir. Inversement, chez celles qui avaient une vision plus positive de la vieillesse, ils ont observé une amélioration des performances mnésiques et moins de cas de démence.»

Bien sûr, la personnalité entre également en ligne de compte, nuance Laurence Villeneuve, psychologue à la clinique Bien vieillir et présidente du Regroupement des psychologues en gérontologie: «Comment était-on à 20, 30, 40 ans? Se lançait-on tête première dans différents projets ou réfléchissait-on d’abord longuement? Est-on de nature anxieuse? Des événements nous ont-ils fait perdre confiance en nos moyens? Un de mes patients m’a affirmé qu’à 62 ans, il avait gagné en confiance et que c’était un merveilleux cadeau qu’il s’était offert. Les gens ont parfois l’impression que, parce qu’ils ont toujours été comme ils sont, il leur est impossible de changer. Mais, avec de la volonté et du travail sur soi, on peut y arriver.»

Avec l’âge vient également un sentiment d’insécurité, de perte de contrôle et de moindre efficacité. «C’est normal, car il peut y avoir des risques accrus de blessure, note Anouchka Hamelin. On ne peut rien non plus contre le temps qui passe et le déclin inévitable de nos capacités ne nous donne pas l’impression d’être efficace. Tout ça fait qu’on est moins tenté d’adopter des stratégies qui nous permettront de nous dépasser ou d’explorer certains de nos intérêts, aptitudes ou passions. Et quand, en plus, on est très exigeant envers soi-même, on préfère ne pas prendre de risque, évitant ainsi la déception ou d’être confronté à une image à laquelle on ne veut pas correspondre. Au-delà de la personnalité, ceux qui ne reculent devant rien savent qu’ils possèdent les ressources intérieures pour affronter l’échec. Ils se disent qu’au moins ils auront essayé, qu’ils auront appris quelque chose au passage.»

 

Dresser un plan de match

La première étape pour se libérer de nos entraves mentales? Tout simplement prendre conscience des pensées qui nous brident, pour mieux les déconstruire. «Quand on creuse pour savoir pourquoi on a ce genre de pensées, on se rend compte que certains de nos raisonnements sont illogiques ou infondés, parce qu’ils se basent sur nos croyances sociales, notre éducation, nos peurs, nos blessures ou nos émotions, révèle Anouchka Hamelin. Si, par exemple, je m’estime trop vieille pour suivre un cours de danse classique, ne serait-ce pas parce que je crains de me faire juger ou d’avoir l’air folle plutôt que parce que mon corps me restreint?»

Ainsi, le mot «impossible» fait trop souvent partie de notre vocabulaire pour de mauvaises raisons. «Il faut remettre nos craintes en perspective, souligne Laurence Villeneuve. “Impossible d’apprendre le piano passé l’enfance!” Ah bon, pourquoi? Vos doigts sont soudés? L’âge ne limite en rien notre capacité d’apprendre, que ce soit une langue, un sport ou un instrument de musique. C’est même extrêmement bénéfique sur le plan cognitif de stimuler notre cerveau avec de nouvelles activités.»

Une fois cette introspection réalisée, seul ou avec l’aide d’un professionnel, on décortique notre projet. «De la même façon qu’on ne se prépare pas à grimper l’Everest en six mois, on se fixe de petits objectifs à atteindre plutôt qu’un trop gros, qui risque de nous décourager, poursuit Mme Villeneuve. Et on reste flexible, car on peut se rendre compte, au fur et à mesure qu’on s’y consacre, que notre projet évolue.» Par exemple, si on n’a jamais eu l’occasion de voir le monde et qu’on rêve de parcourir l’Europe en solo, on peut commencer par s’inscrire à un voyage organisé. Et peut-être qu’on trouvera tellement formidable d’être entouré de nouvelles personnes et de s’en faire des amis que notre projet va plutôt se transformer en désir de découvrir d’autres destinations avec eux.

D’ailleurs, signale Anouchka Hamelin, il est démontré qu’avoir des buts dans la vie protège contre l’apparition d’une démence. «C’est logique, puisque quand on a un objectif, on doit s’organiser, franchir plusieurs étapes, ce qui sollicite différentes zones du cerveau.»

Une autre clé pour s’aider à pulvériser nos barrières mentales est de chercher du soutien, voire de l’inspiration dans notre entourage. «Qui autour de nous peut nous appuyer dans notre plan de match, être là dans les moments importants? Comment cette personne peut-elle nous aider à garder la motivation?» demande Laurence Villeneuve. On peut aussi s’inspirer des réalisations d’un proche pour s’encourager à se lancer. Et surtout, il ne faut jamais oublier de se féliciter après chaque pas accompli.

Dans une société comme la nôtre, axée sur la performance, prendre un moment pour se repositionner est crucial, estime Anouchka Hamelin: «Vieillir requiert une adaptation, une acceptation du fait qu’on n’a plus autant d’énergie qu’à 25 ans. Si on exige de soi le même degré de performance que lorsqu’on était jeune, actif, carriériste, on risque fort d’en vouloir à la vie de nous obliger à vieillir. Il y a pourtant des points positifs à prendre de l’âge: on a accumulé un bagage de connaissances, notre jugement est meilleur, on peut servir de mentor, transmettre notre savoir. La vie n’étant pas un bail renouvelable, que préfère-t-on: se protéger en s’abstenant ou peut-être connaître un moment de bonheur en essayant quelque chose de nouveau? On n’a pas la liberté de choisir les obstacles qui se dressent sur notre chemin, mais on reste toujours libre de choisir notre attitude.»

 

L’âge n’est pas un frein pour…

• Courir le marathon. En 2019, le Gaspésien Hervé Leblanc a terminé le mythique marathon de Boston avec un chono de 4 heures 39 minutes pour 42,2 kilomètres… à l’âge de 80 ans. Pas mal pour un homme qui s’est mis à la course à 77 ans!

• Changer de maison. Julien Ferron et Jacqueline Arvisais ont quitté Pointe-aux-Trembles pour Shawinigan alors qu’ils avaient respectivement 83 et 89 ans, non pas pour intégrer une résidence spécialisée, mais pour s’installer dans une demeure qu’ils ont fait construire selon les plans de leur ancienne!

• Se faire tatouer. Anecdote de l’auteure de ces lignes: à des funérailles, j’ai remarqué un dessin à l’encre noire sur la main d’une de mes tantes. Faisant fi du qu’en-dira-t-on, ma parente octogénaire avait décidé de réaliser un de ses rêves, celui se faire tatouer un oiseau.

• S’initier au ballet. Comme on a pu le voir dans le documentaire Le vieil âge et l’espérance, on peut très bien s’exercer à la barre et aux pointes passé 60 ans, à l’image des femmes qui suivent les ateliers de Thérèse Cadrin Petit, l’ex-danseuse des Grands Ballets Canadiens de Montréal, destinés aux 45 ans et plus. 

• Retourner à l’école. L’an dernier, un reportage télévisé avait mis en valeur Sharon Sweeney, 75 ans, une fringante étudiante de l’Université du troisième âge, qui fréquente l’institution depuis une dizaine d’années. En 2019, à l’antenne de l’Université du Québec à Trois-Rivières, les participants avaient entre 50… et 92 ans! 

Sources: Chaleurs nouvelles, Le Nouvelliste, TVA Nouvelles

 

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