En solo et heureux

En solo et heureux

Par Julie Stanton

Crédit photo: iStockphoto.com

Shami, 51 ans, adjointe administrative

«Depuis mon divorce, il y a trois ans, j’adore voyager en solo! Je ne comprends pas mes copines qui croient que c’est hors de question pour elles. C’est certain qu’il faut être faite forte pour ce genre de voyages, et j’ai conscience de l’être.

Shami, 51 ans, adjointe administrativeJ’ai eu un coup de foudre pour l’Espagne où je suis retournée plusieurs fois. J’ai passé aussi quelques semaines à Paris et à Vienne, à admirer l’architecture et à regarder vivre les gens. Je me sens libre comme l’air!

J’ai une passion pour les musées où je peux passer de longs moments à contempler une œuvre d’art, tout comme je peux marcher pendant des heures. Pas sûr que ça plairait à quiconque m’accompagnerait! Donc, aucune obligation, ni horaire, ni concession.

Que ce soit pour dîner ou pour faire du shopping, j’entre où je veux, quand je veux. Je suis prudente cependant. Je choisis la chambre d’hôtel au lieu de l’appartement. Je ne me balade pas avec un appareil photo et, lorsque je m’assois à un bar, je pose toujours un livre à mes côtés pour indiquer que je ne veux pas être abordée par n’importe qui. Ce printemps, j’envisage d’aller en Italie… même si ma mère me dit qu’il vaudrait mieux économiser pour mes vieux jours!»

«Dans ma bulle avec mes journaux.»

Bill Mylett, 67 ans, directeur des ventes dans le domaine manufacturier

«Je suis un célibataire très social avec un côté solitaire hérité de mon père. Si je préfère fréquenter le théâtre à deux, c’est parce que j’apprécie les discussions qui s’ensuivent. Mais je n’ai aucun problème à aller au cinéma et au concert sans être accompagné.

J’aime bien me retrouver autour d’une bonne bouffe avec des amis, mais je mange plus souvent seul au casse-croûte ou dans un restaurant huppé. Parfois je m’assois au bar pour échanger avec mes voisins ou voisines. D’autres fois, je demande une table parce que je veux demeurer dans ma bulle avec mes journaux ou mon livre, tout en me permettant une petite jasette avec la personne chargée du service.

Au début de ma carrière, alors que j’effectuais de nombreux voyages d’affaires, j’étais mal à l’aise d’arriver seul au resto. J’avais de la difficulté à répondre «Un» quand l’hôtesse me demandait combien de convives nous étions! Maintenant, je ne m’occupe plus de ce que les autres pensent. C’est le confort total!» 

«Mon plaisir à moi!»

Jeannine Séguin, 61 ans, travailleuse sociale à la retraite

«Du plus loin que je me souvienne, j’ai toujours été cinéphile. Au cours des ans, j’ai suivi fidèlement une foule de festivals, dont le Festival des films sur l’art. Lors de la première édition à la Bibliothèque Saint-Sulpice, à Montréal, je suis restée sur place de midi à minuit, deux jours de suite!

Depuis ma retraite, le cinéma, j’en mange! Je ne planifie rien, je ne regarde pas la publicité ni les critiques que je lis plutôt après avoir vu le film. Avec ma façon de fonctionner, j’imagine mal être obligée d’attendre après quelqu’un ou de le consulter sur ses goûts! J’aime tous les films, incluant les documentaires, particulièrement les films étrangers présentés en version originale avec sous-titres. Mais, mis à part ceux de Woody Allen, dont j’estime le talent de réalisateur et de comédien, j’évite les films américains à sensations fortes.

Je consulte sur Internet la programmation des trois ou quatre cinémas dont je possède la carte de membre. Si un film m’accroche, je vais le voir dans les heures qui suivent ou le lendemain, même si le ciné n’est pas à Montréal. J’adore le grand écran!

Aller au cinéma seule convient parfaitement à mon statut de célibataire. Je peux demeurer dans l’émotion pure et le silence, revoir les images, réfléchir sur le sens du film. C’est une sorte de rituel pour moi. Regarder un film sur DVD, ou me lancer dans une discussion à chaud sur mes impressions, ça m’agacerait. Disons que j’entretiens avec passion mon plaisir à moi!»

«Je caressais le rêve de traverser le Canada.»

Marie-Josée Longchamps, 64 ans, comédienne, conceptrice et conférencière


«Autant pour ma carrière artistique que pour mes conférences sur la santé au naturel et dans les boutiques de mon mari, le naturopathe Jean-Marc Brunet, j’ai souvent parcouru de longues distances au Québec, seule au volant, et parfois jusque dans le Grand Nord. Mais je caressais le rêve de traverser le Canada. Alors, en 2006, j’ai profité de l’offre de Jean-Marc de l’accompagner à un congrès à Vancouver pour lui proposer qu’on s’y rende en auto, ce qui ne l’emballait pas vraiment. Nous avons donc convenu qu’il irait par avion et que je m’y rendrais à bord de notre voiture. J’avais une telle envie de voir les Rocheuses! J’ai longuement préparé mon itinéraire en choisissant d’avance des cafés-couettes à prix abordables. Pour ça, Internet est imbattable! Montréal, Sault-Sainte-Marie, Thunder Bay, Winnipeg, Calgary, près de 4000 kilomètres jusqu’à Vancouver au cours desquels j’ai pu admirer des paysages fabuleux. J’étais plongée au cœur de la beauté. J’aime cet état de méditation dans lequel je me trouve alors, comme si j’effectuais une retraite fermée. Cela me fait du bien, car je suis presque continuellement en relation avec le public, ce qui m’amène à parler beaucoup!

En voyageant en solitaire, je fais le point dans ma vie, je rêve et même je crée dans ma tête, ce qui ne pourrait être le cas si j’avais quelqu’un à mes côtés. Et puis, comme j’avais sur disquette une série d’émissions de radio racontant l’histoire de la route Transcanadienne, j’étais pour ainsi dire accompagnée d’un audioguide. Ce qui m’a permis d’apprécier encore davantage le parcours, tout en me procurant le sentiment d’une présence. Grâce à mes cours d’autodéfense, je n’ai jamais souffert d’insécurité. Mais je demeurais prudente. Je gardais toujours mon alliance et jamais je me suis mise en mode séduction. Je communiquais chaque soir avec mon mari. Dès le départ, lui et nos trois enfants savaient exactement quel lieu d’hébergement j’avais choisi pour chaque jour. Dans ce genre d’aventure, mieux vaut rassurer nos proches. En cas de pépin majeur, je savais que je pouvais sauter dans un avion car j’avais mon passeport avec moi. Cela étant réglé, je profitais pleinement de ma liberté.

S’il m’est arrivé d’éprouver parfois un petit frisson, notamment en me rendant seule, à l’aurore, admirer des petites chutes, ça ne m’a pas déplu. Je ne déteste pas l’adrénaline! Je connais toutefois mes limites. À 58 ans, je n’aurais pas fait la course Terry Fox en solitaire! Ce que je sais, par contre, c’est qu’on doit répondre à nos appels intérieurs. Si on a envie de prendre le large, il ne faut pas attendre l’approbation de tout le monde. C’est impossible. Dans un bon contexte, la question financière ne devrait pas, non plus, être un obstacle. Il faut voir ce type de voyage comme un investissement personnel, une source d’enrichissement. Ce qui nous appelle et nous interpelle nous amène à
grandir.»

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