L’amortalité– pour reprendre le terme du sociologue Edgar Morin – signifie que nous ne mourrons plus, si ce n’est par accident. Il paraît que nous atteindrons cette «amortalité» dans les 100 prochaines années, d’autres prétendent que ce sera… d’ici 25 ans!
Aux États-Unis, l’American Academy of Anti-Aging Medecine, forte de ses 11000 membres, se fait l’ardent défenseur de programmes de recherche susceptibles de nous amener à l’«amortalité» dans quelques décennies.
Le programme «amortaliste» – qui nous promet l’immortalité – se découpe en trois grandes phases. Puisque l’amortalité sera bientôt possible, le défi consiste à accroître dès maintenant son capital santé de façon à parvenir en pleine forme à cette étape prochaine où l’on pourra tirer parti des avancées des biotechnologies et des nanotechnologies qui, elles, nous permettront de vivre en pleine forme pour… toujours.
La première phase, dans laquelle nous sommes actuellement, pourrait s’appeler celle du régime de vie.
Dans une douzaine d’années, on passera à la deuxième phase, celle des biotechnologies. Les «amortalistes» envisagent qu’elles contribueront à fournir les premiers prolongements significatifs de la vie humaine. Elles cibleront par exemple des gènes spécifiques pour enrayer ou intensifier leur action, améliorant ainsi des fonctions biologiques. Mais les biotechnologies n’accompliront qu’un pas modeste. Car la grande question de l’amortalité est la suivante: comment faire en sorte que les milliards de cellules du corps humain cessent leur processus naturel de détérioration et, du coup, arrêtent de vieillir?
L’amortalité en 2025?
L’amortalité en 2025?
Comment intervenir de façon efficace non pas sur une dizaine de gènes, mais sur 23000, pour enrayer le vieillissement partout dans le corps? La réponse à cette question viendra des nanotechnologies, qui prendront leur plein essor vers l’an 2025. On pense qu’elles permettront de réparer ou d’améliorer toutes les cellules du corps. Comment? C’est encore très nébuleux, mais on envisage d’injecter dans le corps humain des milliards de nanoparticules conçues pour effectuer une foule d’actions spécifiques à l’échelle de l’infiniment petit: désencrasser les cellules, réparer l’usure des télomères sur les chromosomes, renforcer les fonctions immunitaires, etc.
Il ne fait pas de doute que ces projections sont fondées sur des avancées scientifiques très réelles, mais «ça reste très futuriste comme scénario», juge Charles Ramassamy, professeur agrégé à l’INRS-Institut Armand-Frappier et chercheur au Réseau québécois de recherche sur le vieillissement. Celui-ci conteste une idée fondamentale du mouvement amortaliste qui voit le vieillissement comme une maladie. «Vieillir est un processus physiologique, pas une maladie, insiste-t-il. On vieillit dès la naissance. Des cellules meurent pour laisser place à d’autres.»
Une notion fallacieuse à la base de l’amortalité est celle de la perfectibilité de la biologie humaine, constate M. Ramassamy. Même après 150 ans d’avancées médicales, on ne sait tout simplement pas comment améliorer le corps humain. On peut l’aider à guérir, compenser pour ses faiblesses, mais on ne sait pas comment faire mieux que lui. Charles Ramassamy propose une solution beaucoup plus accessible que la vision amortaliste: faire en sorte que l’humain se rende à 80 ou 90 ans en évitant de développer des maladies. «On a déjà de la difficulté à se rendre de façon optimale à 80 ans, imaginez comment ce serait de se rendre à 120», s’exclame-t-il. Avis donc à ceux qui rêvent de jeunesse éternelle: vivez merveilleusement bien en attendant!
Commentaires: