Étonnante, Danielle Ouimet! Celle qui soufflera ses 70 bougies le 16 juin prochain n’a pas fini de surprendre son entourage ni son public. Armée d’une farouche résolution, celle d’être libre et heureuse, comme en exprimait le souhait Valérie, son tout premier personnage dans le film culte éponyme des années 1960, la chaleureuse communicatrice vit sans retenue. Majeure, vaccinée et célibataire pleinement assumée, ça, c’est bien elle! Pas le temps de pleurer l’homme avec un grand H qu’elle n’a pas encore trouvé; elle est bien trop occupée pour cela. Entre ses nombreux projets, ses conférences, ses amis et sa famille, la vie est pour elle une grande partie de plaisir, jamais remise. Le secret? La réinvention. «J’ai besoin qu’il y ait toujours quelque chose de nouveau à faire, confie-t-elle. Je veux sans cesse bouger, penser et agir différemment. Je cherche constamment à me créer, à me recréer.»
Libre d’esprit
Ce goût de se redéfinir sans cesse, quitte à foncer dans l’inconnu, l’habite depuis qu’elle est toute jeune. «Déjà, à 14 ans, je voulais partir de chez moi. À 16 ans, j’étais prête à faire le saut.» Danielle se lance alors corps et âme dans l’univers des médias. Même si le milieu est impitoyable, celle qui deviendra Miss Québec en 1966, après avoir été figurante, hôtesse et mannequin, est inébranlable dans sa décision d’exercer ce métier. «Ma soif d’aventure était telle que j’aurais été incapable de revenir en arrière. J’aurais crevé de faim plutôt que de retourner vivre chez mes parents.» Même une grossesse à 19 ans, durant laquelle elle se réfugie en France pour échapper au scandale, ne vient pas à bout de sa détermination et n’atténue point son sens de la débrouillardise. «On oublie souvent que c’est nous qui détenons la solution à tout problème.» Pour la jeune fille, la liberté vient avec ça. «Je n’ai jamais voulu dépendre des autres ou vivre à leurs crochets. J’ai toujours préféré me dégourdir par mes propres moyens.»
Sa vie, comme elle l’entend
Étant la première Québécoise à se dénuder au grand écran, cette fille de bonne famille, tout juste 21 printemps, est devenue presque du jour au lendemain un sex-symbol à l’échelle planétaire. Une image qui lui colle encore à la peau. Dans son nouveau livre autobiographique, Mes amis, mes amours – Ce que les hommes m’ont appris (Les Éditions de l’Homme), où elle se confie en toute simplicité et candeur dans le but, entre autres, de «régler mes ruptures en les couchant sur papier», elle raconte cependant que tout n’était pas rose dans l’univers cinématographique. «Il n’y a rien de moins érotique… qu’un tournage de film érotique!»
Que certains moralistes aient pu lui reprocher son manque de pudeur étonne la comédienne près de cinq décennies plus tard. «Ceux qui voient le film de nos jours disent plutôt: « Toute cette histoire pour ça? »» Sans compter que, malgré son statut de fille-mère, elle tenait davantage de la pucelle que de la dévergondée. La preuve que «l’inexpérience n’est pas un contraceptif». Pas opportuniste pour deux sous, comme certains le croyaient, elle a accepté de jouer ce rôle pour assouvir non pas un besoin avide de gloire, mais une envie d’émancipation. «Je voulais montrer à mes parents que je pouvais faire les choses à ma manière. Et, pour une raison plus terre-à-terre, j’avais besoin d’argent afin de pouvoir m’installer dans un appartement avec mon fils, Jean-François, alors âgé d’un an.» Des regrets? «Aucun!» lance la vedette aux yeux azur, qui ajoute que, même s’il y a eu un prix à payer, ce premier pas dans un domaine où il y a peu d’élus a été le point de départ d’une vie professionnelle fabuleuse. «Cela m’a permis d’élargir mes horizons et de gagner en liberté.»
Les hommes sur son passage
Erreur sur la personne? Séduits par son aura de sex-symbol, les prétendants ont été légion dans la vie de Danielle. «Les hommes me croyaient très libre, ouverte à tout. Ils sont venus vers moi à cause de cela.» La belle recherche toutefois un amour simple et paisible. «J’ai toujours vécu à gauche et à droite dans le cadre de mon travail, mais à la maison, je rêvais d’une existence normale. Or, me voir vaquer à des occupations normales, comme frotter le plancher, suffisait parfois à refroidir les ardeurs de mon amoureux du moment!» (rires)
Dans son dernier ouvrage, elle rend hommage aux amis et amants qui l’ont fortement marquée, dont Michel Duplat, le père de son enfant, Michel Mastantuono, le trafiquant d’héroïne, Michel Forget, le comédien, Hubert Émond, le seul mari qu’elle ait eu, Pierre Péladeau, le millionnaire paternel. Si aucun n’est devenu l’homme de sa vie, chacun à sa manière l’a nourrie et aidée à grandir. «Dans le fond, j’ai toujours éprouvé une incapacité à m’attacher parce que mon métier m’attirait davantage. Il me permettait d’une certaine façon d’être en contrôle de la situation, ce qui n’était pas forcément le cas dans mes relations amoureuses. J’y accordais donc plus d’énergie qu’à mon couple.»
L’amitié avec un grand A
N’empêche que «ses» hommes ont beaucoup compté pour elle. «Après la rupture puis la réconciliation, ils sont tous restés mes amis jusqu’à la fin.» Comme elle n’est pas portée sur la confrontation («Ça vient de l’éducation que j’ai reçue de ma mère.»), il y a eu peu de disputes lors des séparations. «C’est dans l’amitié qu’on a réglé nos différends. L’humour désarme tout et la vérité fait que tu peux continuer d’avancer.»
L’amitié serait-elle plus importante à ses yeux? «Absolument! Les enjeux ne sont pas les mêmes qu’en amour. Et l’amitié reste un endroit où on peut se confier, s’épancher sans peur du jugement qu’un amoureux pourrait nous offrir. Un ami, tu le prends avec ses défauts parce que ses qualités comptent bien plus. Cela dit, j’ai beaucoup plus peur qu’on me trompe en amitié qu’en amour. La trahison me semble plus grande, la claque, plus sévère.» A-t-elle de bonnes copines? Seul son plus grand complice depuis des lunes, le coiffeur Alvaro, le sait. «En vérité, j’ai très peu d’amies. J’ai longtemps été perçue comme une rivale. Mais je n’hésite pas à accorder mon affection aux femmes vives, dégourdies, assumées et drôles, qui ont gardé leur côté petite fille et qui savent profiter de la vie.»
Touche-à-tout
Épicurienne, énergique, la blonde animatrice est toujours en mode go go go. Du repos, très peu pour elle! «Je me suis donné dès mon jeune âge une liste to do. Mais au fur et à mesure que j’y ai coché mes accomplissements, j’étais de moins en moins convaincue que j’allais vers la retraite. Ce n’est pas dans ma nature!» En plus d’avoir été très polyvalente dans son métier, notre femme-orchestre a entretenu de nombreuses passions au fil des ans: dessin de mode, écriture, karaté, rénovation de maison et design d’intérieur, peinture, ébénisterie, rafting, karting, derby de démolition, ballet, ballet-jazz, ski: «J’ai tout fait sauf sauter en parachute, et ce n’est pas dit que je ne le ferai pas un jour!» Elle adore aussi son nouveau chapeau de conférencière, qu’elle coiffe avec plaisir, par exemple, pour se rendre en Floride dans le but de parler aux femmes vieillissantes de l’art… de ne pas s’ennuyer. «Je donne souvent l’exemple de ma mère. Elle a élevé quatre enfants, mais aspirait à dessiner. À 80 ans, elle a décidé de perfectionner son art en s’inscrivant à des cours. Nous avons toutes le pouvoir de nous accomplir et de nous redéfinir.»
Le grand amour
Même si elle-même n’est pas casée depuis un bon nombre d’années, notre dynamique et solo quasi-septuagénaire s’est découvert un talent pour… le coaching amoureux. «Je suis devenue un rendez-vous pour les quadragénaires dont le cœur a été brisé.» Le sujet de l’heure: la tromperie. «J’ai eu à me consoler d’un amour perdu. Je suis souvent partie en voyage, pour revenir épuisée d’avoir haï et versé des larmes. J’allais au bout de ma peine, sans me laisser toutefois envahir. Je veux montrer qu’on gagne à se ressaisir, sinon on se ferme aux autres.» Elle-même espère-t-elle trouver un jour l’homme de sa vie? «Est-ce que ça existe même? Je l’ignore. Tout ce que j’ai appris avec mes partenaires, la détermination de l’un, l’honnêteté de l’autre, un seul n’aurait pu m’apporter tout cela.»
Ses critères? «Oh là là, ça, c’est très dur. Chose certaine, il faudrait que cette personne se soit dépensée autant que moi et ait vécu chaque jour à fond. Qu’elle ait de quoi à me raconter.» Les rencontres Facebook, très peu pour elle. «Il arrive que des internautes essaient de me soutirer des confidences de nature sexuelle. Oui, encore aujourd’hui!» Heureusement, rien ne presse. «Ça prend du temps et plus on vieillit, plus nos habitudes deviennent ancrées. Il faudrait que je m’acclimate et ça, je ne sais pas si j’en serai capable. Mais, on ne sait jamais. Je ne suis pas à l’abri de rencontrer quelqu’un qui pourrait me surprendre.»
Telle grand-mère, telle petite-fille
Une rencontre qui l’a agréablement surprise dans sa vie est celle avec sa petite-fille, Alexia, aujourd’hui âgée de huit ans. Grand-maman gaga, notre Danielle, ça oui! «Moi-même, j’adorais ma grand-mère Lauda, dont je porte le nom d’ailleurs. Pour moi, elle représentait un havre de paix.» Étant donné que son fils, cinéaste, et sa bru, avocate, doivent, comme tous les parents qui travaillent, jongler avec des horaires parfois difficiles, elle se glisse avec bonheur dans son rôle de mamie. «Quand je suis avec elle, je déploie tout ce que je sais. On fait des bijoux, du dessin sur verre, on popote, on joue à des jeux sur sa tablette.» La doyenne, qui aime rechercher auprès de la jeunesse son énergie et ses idées nouvelles, se réjouit de la maturité de sa petite-fille: «Je lui parle en adulte et elle réfléchit en adulte. C’est une enfant extraordinaire.» Et qui a de sa grand-maman dans le nez! «À cinq ans, je lui ai demandé pourquoi elle avait trois chums et n’en choisissait pas un. Elle m’a répondu en anglais: That’s the way my life goes. (C’est ainsi que je mène ma vie) Ça donne une petite idée de ce qu’elle sera en grandissant!» Et quand viendra la saison des peines d’amour, grand-mère sera présente: «Je lui dirai: « Ne t’en fais pas, j’ai survécu, tu survivras aussi. »»
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