On nous promettait le pire: les ordinateurs allaient cesser de fonctionner, les centrales nucléaires, déboussolées, ne sachant plus à quel cadran se vouer, allaient se mettre à cracher leur poison dans l’atmosphère, les barrages allaient céder et les rivières sortir de leur lit. Ce qui s’est passé? Rien! Rien du tout! La vie a continué son petit bonhomme de chemin, comme si de rien n’était. Comme si rien ne pouvait l’arrêter. Pour le meilleur et pour le pire.
…
Une nouvelle année, donc, puisqu’on n’arrête pas le temps. Et c’est bien ce que l’on souhaite, n’est-ce pas, que ça dure… que ça dure le plus longtemps et le plus agréablement possible?
Et comme le veut la tradition, une année qui commence, c’est aussi l’occasion de faire le point sur sa vie, tel le commerçant qui, en fin de saison, met de l’ordre dans ses livres, dressant la liste des gains et des pertes, histoire de voir comment vont les affaires.
On fait un zoom sur son existence. On se félicite de ses bons coups. Et on rajuste le tir au besoin. On prend des résolutions.
J’ai en mémoire plusieurs matins du premier janvier. Assis au salon, crayon et papier en main, je fais le tour de ma vie pour voir ce que je pourrais, ce que je devrais améliorer… «Manger moins de desserts. Remplacer les carrés aux dattes et la tarte aux pommes par un bon fruit… Reprendre le jogging… Ne plus me laisser marcher sur les pieds… Cesser de me comparer… Me faire davantage confiance.» J’écrivais tout ça comme si je voulais être bien sûr de ne rien oublier!
Ai-je tenu mes promesses? Pas toujours! Le goût du sucré, par exemple, reste encore et toujours un défi de tous les jours. Mais il est rassurant et stimulant de savoir qu’on réussit parfois à faire mieux. Ainsi, je ménage autant que je peux ma monture… dans l’espoir de me rendre le plus loin possible. Par exemple, je monte quatre ou cinq fois par semaine les escaliers qui mènent à mon appartement. Je fais une demi-heure de vélo stationnaire tous les jours et des exercices de cohérence cardiaque quelques fois par jour… ce qui aide grandement à diminuer le stress. Car j’ai bien l’intention de mourir en santé.
Tirer le meilleur parti possible de cette fabuleuse aventure qu’on appelle la vie
J’ai surtout envie d’ici là de tirer le meilleur parti possible de cette fabuleuse aventure qu’on appelle la vie. Et si je suis de moins en moins adepte des résolutions du 1er janvier, c’est sans doute parce que j’ai compris avec les années que le bonheur se construit dans la constance et la vigilance… un peu comme le jardinier qui, tous les matins, fait le tour de son lopin. Ainsi, jour après jour, j’arpente les allées de ma vie afin de voir si je n’aurais pas laissé quelque plant se flétrir, oublié d’arroser un rêve, mis le pied par inadvertance sur une pauvre petite pousse qui pourtant ne demandait qu’à vivre, laissé une peur faire de l’ombre à mes jours…. désherbant au besoin afin de mieux laisser passer la lumière et le soleil.
Tout cela est dit, j’en conviens, de façon bien imagée.
C’est que j’aime voir la vie comme un jardin… Comme un petit lopin de terre qui nous a été donné et qui peut nous être repris à tout instant. Car – en nous inspirant du poète – rien n’est acquis à l’homme, ni sa force, ni sa faiblesse… ni surtout son jardin! Il arrive donc parfois qu’un grand vent vienne tout jeter par terre, déracinant ces plants dont nous avions pris le plus grand soin, nous obligeant alors à ressortir bêche et râteau, à relever les manches et à recommencer. C’est ce qui s’appelle avoir du courage devant l’épreuve!
Mais n’est-ce pas justement parce que tout y est si fragile que notre jardin est si précieux et que nous continuons vaillamment, passionnément, jour après jour, à en faire le tour?
Bonne année à vous tous, jardiniers et jardinières!
Jean-Louis Gauthier Rédacteur en chef
jean-louis.gauthier@bayardcanada.com
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