Éric aime son travail de technicien pour une compagnie de fabrication d’appareils électroniques. Avec son salaire annuel de 55 000$, ce célibataire de 40 ans estime bien gagner sa vie. Malgré les joies qu’il retire de son métier, il prévoit prendre sa retraite tôt, à 60 ans. Il lui reste donc une vingtaine d’années pour accumuler le plus d’argent possible dans son REER, car il ne participe à aucun régime complémentaire de retraite au travail.
Depuis quelques années, Éric réussit à verser le maximum permis dans son REER, c’est-à-dire 18% de son salaire, ou 9 900$. Son REER vaut aujourd’hui 40 000$. Son avis de cotisation fédéral indique qu’il a des droits inutilisés de 80 000$. Il se demande comment il pourrait en tirer parti.
À la retraite, Éric compte vivre avec un budget annuel d’environ 30 000$ net d’impôt, indexé au fil des ans. Au rythme actuel de ses contributions, pourra-t-il atteindre cet objectif? Pour le savoir, il s’est adressé à Denis Bellemare, planificateur financier et représentant en épargne collective à Desjardins Cabinet de services financiers (Gestion des avoirs, Fédération des caisses Desjardins du Québec), à Québec.
La meilleure stratégie
«La clé pour Éric consiste à combler ses droits REER inutilisés. Plusieurs scénarios sont possibles», dit Denis Bellemare. Mais avant d’élaborer des stratégies, l’expert a commencé par vérifier plusieurs points.
D’abord, il base ses scénarios sur une espérance de vie estimée à 90 ans pour Éric. Cela lui a permis d’évaluer les besoins en investissement de son client. Celui-ci présente un profil «équilibré croissance», de sorte que Denis Bellemare peut lui bâtir un portefeuille qui devrait produire un rendement annuel moyen de 6,58% (historique de rendements projetés), compte tenu d’un taux d’inflation annuel de 2%. Ensuite, il a constaté que le revenu d’Éric le plaçait dans la tranche de 38,4% pour ce qui est du taux marginal d’imposition. Enfin, il a établi qu’Éric touchera des revenus publics de pension de 13 452$ par année (en dollars d’aujourd’hui), composés de la rente de retraite du RRQ et, à partir de 65 ans, de la Pension de la sécurité de la vieillesse. Ces montants sont imposables. Pour équilibrer son budget, Éric devra combler la différence avec son REER.
«Les projections indiquent que, d’ici sa retraite en 2027, Éric pourra dépenser chaque année 40 165$ net d’impôt sans effort d’épargne additionnel. Il profitera également de l’économie d’impôt sur ses cotisations annuelles actuelles de 9 900$ à un taux marginal approximatif de 38,4%», calcule Denis Bellemare.
Ces éléments en place, le spécialiste a examiné cinq scénarios. L’objectif, rappelons-le, est de constituer une épargne retraite suffisante pour générer 30 000$ par année.
Les scénarios
Scénario 1: ne rien changer. Si Éric continue à verser 9 900$ chaque année dans son REER, il accumulera 556 026$ au moment de son départ à la retraite. Ce capital ne lui assurera que 25 488$ net par année. Seulement 85% de son objectif sera réalisé.
Scénario 2: viser 30 000$ par année. Pour ce faire, Éric doit augmenter ses cotisations REER de 3 704$ par année (308,67$ par mois). Mais si l’on considère l’économie d’impôt, l’effort budgétaire net sera de 2 272$. Ses contributions annuelles passeront donc à 13 604$. Quand il arrivera à la retraite, Éric disposera d’un REER de 705 066$, somme qui lui procurera 30 000$ par année. Son objectif financier sera atteint à 100%. «Cependant, il n’aura pas comblé tous ses droits inutilisés», constate Denis Bellemare.
Scénario 3: emprunter pour combler les droits inutilisés. Éric pourrait emprunter 80 000$ et combler d’un coup ses droits REER inutilisés. Afin d’optimiser l’avantage fiscal, il étalerait les déductions sur 19 ans. Il rembourserait sa dette également sur 19 ans, ce qui représente des paiements annuels de 8 413$. «Grâce à cette stratégie, il profitera immédiatement de la croissance de son REER sur ces 80 000$ et maximisera ses déductions fiscales», souligne Denis Bellemare. À la retraite, son REER vaudra 824 337$ qui lui permettront d’obtenir 33 550$ nets par année. Éric atteindra alors 112% de son objectif de départ. Cependant, à cause des paiements, il verra son niveau de vie baisser d’environ 6 114$ par année, ou 118$ par semaine, en comparaison avec son style de vie d’aujourd’hui. C’est considérable. «Emprunter pour combler des droits inutilisés est une stratégie généralement profitable lorsque la dette est effacée sur une courte période», signale Denis Bellemare.
Scénario 4: combler les droits inutilisés sur 19 ans. Si Éric augmente ses contributions de 4 210$ par année, il comblera ses droits inutilisés lorsqu’il arrivera à la retraite. Le calcul est simple : 80 000$ ÷ 19 ans = 4 210$. Bien entendu, cette somme s’ajoute aux 9 900$ qu’Éric continuera de verser chaque année dans son REER. «Sans même employer la totalité des cotisations REER possibles, il accumulera néanmoins une épargne-retraite de 711 696$. Cela lui rapportera 30 154$ par année, soit 101% de son objectif», estime Denis Bellemare. L’impact sur le niveau de vie sera moindre: Éric devra diminuer ses dépenses de seulement 2 458$ par année, ou moins de 50$ par semaine, ce qui est beaucoup plus réaliste. «Cette stratégie est préférable au prêt REER à long terme, compte tenu de sa capacité budgétaire», dit Denis Bellemare.
Scénario 5: maximiser complètement les cotisations REER. Ici, on présume que a) le salaire d’Éric augmentera au même rythme que l’inflation jusqu’à sa retraite; b) Éric rajustera ses cotisations REER à la hausse chaque fois que son salaire s’appréciera; c) il continuera à verser dans son REER le maximum permis par la loi; d) il comblera ses droits inutilisés sur une période de 19 ans.
Tout compris, Éric versera 16 116$ par année à son REER. À la retraite, il aura 786 418$ qui lui assureront un revenu annuel de 32 412$, soit 108% de son objectif de départ. Pour y parvenir, il devra cependant diminuer ses dépenses de 3 640$ par année, ou 70$ par semaine. C’est beaucoup moins que la réduction de 118$ par semaine que commande le scénario 3, mais ça demeure un montant important.
Épargner
Épargner…
Il est clair qu’Éric devra faire un effort d’épargne additionnel s’il veut atteindre son objectif de retraite. Après discussion avec Denis Bellemare, il choisit d’opter pour le scénario 4. «Cette stratégie qui consiste à cotiser régulièrement à son REER et à combler ses droits inutilisés sur 19 ans lui permet de maximiser ses remboursements d’impôt sans trop affecter son niveau de vie», conclut Denis Bellemare.
Scénario
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Dépenses annuelles possibles avant la retraite (2008-2028) |
Cotisations REER annuelles | Valeur du REER à la retraite | Revenus annuels générés à la retraite |
Pourcentage de l’objectif atteint |
1. Ne rien changer
|
40 165 $ | 9 900 $ | 556 026 $ | 25 488 $ | 85 % |
2. Viser 30 000 $/an
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37 893 $ | 13 604 $ | 705 066 $ | 30 000 $ | 100 % |
3.Emprunter pour combler les droits inutilisés |
34 051 $ | 9 900 $ + 8 413 $/an pour le prêt | 824 337 $ | 33 550 $ | 112 % |
4. Combler les droits inutilisés sur 19 ans |
37 707 $ | 14 100 $ | 711 696 $ | 30 154 $ |
101 %
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5. Maximiser complètement les cotisations REER | 36 525 $ | 16 116 $ | 786 418 $ | 32 412 $ |
108 %
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Rendement projeté des placements : 6,58%. Taux annuel d’inflation : 2%.
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