Alors qu’on commémore le centenaire de l’Armistice, pourquoi ne pas partir à la découverte des sites où combattirent tant de Canadiens durant la Grande Guerre? La Belgique et le nord de la France nous réservent en plus de très belles villes au passage.
Ils s’appelaient Watson, Brown, Bouvrette, Price, Tremblay… Plusieurs centaines de milliers d’hommes ont traversé l’Atlantique lors de la Première Guerre mondiale pour combattre sur les terres lointaines de la vieille Europe. Et plus de 60 000 n’en sont jamais revenus. Parmi ces jeunes envoyés au front, les 1024 Canadiens-Français du 22e Bataillon, créé en octobre 1914 grâce au financement du richissime médecin et officier Arthur Mignault. Après quelques mois d’entraînement, ils ont débarqué en France, où la population locale, surprise de voir défiler des soldats venus de si loin qui parlaient la même langue, leur réserva un accueil chaleureux.
À l’instar de tous les soldats emportés par ce tourbillon de folie, ces Québécois croyaient rentrer rapidement dans leurs foyers à l’issue d’une guerre-éclair. Hélas, le conflit s’est enlisé durant plus de trois terribles années de souffrance et de misère. Des dates importantes en ont marqué la chronologie, entre semi-victoires et désastres, tranchées perdues et regagnées, trous d’eau et lignes de front. Tous ces lieux stratégiques voient aujourd’hui encore fleurir l’émouvant coquelicot rouge, fleur emblématique de la tragédie guerrière et hommage à ses victimes. Une vingtaine de sites et monuments canadiens sont consacrés à la Grande Guerre dans la région des Flandres, en France et en Belgique. Tous racontent ce qui s’est passé ici il y a cent ans. Pour ne jamais oublier.
Quel itinéraire?
Pour un voyage d’une semaine environ, permettant de découvrir à la fois des lieux de mémoire et des villes emblématiques, l’idéal est de prendre un vol AR pour Bruxelles, dont la situation centrale permet un maximum de visites. À noter que Paris et Amsterdam sont à environ 1 heure 30 en train de la capitale belge (qui est aussi la capitale européenne), et Londres à seulement 2 heures 20, toujours par voie ferroviaire. Parfait pour prolonger son voyage vers une de ces grandes villes.
Atterrissage à Bruxelles le matin et prise en charge du véhicule de location. Direction Bruges, visite et logement.
Le matin, direction Ypres et visite du mémorial In Flanders Fields, présence au Last Post puis logement à Ypres.
Direction Lille et visite de la ville. Logement.
Direction Arras avec visite du Mémorial canadien de Vimy. Logement à Arras.
Découverte de la ville d’Arras. Visite du mémorial Notre-Dame de Lorette puis de l’Historial de Péronne. Direction Mons, capitale culturelle européenne en 2015. Visite et logement.
Retour à Bruxelles, visite du centre et de la Grand-Place… Logement.
Départ vers l’aéroport et remise du véhicule.
Bruges
Venise du Nord
De nombreux musées enrichis de magnifiques œuvres d’art rappellent la richesse historique de cette cité incontournable, sillonnée de canaux, tout comme Venise, Amsterdam ou Saint-Pétersbourg. Depuis son rôle de place fortifiée au Moyen Âge jusqu’à son commerce avec les ports de la mer et de l’Europe du Nord, les trésors d’art se sont accumulés. Le musée Historium, nouvelle et très belle attraction, permet de vivre l’Âge d’Or de Bruges, par ailleurs si bien préservée qu’on plonge des siècles en arrière à la moindre balade. Info: visitbruges.be et historium.be.
Ypres
Terre de mémoire
C’est à Ypres que se trouve le fascinant musée In Flanders Fields. Le visiteur y est invité à découvrir la Première Guerre mondiale via des projections, des extraits sonores exclusifs et des applications multimédia. Un bracelet «coquelicot» nous connecte à l’une des quatre histoires personnelles de témoins de la Grande Guerre. Une rencontre à travers le temps… Tout près, la porte de Menin est animée chaque soir par le Last Post, sonné à 20 h précises depuis 1924 (il ne s’est interrompu que de 1940 à 1944). Ce moment émouvant commémore les 54 896 soldats et officiers du Commonwealth disparus. Info: toerismeieper.be et inflandersfields.be.
Passendaele
Vallée de souffrance
Théâtre d’une horrible bataille en 1917 (la troisième bataille d’Ypres), où plus de 400 000 soldats furent tués ou blessés pour faire avancer la ligne de front d’à peine quelques kilomètres, Passendaele (ou Passchendaele) est devenu un symbole. Curieusement, le nom flamand Passendale prononcé en anglais a des résonances étranges et prémonitoires, Passion dale (vallée de souffrance). Info: passchendaele.be. Le Memorial Museum Passchendaele 1917 est situé à Zonnebeke.
Lille aux trésors
Bienvenue chez les «Chtis», au cœur de la capitale nordiste de la France! Une ville à visiter et à déguster en toute saison. Le vieux centre prouve que l’on est bien dans une ville du nord, par son architecture, sa gastronomie et ses accents. Ses quartiers témoignent par contre d’influences multiples. À ne pas manquer: le Palais Rihour, la Vieille Bourse, le Rang du Beauregard, la cathédrale Notre-Dame de la Treille (moderne et lumineuse) ou l’Hospice Comtesse. La modernité se dévoile quant à elle dès la sortie de la gare TGV (train à grande vitesse), face à l’architecture futuriste d’Euralille. Info: lilletourism.com.
Vimy
Canadienne à jamais
La conquête de la crête de Vimy (Pas-de-Calais) libéra la région, menacée par l’artillerie allemande sur cette colline depuis 1914. Le 9 avril 1917, les troupes du Corps d’armée canadien, placées sous le commandement du général Byng, passèrent à l’assaut. Elles réussirent à prendre le contrôle de la «côte 145» le 12 avril. La victoire remonta le moral des Alliés, tout en assénant un grand coup aux ennemis.
Entouré d’un terrain de 107 hectares, le parc commémoratif offert au Canada par la France rend hommage à la mémoire des Canadiens qui y ont souffert et donné leur vie. Sur les 66 000 soldats du corps expéditionnaire canadien, 3598 y sont morts. Les noms de 11 285 autres, portés disparus, sont inscrits sur le mémorial lui-même. Comme le site est géré par le ministère des Anciens Combattants du Canada, une équipe d’une trentaine de Canadiens, dont plusieurs jeunes étudiants, accueille les visiteurs, les guide et leur explique les événements avec enthousiasme et professionnalisme. Info: veterans.gc.ca. Des commémorations ont lieu jusqu’au 11 novembre 2018 mais aussi après.
Arras
Sous les pavés, la liberté
Entre charbonnages et champs de bataille, terrils et cimetières militaires, passé et futur, la superbe ville d’Arras est connue pour ses «boves». Ces tunnels calcaires ont tenu un rôle important, avec la fameuse carrière Wellington. À une vingtaine de mètres de profondeur, l’endroit a abrité l’installation secrète d’une armée de… 24 000 Britanniques, Australiens, Néo-Zélandais et Canadiens! Hélas, leur attaque-surprise, en 1917, n’a fait reculer le front que de quelques dizaines de mètres à peine.
Au-delà de ce lieu de mémoire, Arras arbore de belles places de style baroque flamand (Grand-Place et Place des Héros), un superbe hôtel de ville et un beffroi classé au Patrimoine mondial de l’Unesco, qu’on ne manque pas de visiter non plus. Non loin de là se trouve Notre-Dame-de-Lorette, le plus grand cimetière militaire français avec 20 000 tombes individuelles et plus de 22 000 soldats inconnus, au pied de la Basilique et de la tour de la Lanterne. Et au sud d’Arras, la ville de Péronne abrite le passionnant Historial de la Grande Guerre dans son château médiéval. Info: explorearras.com, cheminsdememoire-nordpasdecalais.fr, somme14-18.com et historial.fr.
Mons
Le premier et le dernier
Dans cette ville située dans la région belge de la Wallonie, le 23 août 1914, les Britanniques affrontèrent les Allemands, qui avaient envahi la Belgique, bafouant la neutralité du pays. Cette date marqua le début de l’implication effective des troupes étrangères dans le conflit. Et le 11 novembre 1918, grâce notamment aux Canadiens qui libérèrent la ville après 50 mois d’occupation, c’est à Mons aussi que la tragédie fit sa dernière victime, quelques minutes seulement avant l’Armistice: le soldat canadien George Lawrence Price fut tué par un sniper allemand. D’où l’expression souvent associée à cette cité: «Mons, the First & the Last». La boucle était (tristement) bouclée. La ville propose un parcours mémoriel à forte symbolique, avec des visites passant par le Mons Memorial Museum et le cimetière militaire de Saint-Symphorien, où reposent côte à côte 229 soldats du Commonwealth et 284 soldats allemands. Info: visitmons.be.
Pour en discuter en famille
À 10 h 58 le 11 novembre 1918, tout juste deux minutes avant la signature de l’Armistice, George Lawrence Price est devenu le dernier soldat canadien tombé au champ d’honneur durant la Première Guerre mondiale. Pour lui rendre hommage, Jacques Goldstyn, le fameux bédéiste des Débrouillards, a écrit et illustré l’album Jules et Jim – Frères d’armes, qui raconte le parcours de deux inséparables amis d’enfance, plus tard enrôlés dans l’armée. Un récit plein d’émotion, d’humour et de tendresse, à lire en compagnie des plus jeunes pour leur faire découvrir un important jalon de l’histoire contemporaine (L.R.). Bayard Jeunesse, 64 p., 21,95 $.
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