On a tous de ces connaissances dont on suit la vie en pointillé, à distance, au gré des discussions avec des tiers ou des nouvelles affichées sur les réseaux sociaux. Un soir, j’ai ainsi «liké» la belle photo en famille d’une relation professionnelle. Entourée de sa petite fille qu’elle a bataillé pour concevoir et de son chum, elle resplendissait «à 10 jours de reprendre le travail après son congé parental et à deux mois de son mariage». Le lendemain, même heure, elle écrivait tout autre chose, demandant de penser très fort à eux: son amoureux, passé à l’hôpital pour de simples maux de ventre, venait d’être envoyé en intervention d’urgence, avec pronostic vital engagé. À 34 ans, il faisait une forme d’embolie dans les intestins qui n’arrive jamais à son âge. Trois opérations et bien du courage plus tard, il est tiré d’affaire. Sauvé sur le fil.
S’y fait-on un jour, à ces bascules? En un claquement de doigts, la vie peut changer du tout au tout, nous rappelant brutalement qu’elle n’est pas à durée indéterminée. Quand on a déjà été gravement atteint ou confronté à la maladie d’un proche, on prend davantage conscience que le corps a ses limites, et ses caprices. Mais de là à réussir à parler de la mort? Trop anxiogène! Qui n’a pas déjà vu des proches prendre le bord en cas de gros souci de santé? Des êtres sont présents depuis si longtemps dans nos vies qu’on ne supporte parfois pas de les voir vieillir ou partir. On préfère ne pas y penser, cacher sous le tapis l’idée qui fâche, le mot qui tue.
Pourtant, garder la mort en tête (sans y penser aux deux secondes!), savoir qu’elle fait partie de nous, c’est une vraie force. On fait alors davantage place à l’amour dans son quotidien, on s’ouvre davantage aux autres, et on ne se sentira donc jamais seul, même à la toute fin: les personnes aimées, vivantes ou disparues, nous accompagnent partout. De quoi donner encore plus envie de profiter de chaque moment, chaque repas, chaque voyage, chaque été (il n’est pas encore terminé!) et, surtout, chaque ami…
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